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08/01/2015 | FRANCE | N°14LY01717

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 janvier 2015, 14LY01717


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour M. A... B..., élisant domicile ...;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306197 du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 29 juillet 2013 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme 1 500 euros à ve

rser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice a...

Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour M. A... B..., élisant domicile ...;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306197 du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 29 juillet 2013 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- la décision d'éloignement est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il n'a pas bénéficié du droit d'être entendu et de présenter ses observations préalablement à la décision d'éloignement ;

- le préfet a commis une erreur de droit en estimant que l'absence de ressources suffisait à elle seule à lui faire perdre son droit au séjour alors qu'il réside en France depuis moins de trois mois ;

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, il n'est pas justifié que son séjour serait constitutif d'un abus de droit, les dispositions du 2° de l'article L. 511-3-1 ne pouvant servir de fondement légal à son éloignement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 24 avril 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B... ;

Vu l'ordonnance du 8 octobre 2014 fixant la clôture d'instruction au 24 octobre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

En application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative, le rapporteur public a été dispensé d'exposer ses conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2014 le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

1. Considérant M. B..., ressortissant roumain, a fait l'objet, le 29 juillet 2013, de décisions par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination sur le fondement des dispositions des 1° et 2° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il relève appel du jugement du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

2. Considérant, en premier lieu, que les moyens exposés par M. B... tirés du défaut de motivation, de l'absence d'examen particulier de sa situation personnelle et de ce qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du principe général du droit de l'Union européenne ne diffèrent pas de ceux soulevés en première instance ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par adoption des motifs des premiers juges, ils doivent être écartés ;

3. Considérant, en second lieu, que d'une part, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; / 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3°. " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-4-1 dudit code : " Tant qu'ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale, les citoyens de l'Union européenne, les ressortissants d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ainsi que les membres de leur famille tels que définis aux 4° et 5° de l'article L. 121-1, ont le droit de séjourner en France pour une durée maximale de trois mois, sans autre condition ou formalité que celles prévues pour l'entrée sur le territoire français " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 121-4 du même code : "Les ressortissants qui remplissent les conditions mentionnées à l'article L. 121-1 doivent être munis de l'un des deux documents prévus pour l'entrée sur le territoire français par l'article R. 121-1. / L'assurance maladie mentionnée à l'article L. 121-1 doit couvrir les prestations prévues aux articles L. 321-1 et L. 331-2 du code de la sécurité sociale. / Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. / La charge pour le système d'assistance sociale que peut constituer le ressortissant mentionné à l'article L. 121-1 est évaluée en prenant notamment en compte le montant des prestations sociales non contributives qui lui ont été accordées, la durée de ses difficultés et de son séjour. / En cas de doute, le préfet peut, sans y procéder de façon systématique, vérifier que les conditions mentionnées aux articles L. 121-1, R. 121-6 et R. 121-7 sont satisfaites. / Les ressortissants mentionnés au premier alinéa de l'article L. 121-1 entrés en France pour y rechercher un emploi ne peuvent être éloignés pour un motif tiré de l'irrégularité de leur séjour tant qu'ils sont en mesure de faire la preuve qu'ils continuent à rechercher un emploi et qu'ils ont des chances réelles d'être engagés. " ;

6. Considérant que, d'autre part, aux termes de L. 511-3-1 dudit code : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : (...) 2° (...) que son séjour est constitutif d'un abus de droit. Constitue un abus de droit le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies. Constitue également un abus de droit le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d'assistance sociale (...) " ;

7. Considérant que pour obliger M. B...à quitter le territoire français, le préfet de la Haute-Savoie a invoqué le motif tiré de ce que son séjour est constitutif d'un abus de droit en raison du renouvellement de séjours inférieurs à trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire français sans avoir à remplir les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des procès-verbaux d'audition établis par les services de police et de gendarmerie, particulièrement ceux des 23 février 2011, 20 novembre 2011 et 29 juillet 2013, que M.B..., qui a fait l'objet de mesures d'éloignements les 11 août 2006, 4 juin et 28 août 2010, ainsi que les 23 février, 22 septembre et 21 novembre 2011, a déclaré être entré en France pour la première fois il y a 10 ans et effectuer depuis des allers et retours entre la Roumanie et la France, alors qu'il n'a jamais rempli les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois et qu'il n'ignorait pas qu'il n'avait pas le droit de séjourner au-delà de trois mois ; qu'en outre, si M. B...soutient qu'il vient fréquemment en France afin d'exercer la profession de ferrailleur, il ne produit aucun élément à l'appui de ses allégations, alors qu'il a déclaré dans le procès-verbal établi par la gendarmerie le 29 juillet 2013, comme d'ailleurs dans celui établi le 20 novembre 2011, vivre de la mendicité et être sans domicile fixe et qu'il a également déclaré, dans ce même procès-verbal du 29 juillet 2013, qu'il envisageait de demander l'aide médicale d'Etat ; que, dans ces conditions, M. B...doit être regardé comme renouvelant des séjours de moins de trois mois en France dans le but de se maintenir sur le territoire français alors que les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois n'étaient pas réunies ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient le requérant, son séjour en France est, pour ce motif, constitutif d'un abus de droit au sens du 2° de l'article L. 511-3-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet pouvait légalement, sur le fondement de ces dispositions, lui faire obligation de quitter le territoire français ; que, comme l'a jugé le Tribunal, en admettant même que le motif tiré de ce que M. B... n'entrait pas dans le cas prévu au 1° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il résulte de l'instruction, et notamment du mémoire en défense présenté en première instance, que le préfet de la Haute-Savoie aurait pris la même décision d'éloignement à l'encontre de l'intéressé s'il avait entendu se fonder uniquement sur le motif tiré de ce que son séjour est constitutif d'un abus de droit ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Segado et MmeC..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 8 janvier 2015.

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N° 14LY01717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01717
Date de la décision : 08/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-01-08;14ly01717 ?
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