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09/02/2017 | FRANCE | N°15LY01587

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 09 février 2017, 15LY01587


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) Auvergne a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler :

- la décision du 23 janvier 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a rejeté sa demande d'autorisation de transfert de Mme B...à l'agence régionale de santé Auvergne ;

- la décision implicite de l'inspecteur du travail, née le 25 novembre 2012, de rejet de sa demande d'autorisation de transfert de Mme B...à l'agence régionale de santé Auvergne, ense

mble celle du ministre née le 23 mai 2013 à la suite du recours hiérarchique qu'elle a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) Auvergne a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler :

- la décision du 23 janvier 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a rejeté sa demande d'autorisation de transfert de Mme B...à l'agence régionale de santé Auvergne ;

- la décision implicite de l'inspecteur du travail, née le 25 novembre 2012, de rejet de sa demande d'autorisation de transfert de Mme B...à l'agence régionale de santé Auvergne, ensemble celle du ministre née le 23 mai 2013 à la suite du recours hiérarchique qu'elle a exercé ;

- la lettre du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 14 août 2013 lui communiquant les motifs de rejet de sa décision implicite née le 24 mai 2013.

Par un jugement nos 1400741, 1301115, 1301581 du 10 mars 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision implicite du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social née le 24 mai 2013 et rejeté le surplus des conclusions des demandes de la CARSAT Auvergne.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2015, présentée pour Mme C..., domiciliée..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement nos 1400741, 1301115, 1301581 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 10 mars 2015 en tant qu'il a annulé la décision implicite du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social née le 24 mai 2013 ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de la CARSAT Auvergne tendant à l'annulation de la décision ministérielle susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de la CARSAT Auvergne la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande présentée par la CARSAT, enregistrée au greffe du tribunal le 10 octobre 2013, contre une décision prétendument implicite de rejet du recours hiérarchique exercé devant le ministre du Travail et qui serait intervenue 24 mai 2013, devait être rejetée comme irrecevable pour tardiveté ; les premiers juges auraient dû considérer que le recours hiérarchique de la CARSAT n'avait en réalité pas été exercé contre la décision explicite de l'inspecteur du travail du 23 janvier 2013 notifiée à la CARSAT le 24 janvier 2013, qui est une décision devenue définitive, de sorte que ni le recours hiérarchique, ni le recours contentieux tendant même à son annulation n'aurait dû être déclaré recevable ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, elle bénéficiait, en sa qualité de conseil du salarié, dont elle exerçait les fonctions à la date du 23 janvier 2013, d'une protection spéciale contre le licenciement, qui peut durer 12 mois après le terme de son mandat, de sorte que l'inspecteur du travail et le ministre étaient compétents pour prendre les décisions en litige.

Par un mémoire, enregistré le 9 juillet 2015, présenté pour la CARSAT Auvergne, elle conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat et de Mme B... de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande d'autorisation était devenue sans objet à la date des décisions en litige, dès lors que Mme B... n'exerçait plus aucun mandat depuis les élections du 21 octobre 2010 ;

- la requérante, qui prétend, sans le prouver, avoir été conseiller du salarié jusqu'au 23 janvier 2013, ce dont n'avait pas connaissance son employeur, ne vise aucune disposition du code du travail prévoyant la nécessité de demander une autorisation de transfert à l'inspection du travail, pour un salarié conseiller, et se fonde sur l'article L. 2411-3 du code du travail qui vise non pas le transfert d'un salarié protégé, mais le licenciement d'un délégué syndical ;

- dès lors que lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, la décision prise sur recours administratif confirme la décision initiale et que le recours administratif était facultatif, il n'y a pas substitution de la décision prise sur recours administratif à la décision administrative initiale, un recours contentieux pouvant donc être formé contre l'une, l'autre ou les deux décisions administratives, elle pouvait parfaitement exercer un recours contre les décisions du ministre.

Par un mémoire, enregistré le 2 septembre 2015, présenté pour Mme B..., elle maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens.

Par un mémoire, enregistré le 9 novembre 2015, présenté pour la CARSAT Auvergne, elle conclut à ce qu'il soit constaté que la procédure d'appel est devenue sans objet dès lors que Mme B... fait valoir ses droits à la retraite à partir du 1er février 2016.

Par un mémoire, enregistré le 14 décembre 2015, présenté pour Mme B..., elle maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et soutient, en outre, que sa requête d'appel n'est pas devenue sans objet dès lors qu'elle conserve jusqu'à son départ à la retraite sa qualité de salarié.

Par un mémoire, enregistré le 13 janvier 2016, présenté pour la CARSAT Auvergne, elle maintient ses conclusions pour les mêmes motifs, et soutient, en outre, que le maintien de la procédure est abusif et conclut à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 28 janvier 2016, présenté pour Mme B..., elle maintient ses conclusions et soutient que la procédure ne présente aucun caractère abusif, dès lors que les questions juridiques posées méritent réponse de la cour, même postérieurement au 1er février 2016.

