La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2015 | FRANCE | N°14LY03581

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 septembre 2015, 14LY03581


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon :

- d'annuler l'arrêté en date du 5 juin 2014 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours, et a fixé Madagascar, pays dont elle a la nationalité, comme pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office ;

- d'enjoindre au préfet de l

'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 150 euros par jour de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon :

- d'annuler l'arrêté en date du 5 juin 2014 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours, et a fixé Madagascar, pays dont elle a la nationalité, comme pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office ;

- d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant le jugement à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice ;

Par un jugement n° 1402353 en date du 13 octobre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ainsi que les conclusions du préfet de l'Yonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 novembre 2014 et le 24 février 2015, Mme D...B..., représentée par MeE..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 13 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 5 juin 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de 15 jours suivant notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois suivant notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le refus de titre de séjour ne méconnaissait pas les articles L. 211-2-1 et L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car l'existence d'une vie commune de six mois est établie, le couple justifiant d'une vie commune d'au moins deux ans et étant marié depuis six mois à la date de l'arrêté litigieux ; la circonstance qu'elle s'est prévalue du nom de son ancien époux en 2012 est sans incidence sur la preuve d'une communauté de vie ;

- la rédaction du 5ème considérant ne permet pas d'établir si les premiers juges ont statué ou non sur l'erreur de fait invoquée ;

- l'illégalité du refus de titre de séjour entraîne l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et désignation du pays de renvoi ; c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de l'exception d'illégalité de ces décisions ;

Par un mémoire enregistré le 6 février 2015, le préfet de l'Yonne, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre la somme de 500 euros à la charge de Mme B...au titre des frais non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas entaché d'omission à statuer ;

- les premiers juges ont correctement apprécié les faits de l'espèce ; les pièces produites ne permettent pas de tenir pour établie une vie commune de plus de six mois ;

- c'est à juste titre que l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour n'a pas été retenue ; l'appelante s'est prévalue du nom de son ancien époux en 2012 ;

Par ordonnance du 26 février 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 13 mars 2015.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Vu les autres pièces du dossier ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 août 2015 le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme D...B...néeC..., ressortissante malgache, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 5 juin 2014 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sous 30 jours et désignation du pays de renvoi ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ;

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes des quatrième et sixième alinéas de l'article L. 211-2-1 du même code : " Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ; que ces dispositions législatives ouvrent la possibilité à un étranger qui est entré régulièrement en France et qui a épousé en France un ressortissant français de présenter au préfet une demande de visa de long séjour, sans avoir à retourner à cette fin dans son pays d'origine, à condition d'avoir séjourné en France plus de six mois avec son conjoint ; qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions, éclairées au surplus par les travaux préparatoires, que la durée de six mois de vie commune avec le conjoint français qu'elles exigent s'apprécie quelle que soit la date du mariage ;

3. Considérant que le refus de titre opposé à la requérante, entrée régulièrement sur le territoire français le 8 octobre 2008 et mariée à M.B..., ressortissant français, depuis le 7 décembre 2013, est motivé par le fait que son " mariage récent " ne lui permet pas de voir sa situation administrative régularisée au titre de l'article L. 211-2-1 alinéa 6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...justifie, par des documents suffisamment probants, d'une vie commune avec son conjoint de plus de six mois, à la date de l'acte en litige ; que la circonstance qu'elle se soit prévalue de son précédent nom d'épouse, invoquée par le préfet, est sans incidence sur l'existence de cette communauté de vie ; que, dans ces conditions, en estimant qu'elle ne relevait pas des dispositions du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Yonne a entaché le refus de titre de séjour litigieux d'une erreur d'appréciation ; que, dès lors, Mme B...est fondée, à invoquer, au titre de l'exception, l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du délai de départ volontaire et désignation du pays de renvoi ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant que, si le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Yonne délivre une carte de séjour temporaire à MmeB..., il y a lieu, en revanche, de prescrire au préfet de se prononcer à nouveau sur sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

7. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions du préfet de l'Yonne doivent être rejetées ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1402353 du tribunal administratif de Dijon du 13 octobre 2014 et l'arrêté du préfet de l'Yonne du 5 juin 2014 portant refus de titre de séjour à MmeB..., obligation de quitter le territoire français sous 30 jours et désignation du pays de renvoi, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Yonne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme D...B...dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa demande de régularisation dans le délai de deux mois, suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 200 euros à MmeB....

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera donnée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 27 août 2015, où siégeaient :

- M. Mesmin d'Estienne, président,

- Mme Gondouin, premier conseiller,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2015.

''

''

''

''

N° 14LY00768

N° 14LY03581 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03581
Date de la décision : 17/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : DUFAY-SUISSA-CORNELOUP-WERTHE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-17;14ly03581 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award