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13/11/2014 | FRANCE | N°14LY00640

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2014, 14LY00640


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2014, présentée pour M. A...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302199 du 4 février 2014, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 août 2013 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixé le Kosovo comme pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 août 2013 en ce qu'il refuse de lui

délivrer un titre de séjour, l'oblige à quitter le territoire à destination du Kosovo et ...

Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2014, présentée pour M. A...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302199 du 4 février 2014, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 août 2013 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixé le Kosovo comme pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 août 2013 en ce qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour, l'oblige à quitter le territoire à destination du Kosovo et fixe ses obligations avant son départ ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer le titre de séjour sollicité et, sous quarante-huit heures, une autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 300 euros à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et, subsidiairement, s'il ne bénéficie pas de l'aide juridique, de lui verser 1 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le préfet, ainsi que l'attestent les mentions que comporte l'arrêté contesté, n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que n'est pas établie l'existence d'une offre de soins au Kosovo comprenant aussi bien les structures que les équipements, les médicaments, les dispositifs médicaux et le personnel compétents ; que les dangers personnellement encourus en cas de retour au Kosovo constituent des circonstances exceptionnelles tirées de sa situation personnelle l'empêchant d'accéder effectivement à des soins appropriés et que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire est illégale dès lors que le refus de titre est illégal et méconnaît en outre les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité des décisions précédentes et méconnaît en outre les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant les obligations qu'il doit remplir avant son départ est illégale du fait des autres décisions et méconnaît en plus les libertés fondamentales en ce que les obligations sont disproportionnées au but poursuivi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 6 juin 2014 fixant la clôture d'instruction au 30 juin 2014 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2014, par lequel le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête ;

Le préfet soutient que :

- la décision est suffisamment motivée ;

- la décision de refus de séjour n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que M. B...pourra bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas méconnues, le requérant, célibataire, sans enfant, n'apportant aucune preuve qu'il serait isolé dans son pays d'origine et ne démontrant aucune intégration sociale ou professionnelle ni ses conditions d'existence en France ;

- la décision d'éloignement ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la même convention car le requérant se borne à affirmer qu'il serait exposé à des dangers et traitements inhumains, sans étayer son propos ni le justifier par des éléments probants ;

- les obligations de présentation ont été prises sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le requérant ne démontre pas en quoi il ne peut les exécuter ;

- la décision de refus de séjour, en outre, n'a pas violé le secret médical et le droit d'être entendu dans le cas d'une décision d'éloignement n'a pas en l'espèce été méconnu ;

Vu la lettre en date du 4 juillet 2014 adressée aux parties par la Cour en vue de la communication d'un moyen d'ordre public et la réponse, enregistrée le 12 septembre 2014, faite par le préfet de la Côte-d'Or ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 23 octobre 2014, le rapport de Mme Gondouin, rapporteur ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant kosovar, relève appel du jugement du Tribunal administratif de Dijon du 4 février 2014 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 août 2013 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français en lui impartissant un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur la décision de refus de titre :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) " ;

3. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait des soins et qu'un défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé au vu de l'absence d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, pour refuser d'accorder le titre de séjour sollicité, le préfet de la Côte-d'Or s'est fondé sur le fait que, si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait en revanche bénéficier d'un traitement approprié au Kosovo et y poursuivre les soins dont il a besoin ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents produits par le préfet, que le Kosovo dispose de structures médicales susceptibles de traiter la majorité des pathologies, en particulier celles liées au stress post-traumatique ; que si M. B... fait valoir devant le juge qu'il souffre de troubles psychiatriques consécutifs à la guerre au Kosovo, il résulte des mêmes documents que cette maladie est prise en charge dans ce pays ; que M. B... n'établit pas que les séquelles qu'il conserve des évènements traumatisants qu'il allègue avoir vécus dans son pays d'origine seraient telles qu'aucun traitement approprié ne pourrait y être sérieusement envisagé ; qu'il n'établit pas davantage les risques encourus en cas de retour au Kosovo, du fait en particulier de menaces de la part de la famille de son ancienne compagne, qui constituent, selon lui, une circonstance humanitaire exceptionnelle justifiant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît ces dispositions ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que M. B... est arrivé en France en novembre 2010, à l'âge de 26 ans après avoir vécu la majeure partie de sa vie au Kosovo ; qu'il est célibataire, sans enfant, ne démontre pas avoir noué des liens affectifs, professionnels ou sociaux très intenses depuis son arrivée ni être dépourvu de tout lien dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté contesté énonce l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles il est fondé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas tenu compte de la situation personnelle du requérant ; que les moyens soulevés par M. B... tirés de ce que le préfet n'aurait pas pris en compte les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle doivent être écartés ;

Sur les autres décisions :

7. Considérant, en premier lieu, que les moyens tirés de ce que la décision obligeant le requérant à quitter le territoire serait illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et du fait de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention précitée doivent être écartés, compte tenu de ce qui précède ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que, d'une part, doit être également écarté le moyen, soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, tiré de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français ; que, d'autre part, si M. B... fait également valoir qu'il encourt des risques en cas de retour au Kosovo, il n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations relatives aux menaces de mort subies dans son pays d'origine, ainsi que l'ont d'ailleurs relevé tant l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides dans sa décision du 11 mai 2012 que la Cour nationale du droit d'asile dans sa décision du 20 décembre suivant ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que les conclusions dirigées contre les décisions par lesquelles le préfet a fixé les obligations que devait respecter M. B... dans l'attente de son départ sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et de mise à la charge de l'État des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2014 où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- Mme Gondouin, premier conseiller,

- Mme Samson Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2014.

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N° 14LY00640


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00640
Date de la décision : 13/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : FYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-11-13;14ly00640 ?
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