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28/01/2016 | FRANCE | N°14LY02687

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 14LY02687


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 4 juillet 2014, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant un délai de départ volontaire, désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui interdisant le retour sur le territoire français durant deux ans, ainsi que l'arrêté l'assignant à résidence à compter du 31 juillet 2014 à quatorze heures.
>Par un jugement n° 1404729-1404731 du 2 août 2014, le magistrat désigné du tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 4 juillet 2014, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant un délai de départ volontaire, désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui interdisant le retour sur le territoire français durant deux ans, ainsi que l'arrêté l'assignant à résidence à compter du 31 juillet 2014 à quatorze heures.

Par un jugement n° 1404729-1404731 du 2 août 2014, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, désignation du pays de renvoi, interdiction de retour sur le territoire français et assignation à résidence et renvoyé en formation collégiale celles dirigées contre le refus de titre de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 août 2014 et des mémoires complémentaires enregistrés les 20 octobre 2014 et 11 décembre 2015, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 août 2014 en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, désignation du pays de renvoi, interdiction de retour sur le territoire français durant deux ans et assignation à résidence ;

2°) d'annuler ces décisions pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation administrative, et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour qui ne fait pas référence à la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 et méconnaît les lignes directrices du paragraphe 2-1-1 de cette circulaire concernant les parents d'enfants scolarisés ;

- elle méconnaît, comme le refus de titre de séjour, les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît, comme le refus de titre de séjour, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, de même que le refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'absence de date sur l'arrêté d'assignation à résidence rend impossible la vérification de la compétence du signataire de cette décision à la date de son édiction.

La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 27 novembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 18 décembre 2015.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 octobre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Meillier.

1. Considérant que M.B..., ressortissant macédonien né le 15 septembre 1976, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 11 septembre 2011, selon ses déclarations ; qu'il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 novembre 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 7 mai 2012 ; qu'il a ensuite sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 10 mai 2013, confirmé par la cour de céans, l'autorité préfectorale lui a refusé le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que le 23 juin 2014, M. B... a à nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le même fondement ; que, par arrêté du 4 juillet 2014, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné la République de Macédoine comme pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français durant deux ans ; qu'en vue de l'exécution de cette dernière mesure d'éloignement, l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté l'assignant à résidence à compter du 31 juillet 2014 ; que M. B...a contesté ces arrêtés devant le tribunal administratif de Grenoble ; que par jugement du 2 août 2014, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble, après avoir renvoyé en formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision de refus de titre de séjour, a rejeté les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2014, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, interdiction de retour sur ce territoire et fixation du pays de destination, ainsi que de l'arrêté l'assignant à résidence à compter du 31 juillet 2014 ; que M. B...relève appel de ce jugement ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir des énonciations du paragraphe 2.1.1 de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, qui portent sur la régularisation, à titre gracieux et exceptionnel, d'étrangers en situation irrégulière, parents d'enfants scolarisés ; que, par suite, les moyens tirés, d'une part, de l'erreur de droit entachant le refus de titre de séjour du fait de l'absence de référence aux énonciations de cette circulaire et, d'autre part, de la méconnaissance des critères énoncés par ladite circulaire sont inopérants ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que M. B...est entré irrégulièrement en France à l'âge de trente quatre ans, moins de trois ans avant l'arrêté en litige, après avoir passé la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, où résident notamment ses parents ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français malgré une première mesure d'éloignement prise à son encontre le 10 mai 2013, confirmée par la cour de céans ; que son épouse, de même nationalité que lui, fait également l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, si trois des quatre enfants de M. B..., nés respectivement en 2001, 2002 et 2006, sont régulièrement scolarisés en France, dont l'une dans une classe spécialisée du fait de sa surdité profonde, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette scolarité ne pourrait pas se poursuivre hors de France et notamment en République de Macédoine, y compris s'agissant de l'enfant atteinte d'un handicap et appareillée en France ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; que le préfet de l'Isère n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

6. Considérant que si l'une des enfants du requérant, atteinte de surdité profonde et rencontrant de grandes difficultés en matière d'apprentissage, nécessite une scolarisation dans un milieu adapté, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une prise en charge effective et appropriée serait impossible dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors que rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France et notamment en République de Macédoine, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de cette enfant et n'a, dès lors, pas violé les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en prenant la décision contestée ;

7. Considérant, en dernier lieu, que pour les motifs énoncés ci-avant, en refusant de délivrer un titre de séjour à M.B..., le préfet de l'Isère n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

En ce qui concerne les autres moyens :

8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 6 ci-avant et en l'absence de circonstance particulière, en faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français, le préfet de l'Isère n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle et familiale du requérant ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

10. Considérant qu'en se bornant à faire état, de façon générale, des brutalités policières dont les personnes d'origine rom font l'objet en Macédoine, M. B...ne justifie pas être personnellement exposé à des risques réels et graves en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'au surplus, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Sur la décision d'assignation à résidence :

11. Considérant que M. Patrick Lapouze, secrétaire général de la préfecture de l'Isère, signataire de l'arrêté en litige, bénéficiait, par arrêté du 17 avril 2014, régulièrement publié le même mois au recueil des actes administratifs de la préfecture, d'une délégation de signature permanente du préfet de l'Isère l'autorisant à signer ce type de décision ; que la décision par laquelle M. B...a été assigné à résidence à compter du 31 juillet 2014, aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 4 juillet 2014, a nécessairement été signée entre ces deux dates ; que, dès lors, elle a été édictée alors que la délégation permanente de signature susmentionnée était en vigueur ; qu'ainsi, la circonstance que la décision d'assignation à résidence n'est pas datée n'est pas de nature à remettre en cause la compétence du signataire de cette décision ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 janvier 2016.

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N° 14LY02687


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02687
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Restrictions apportées au séjour - Assignation à résidence.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-01-28;14ly02687 ?
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