Un mémoire, enregistré le 10 janvier 2017, a été présenté pour la CARSAT Auvergne.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 19 janvier 2017 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Tournaire, avocat de la CARSAT Auvergne ;

1. Considérant que Mme B..., salariée depuis 1979 de la caisse régionale d'assurance maladie (CRAM) d'Auvergne, devenue la CARSAT (caisse d'assurance retraite et de la santé au travail) Auvergne, y occupait des fonctions de chargée de mission de santé publique au sein du département des affaires sanitaires de cette caisse ; qu'après les élections professionnelles du 12 juin 2008, elle a exercé des mandats de représentant suppléant du personnel au comité d'entreprise et de délégué du personnel titulaire jusqu'en octobre 2010, et a également été désignée conseiller du salarié à partir du 15 juillet 2009, fonction qu'elle indique avoir exercée jusqu'au 17 février 2013 ; que la CARSAT Auvergne, estimant qu'à raison des activités professionnelles qu'elle exerçait, Mme B... devait, en application des dispositions de l'article 129 de la loi du 21 juillet 2009 susvisée portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, être transférée vers l'agence régionale de santé Auvergne, a sollicité de l'inspection du travail, en 2010, l'autorisation de procéder à un tel transfert ; que par une décision implicite du 3 avril 2010, confirmée explicitement le 6 mai 2010, l'inspecteur du travail a rejeté cette demande ; que le recours hiérarchique formé par la caisse a été rejeté par une décision du ministre du travail du 14 octobre 2010 ; que ces décisions ont été annulées par un jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 18 septembre 2012, qui a enjoint à l'administration de procéder au réexamen de la demande d'autorisation de transfert dans le délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ; que l'inspecteur du travail, à nouveau saisi de cette demande par l'effet du jugement du 18 septembre 2012, l'a rejetée par une décision implicite, née le 25 novembre 2012 du silence gardé puis, par une décision expresse du 23 janvier 2013 ; que par une décision implicite, née le 24 mai 2013 du silence gardé, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté le recours hiérarchique formé par la CARSAT Auvergne ; que ledit ministre, suite à une demande en ce sens, a communiqué les motifs de sa décision, par une lettre du 14 août 2013 ; que la CARSAT Auvergne a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand de demandes tendant à l'annulation de ces décisions ; que Mme B... fait appel du jugement du 10 mars 2015 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision implicite, née le 24 mai 2013, par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté le recours hiérarchique formé par la CARSAT Auvergne ;

Sur les conclusions aux fins de non-lieu de la CARSAT:

2. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que Mme B... a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er février 2016, cette circonstance n'est pas de nature à priver d'objet l'appel qu'elle a formé contre le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand annulant la décision sus-évoquée du 24 mai 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

Sur la recevabilité des conclusions de la demande de la CARSAT tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 24 mai 2013 :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la CARSAT Auvergne a formé, le 17 janvier 2013, un recours hiérarchique contre le rejet implicite né le 25 novembre 2012 du silence gardé par l'inspecteur sur la nouvelle demande d'autorisation de transfert de Mme B... et que ce recours hiérarchique a été rejeté implicitement le 24 mai 2013, au terme d'un délai de quatre mois qui avait couru à compter de sa réception, le 24 janvier 2013 ; qu'elle a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, le 19 juillet 2013, d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite née le 25 novembre 2012 et de celle du ministre, née le 23 mai 2013, rejetant son recours hiérarchique ; qu'ainsi le recours hiérarchique formé par la CARSAT Auvergne a été formé dans le délai de recours de deux mois à compter de la date de naissance de la décision implicite de l'inspecteur du travail, et le recours contentieux tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique l'a été également dans le délai de deux mois à compter de la date de naissance de cette décision ; que, par suite, contrairement à ce que soutient Mme B..., la demande de la CARSAT Auvergne tendant à l'annulation de cette décision ministérielle n'était pas tardive ;

Sur la légalité de la décision ministérielle du 24 mai 2013 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2414-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu'il est investi de l'un des mandats suivants : /1° Délégué syndical et ancien délégué syndical (...)/ 2° Délégué du personnel ; / 3° Membre élu du comité d'entreprise ; / 4° Représentant syndical au comité d'entreprise ; / 5° Membre du groupe spécial de négociation et membre du comité d'entreprise européen ; / 6° Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société européenne ; / 6° bis Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société coopérative européenne ; / 6° ter Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société issue de la fusion transfrontalière ; / 7° Représentant du personnel ou ancien représentant au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; /8° Représentant du personnel d'une entreprise extérieure, désigné au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail d'un établissement comprenant au moins une installation classée figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8 du code de l'environnement ou mentionnée à l' article L. 211-2 du code minier ; / 9° Membre d'une commission paritaire d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail en agriculture prévue à l'article L. 717-7 du code rural et de la pêche maritime ; / 10° Représentant des salariés dans une chambre d'agriculture mentionné à l'article L. 515-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 11° Salarié mandaté dans les conditions prévues à l'article L. 2232-24, dès que l'employeur a connaissance de l'imminence de sa désignation, ou ancien salarié mandaté, durant les douze mois suivant la date à laquelle son mandat a pris fin. (...) " ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est au demeurant pas allégué, qu'à la date de la décision ministérielle en litige, Mme B... était investie de l'un des mandats visés par les dispositions précitées de l'article L. 2414-1 du code du travail qui soumettent le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement à une autorisation de l'inspecteur du travail, et au titre desquels ne figure pas le mandat de conseiller du salarié inscrit sur une liste dressée par l'autorité administrative et chargé d'assister les salariés convoqués par leur employeur en vue d'un licenciement ; que, dès lors que la décision en litige concerne une demande d'autorisation de transfert d'un salarié et non de licenciement, Mme B..., à supposer même établie la circonstance qu'elle aurait exercé une telle fonction à la date de la décision en litige, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du code du travail relatives à la protection contre le licenciement dont bénéficie le conseiller du salarié ; que, dès lors, le ministre n'était pas compétent pour statuer sur la demande d'autorisation de transfert de Mme B... présentée par la CARSAT Auvergne ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision implicite du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social née le 24 mai 2013 ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la CARSAT Auvergne, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés à l'occasion du présent litige par Mme B... et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre de ces mêmes dispositions ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera la somme de 2 000 euros à la CARSAT Auvergne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la CARSAT Auvergne est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) Auvergne et au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2017 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 février 2017.

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N° 15LY01587


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01587
Date de la décision : 09/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-075 Travail et emploi. Transferts.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BORIE et ASSOCIES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-02-09;15ly01587 ?
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