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16/12/2014 | FRANCE | N°14LY01182

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 16 décembre 2014, 14LY01182


Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2014, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303036-1303077 du tribunal administratif de Dijon du 17 mars 2014 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 23 octobre 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et les obligations à respecter avant s

on départ ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 23 octobre 2013 ...

Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2014, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303036-1303077 du tribunal administratif de Dijon du 17 mars 2014 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 23 octobre 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et les obligations à respecter avant son départ ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 23 octobre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour et, dans un délai de 48 heures, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler ;

4°) subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale afin d'évaluer la gravité de son état de santé ;

5°) de mettre une somme de 1 300 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que le préfet doit justifier de l'avis donné par le médecin de l'agence régionale de santé ; que le préfet n'établit pas qu'elle pourrait bénéficier de soins adaptés à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine ; que le refus de titre de séjour porte atteinte à sa vie privée et familiale dès lors qu'elle réside en France depuis cinq ans, a travaillé en France, est locataire de son logement et a de la famille proche en France, où elle est socialement intégrée ; que la cour pourra ordonner une expertise médicale ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et porte atteinte à sa vie privée et familiale ; que la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, où elle a subi des violences ; que la décision lui fixant des obligations avant son départ est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français et fixe des obligations disproportionnées au regard du but poursuivi ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 23 juin 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu le courrier du 22 octobre 2014 par lequel, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour a informé les parties qu'elle envisageait de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre la décision fixant à la requérante des obligations avant son départ, présentées pour la première fois en appel ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 octobre 2014, présenté par le préfet de la Côte-d'Or en réponse au moyen d'ordre public ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 octobre 2014, présenté pour Mme B...en réponse au moyen d'ordre public ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 octobre 2014, présenté par le préfet de la Côte-d'Or, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2014, et le mémoire en rectification d'erreur matérielle, enregistré le 20 novembre 2014, présentés pour MmeB..., qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;

1. Considérant que, par un jugement du 17 mars 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de MmeB..., ressortissante de la République Démocratique du Congo (RDC), tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 octobre 2013 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé les obligations à respecter avant son départ et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office ; que Mme B...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que Mme B...n'a pas présenté devant le tribunal administratif de Dijon de conclusions, ni de moyens, tendant à l'annulation de la décision fixant les obligations à respecter avant son départ ; que, dès lors, les conclusions tendant à l'annulation de cette décision, présentées pour la première fois en appel, doivent être rejetées comme étant irrecevables ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que le préfet n'est pas lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il lui appartient néanmoins, lorsque ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans le pays dont il est originaire, de justifier des éléments qui l'ont conduit à s'écarter de cet avis médical ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé a émis un avis le 17 septembre 2013 aux termes duquel l'état de santé de Mme B...nécessite des soins dont le défaut pourrait entrainer pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne peut bénéficier de soins dans son pays d'origine ; que le préfet de la Côte-d'Or a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B...en se fondant sur divers documents relatifs aux capacités de soins de la RDC, notamment la liste des médicaments disponibles dans le pays, les éléments transmis par le médecin référent auprès de l'ambassade de France à Kinshasa et la fiche établie par l'organisation internationale pour les migrations ; que les pièces produites par la requérante, notamment un certificat médical relatant ses déclarations et un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés, ne permettent pas d'établir que MmeB..., qui souffre de problèmes psychiatriques pour lesquels elle suit un traitement et d'une hépatite B inactive nécessitant un contrôle trois fois par an, ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que la circonstance que la requérante a été hospitalisée postérieurement à la décision attaquée, du 7 au 10 avril 2014, ne suffit pas, par elle-même, à entacher sa légalité ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 du même code doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., née en 1980 et entrée irrégulièrement en France en février 2009, ne résidait sur le territoire national que depuis quatre ans et demi à la date des décisions attaquées ; que ses deux enfants ainsi que sa mère vivent dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de MmeB..., et alors même que certains membres de sa famille résideraient en France et qu'elle a fourni des efforts en vue de son insertion professionnelle, les décisions attaquées par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ne portent pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que, dès lors elles ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, Mme B...n'est pas fondée à soulever, par voie d'exception, l'illégalité de décision du préfet de la Côte-d'Or refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'encontre des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

10. Considérant que Mme B...soutient qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, toutefois, elle ne produit aucun document de nature à établir la réalité des violences qu'elle prétend avoir subies dans son pays d'origine, ni l'actualité des risques qu'elle allègue encourir ; qu'au surplus, sa demande d'asile a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides et la cour nationale du droit d'asile le 29 mai 2009 et le 3 mars 2010 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaitrait les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fins d'injonction présentées par Mme Mme B...doivent être rejetées ;

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par Mme B...soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de la formation de jugement,

M. Chenevey, premier conseiller ;

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2014.

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N° 14LY01182

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : FYOT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 16/12/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14LY01182
Numéro NOR : CETATEXT000029918375 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-16;14ly01182 ?
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