La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/07/2015 | FRANCE | N°14LY03559

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 30 juillet 2015, 14LY03559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...et Mme A...B...épouse C...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 6 novembre 2014 par lesquels le préfet de l'Isère a décidé de les remettre aux autorités polonaises et les a assignés à résidence.

Par un jugement n° 1406736-1406737 du 13 novembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ces arrêtés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2014, le

préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...et Mme A...B...épouse C...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 6 novembre 2014 par lesquels le préfet de l'Isère a décidé de les remettre aux autorités polonaises et les a assignés à résidence.

Par un jugement n° 1406736-1406737 du 13 novembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ces arrêtés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2014, le préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 13 novembre 2014 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. C...et Mme B...devant le tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que M. C...et Mme B...épouse C...ont été informés conformément aux dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013.

La requête a été communiquée à M. C...et Mme B...épouseC..., qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vaccaro-Planchet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C...et Mme B...épouseC..., ressortissants russes, sont entrés en France au mois de septembre 2014 ; qu'ils ont déposé, le 30 septembre 2014, une demande d'asile auprès des services préfectoraux ; que le 28 octobre 2014 le préfet de l'Isère a pris à leur encontre deux arrêtés portant refus d'admission au séjour au titre de l'asile et les a informés que les autorités polonaises étaient saisies d'une demande de reprise en charge dans le cadre du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que le 6 novembre 2014 le préfet de l'Isère a adopté deux arrêtés à l'encontre de M. et Mme C... portant remise aux autorités polonaises ainsi que deux autres arrêtés les assignant à résidence ; que, par un jugement du 13 novembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé à la demande de M. C...et de Mme B...ces arrêtés du 6 novembre 2014 ; que le préfet de l'Isère relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;/e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. /Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5.FR 29.6.2013 Journal officiel de l'Union européenne L. 180/37/3. La commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " (...) 2. une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur (...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;

3. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie ; que la délivrance par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constituant pour le demandeur d'asile une garantie, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi du moyen tiré de l'omission ou de l'insuffisance d'une telle information à l'appui de conclusions dirigées contre un refus d'admission au séjour ou une décision de remise, d'apprécier si l'intéressé a été, en l'espèce, privé de cette garantie ou, à défaut, si cette irrégularité a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'administration a satisfait à l'obligation qui lui incombe en application des dispositions précitées ; que, dans un premier temps, seul le préfet est en mesure d'apporter les éléments relatifs à la délivrance d'une information écrite au demandeur ;

5. Considérant que le préfet de l'Isère soutient que la brochure intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile " a été remise à M. C...et Mme B...épouse C...par l'association " La Relève " avant l'introduction de leurs demandes et que la brochure intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce-que cela signifie ' " leur a été remise le 7 novembre 2014 ; que, toutefois, seule la remise des deux brochures, qui constituent la brochure commune prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 susvisé, figurant en annexe au règlement du 30 janvier 2014 susvisé, permet aux demandeurs d'asile de bénéficier d'une information complète sur l'application du règlement du 26 juin 2013 ; qu'alors au demeurant que le préfet de l'Isère n'établit pas avoir délivré aux intéressés la première de ces deux brochures, la seconde leur a été remise postérieurement à la décision de refus d'admission provisoire au séjour ; que de ce fait, des informations écrites essentielles à la compréhension de leur situation et à l'exercice de leurs droits n'ont pas été portées à la connaissance de M. C...et Mme B...épouse C...alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient bénéficié par ailleurs de telles informations ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, cette omission a été de nature à priver effectivement les intéressés de la garantie prévue par les dispositions précitées ; que, par suite, les arrêtés ordonnant leur remise aux autorités polonaises sont intervenus au terme d'une procédure irrégulière et sont, pour ce motif, entachés d'illégalité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés en litige ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de l'Isère, à M. D...C..., à Mme A... B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2015, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 juillet 2015.

''

''

''

''

2

N° 14LY03559

mg


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 30/07/2015
Date de l'import : 13/08/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14LY03559
Numéro NOR : CETATEXT000030982935 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-07-30;14ly03559 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award