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05/05/2015 | FRANCE | N°14LY02774

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 mai 2015, 14LY02774


Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2014, présentée par le préfet du Rhône, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1406468 du 25 août 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 20 août 2014 portant placement en rétention administrative de Mme D...épouseA..., renvoyé les conclusions de Mme D...épouse A...tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2014 par laquelle il a refusé de lui délivrer un titre de séjour devant une formation collégiale du tribunal administratif,

mis une somme de 400 euros à la charge de l'Etat en application des disposition...

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2014, présentée par le préfet du Rhône, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1406468 du 25 août 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 20 août 2014 portant placement en rétention administrative de Mme D...épouseA..., renvoyé les conclusions de Mme D...épouse A...tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2014 par laquelle il a refusé de lui délivrer un titre de séjour devant une formation collégiale du tribunal administratif, mis une somme de 400 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et rejeté le surplus des conclusions de Mme D...épouseA... ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D...épouseA... devant le tribunal administratif de Lyon ;

Il soutient que le placement de Mme D...épouse A...en rétention administrative était justifié en application des dispositions visées dans la décision du 20 août 2014 du 6° de l'article L. 551-1 du code de justice administrative et qu'elle pouvait être motivée de façon complémentaire par l'ensemble des éléments qui ont pu fonder son appréciation, en particulier les conditions précaires du séjour de l'intéressée et son comportement délictueux ; que l'arrêté du 24 mars 2014 a été notifié régulièrement à l'intéressée ; que le tribunal administratif a omis l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 mars 2015, présenté pour Mme B...D...épouseA..., élisant domicile..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle fait valoir que le jugement est fondé ; que sa demande devant le tribunal administratif était fondée ;

Vu la décision du 5 novembre 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme D...épouse A...;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2015 :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;

1. Considérant que, par un jugement du 25 août 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 20 août 2014 par laquelle le préfet du Rhône a décidé le placement en rétention administrative de Mme D...épouseA..., renvoyé les conclusions de Mme D...épouse A...tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2014 par laquelle il a refusé de lui délivrer un titre de séjour devant une formation collégiale du tribunal administratif, mis une somme de 400 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et rejeté le surplus des conclusions de Mme D...épouseA... ; que le préfet du Rhône relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que n'est pas recevable l'appel dirigé par le défendeur en premier ressort contre le jugement qui a rejeté les conclusions du demandeur ;

3. Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a renvoyé devant une formation collégiale du tribunal les conclusions de Mme D...épouse A...dirigées contre le refus de titre de séjour que lui a opposé le préfet du Rhône par une décision du 24 mars 2014 et a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ; que, dès lors, les conclusions du préfet ne sont recevables qu'en tant qu'elles sont dirigées contre les articles 3 et 4 du jugement attaqué annulant la décision de placement en rétention administrative et mettant une somme de 400 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; qu'aux termes de l'article L 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ; qu'aux termes de l'article L. 561-1 du même code : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, par dérogation à l'article L. 551-1, dans les cas suivants : 1° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai ou si le délai de départ volontaire qui lui a été accordé est expiré (...) ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ; qu'en vertu des dispositions du 3 du II de l'article L. 511-1 du même code, le risque que l'étranger se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français " est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. " ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions qui précèdent qu'une mesure de placement en rétention administrative ne peut être ordonnée que si l'étranger concerné ne présente pas des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français ; que ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas visés au 3 du II de cet article ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été prise au motif que l'intéressée ne justifie ni de circonstances exceptionnelles, ni de garanties de représentations effectives dès lors qu'elle ne peut établir la réalité de ses moyens d'existence ; qu'ainsi que l'a jugé le premier juge, en fondant sa décision sur un tel motif le préfet du Rhône a entaché sa décision d'une erreur de droit dès lors que les dispositions combinées des articles L. 551-1 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'imposent pas, pour justifier de ses garanties de représentation, que l'étranger doive établir disposer de moyens d'existence suffisants ;

7. Considérant, toutefois, que Mme D...épouse A...a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant, le 24 mars 2014, et pour laquelle le délai pour quitter le territoire était expiré à la date de la décision en litige décidant son placement en rétention administrative ; qu'il résulte de l'instruction que le préfet du Rhône aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, visé par la décision en litige, pour estimer que l'intéressée ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et décider son placement en rétention administrative ; que, dès lors, le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 20 août 2014 ;

8. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme D...épouse A...devant le tribunal administratif ;

9. Considérant que la décision en litige a été signée par M.C..., bénéficiaire d'une délégation de signature à cet effet par arrêté du préfet du Rhône du 14 janvier 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, par suite, le moyen tiré d'une incompétence de l'auteur de cette décision doit être écarté comme manquant en fait ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision de placement est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger ou, le cas échéant, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention (...) " ;

11. Considérant qu'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose que l'intéressé soit mis à même de présenter des observations avant son placement en rétention ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le droit d'être entendu de Mme D... épouse A...n'aurait pas été respecté doit être écarté ;

12. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et des mentions de la décision en litige que le préfet de du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme D...épouseA... ;

13. Considérant que la décision plaçant Mme D...épouse A...en rétention administrative est régulièrement motivée en droit par le visa de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en fait par la mention de l'obligation de quitter le territoire français prise le 24 mars 2014 à l'encontre de l'intéressée, et par la circonstance que celle-ci ne peut bénéficier d'une assignation à résidence, compte tenu du fait qu'il existe un risque qu'elle se soustraie à la mesure d'éloignement ;

14. Considérant que bien que Mme D...épouse A...soit titulaire d'un passeport en cours de validité, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée s'est soustraite à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire qui avait été prise à son encontre le 24 mars 2014, a reconnu ne pas être logée à l'adresse qu'elle avait indiquée à l'administration et a déclaré au cours de son audition tenue le 19 août 2014 qu'elle n'entendait pas retourner dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, Mme D...épouse A...ne présentait pas les garanties de représentation permettant l'exécution de la mesure d'éloignement, alors même qu'elle se serait présentée au sein des services de police pour être entendue et leur a remis son passeport ; que par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 20 août 2014 ;

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par Mme D...épouse A...soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;

DECIDE :

Article 1er : Les conclusions de la requête dirigées contre les articles 2 et 5 du jugement n° 1406468 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 25 août 2014 sont rejetées.

Article 2 : Le jugement n° 1406468 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 25 août 2014 est annulé en tant qu'il annule la décision du préfet du Rhône du 20 août 2014.

Article 3 : Les conclusions de la demande de Mme D...épouse A...devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône du 20 août 2014 sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par Mme D...épouse A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Rhône, à Mme B...D...épouse A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2015, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 mai 2015.

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N° 14LY02774

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02774
Date de la décision : 05/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-05-05;14ly02774 ?
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