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29/01/2015 | FRANCE | N°14LY01750

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2015, 14LY01750


Vu la requête, enregistrée le 5 juin 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ; le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306402 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 24 avril 2014, en tant qu'il annule sa décision du 22 octobre 2013 portant fixation du pays à destination duquel Mme B...C...A...est susceptible d'être renvoyée ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance de Mme A...;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a annulé sa décision fixant le pays de renvoi, dès

lors que les risques encourus en cas de retour en République Démocratique du Congo ne sont...

Vu la requête, enregistrée le 5 juin 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ; le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306402 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 24 avril 2014, en tant qu'il annule sa décision du 22 octobre 2013 portant fixation du pays à destination duquel Mme B...C...A...est susceptible d'être renvoyée ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance de Mme A...;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a annulé sa décision fixant le pays de renvoi, dès lors que les risques encourus en cas de retour en République Démocratique du Congo ne sont pas établis, alors que les déclarations de l'intéressée n'avaient convaincu ni l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), ni la cour nationale du droit d'asile (CNDA), qu'elle n'apporte pas de commencement de preuve de l'authenticité des documents qu'elle produit, pour la première fois devant le Tribunal, et que la décision en litige ne méconnaît pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- c'est à tort que le Tribunal, ayant retenu l'existence d'un risque dans le pays de renvoi, annule l'ensemble de la décision fixant le pays de renvoi, y compris en ce qu'elle prévoit un retour dans les autres pays dans lesquelles Mme A...serait légalement admissible ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 24 septembre 2014 fixant la clôture de l'instruction au 15 octobre 2014 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2014, produit pour Mme B...C...A...; Mme A...demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que c'est à juste titre que le Tribunal a annulé la décision fixant le pays de renvoi ; que la circonstance qu'elle n'ait produit certaines de ses preuves qu'à l'occasion de la contestation de l'arrêté litigieux n'ôte rien de leur authenticité, que le préfet n'établit pas l'absence d'authenticité, que la situation politique et les violences commises contre les opposants au régime congolais sont connus ; que l'authenticité des documents est établie, le préfet ne conteste pas sérieusement leur caractère probant ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 9 septembre 2014 accordant à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015 le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller ;

1. Considérant que, par arrêté du 22 octobre 2013, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de délivrer un titre de séjour à MmeA..., de nationalité congolaise, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être éloignée d'office ; que, par jugement du 25 avril 2014, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision fixant le pays de renvoi et rejeté le surplus des conclusions de Mme A...; que le préfet de la Haute-Savoie relève appel de ce jugement, en tant qu'il annule la décision désignant le pays de destination ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant que, pour annuler la décision fixant le pays de renvoi, les premiers juges ont retenu la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en se fondant sur l'attestation émanant du parti d'opposition UDPS, signée du secrétaire général du parti, ainsi que sur un avis de recherche du 2 février 2012 pour atteinte à la sécurité de l'Etat, document circonstancié qui comporte un cachet officiel, le nom, prénom et grade de l'officier de police signataire, et ont relevé que l'administration se bornait à contester l'authenticité de ces documents sans en apporter la preuve;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les documents en question pourraient être regardés comme étant, à l'évidence, dépourvus d'authenticité ; que, dans ces conditions, il appartient au préfet d'apporter devant le juge d'appel des éléments supplémentaires de nature à établir leur absence d'authenticité ; que le préfet se borne toutefois à reprendre ses arguments déjà développés devant le premier juge, tirés de la circonstance que les déclarations de Mme A...devant l'office français de protection des réfugiés et des apatrides ou devant la Cour nationale du droit d'asile n'avaient pas été regardées comme probantes et que ces documents ont été produits pour la première fois devant le Tribunal administratif à l'occasion de la contestation du refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que, cependant, ces circonstances ne suffisent pas, par elles-mêmes, à les priver d'authenticité ou de caractère probant ; qu'en se bornant, pour le surplus, à souligner qu'il s'agit de copies et que l'intéressée n'apporte aucun commencement de preuve de nature à établir l'authenticité de ces documents, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce que ces documents seraient dépourvus d'authenticité ; que les documents en question sont de nature à établir l'existence de risques en cas de retour de Mme A...en République Démocratique du Congo ; que, par suite, le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu que la décision fixant le pays de renvoi méconnaissait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, en revanche, que ce moyen justifiait seulement l'annulation partielle de cette décision, en tant qu'elle désigne le pays dont Mme A...a la nationalité comme pays de renvoi ; qu'il n'entachait pas d'illégalité la décision en tant qu'elle désignait les autres pays dans lesquels Mme A...établirait être légalement admissible en tant que pays de renvoi ; que, par suite, le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal s'est fondé sur ce moyen pour procéder à l'annulation totale de la décision fixant le pays de renvoi ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A...; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'appui duquel ne sont invoqués que des risques existant en République Démocratique du Congo, n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, en tant qu'elle concerne d'autres pays ; que, ses conclusions contre le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et, en tout état de cause, la décision fixant le pays de départ volontaire, ayant été rejetées par le Tribunal administratif de Grenoble, et Mme A...n'ayant pas relevé appel de ce rejet, elle n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination par voie de conséquence de l'annulation des autres décisions ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est seulement fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il annule la décision fixant le pays de destination en ce qu'elle désigne les pays, autres que la République Démocratique du Congo, dans lesquels Mme A...établirait être légalement admissible ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de Mme A...doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1306402 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 24 avril 2014 est annulé, en tant qu'il annule la décision du préfet de la Haute-Savoie du 22 octobre 2014 fixant le pays de renvoi de Mme B...C...A..., en ce qu'elle désigne les pays, autres que la République Démocratique du Congo, dans lesquels cette dernière établirait être légalement admissible.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de Mme B...C...A...tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B...C...A....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2015, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 janvier 2015.

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N° 14LY01750

N° 14LY01750


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : LANTHEAUME

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 29/01/2015
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14LY01750
Numéro NOR : CETATEXT000030171679 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-01-29;14ly01750 ?
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