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14/03/2017 | FRANCE | N°15LY04006

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 mars 2017, 15LY04006


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2015 et un mémoire enregistré le 22 mars 2016 qui n'a pas été communiqué, la société CSF demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale délivré par le maire de la commune de Saint-André-de-Corcy à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires le 27 octobre 2015 ;

2°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :


- la procédure d'instruction est irrégulière dès lors que le dossier de demande de permis de c...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2015 et un mémoire enregistré le 22 mars 2016 qui n'a pas été communiqué, la société CSF demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale délivré par le maire de la commune de Saint-André-de-Corcy à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires le 27 octobre 2015 ;

2°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'instruction est irrégulière dès lors que le dossier de demande de permis de construire n'était pas complet lors de son dépôt, la demande d'autorisation d'exploitation commerciale n'ayant été enregistrée que le 7 avril 2015 ;

- il ne ressort pas de la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial que ses membres auraient été convoqués conformément aux dispositions du code de commerce ;

- le projet n'est pas compatible avec le SCOT de la Dombes, qui ne confère pas une destination commerciale à la zone d'activités de la Sûre ;

- le projet va entrainer une dégradation des conditions de circulation du fait de l'afflux de véhicules supplémentaires et l'accessibilité en voiture au futur centre commercial ne sera pas satisfaisante ;

- le projet accroît l'imperméabilisation des sols ;

- la performance énergétique poursuivie par le projet est insuffisante ;

- compte tenu de sa localisation en marge du centre ville cet ensemble commercial ne participera pas à la revitalisation du tissu commercial ;

- le site du projet est soumis à un risque technologique majeur, une usine classée Seveso II étant située à 1,2 km et une société de stockage d'engrais classée Seveso étant située à quelques mètres.

Par un mémoire enregistré le 25 février 2016, la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la société CSF au tire de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 26 février 2016, la commune de Saint-André-de-Corcy conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société CSF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la Commission nationale d'aménagement commercial qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 29 février 2016, la clôture de l'instruction, initialement fixée au 2 mars 2016, a été reportée au 22 mars 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;

- la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;

- le décret n° 2015-165 du 12 février 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires, ainsi que celles de Me A...pour la commune de Saint-André-de-Corcy.

1. Considérant que la société CSF demande l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le maire de la commune de Saint-André-de-Corcy a délivré à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale pour la réalisation d'un ensemble commercial présentant une surface de vente totale de 2 475,10 m² ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire de la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires, qui a été déposée le 14 janvier 2015, était en cours d'instruction le 15 février 2015 ; qu'à cette date, en application de l'article 6 du décret du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial, sont entrées en vigueur, d'une part, les dispositions de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises en vertu desquelles le permis de construire tient lieu d'autorisation d'aménagement commercial dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial et, d'autre part, celles de ce décret du 12 février 2015 en vertu desquelles les autorisations d'exploitation commerciale valent avis favorable de la Commission d'aménagement commercial pour les demandes de permis de construire en cours d'instruction à sa date d'entrée en vigueur ; que, dès lors, la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial vaut en l'espèce avis favorable et la procédure d'instruction a été régulièrement conduite ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. / Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. " ;

4. Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe, que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant de la convocation régulière de ses membres ; qu'ainsi, le moyen tiré à cet égard de l'irrégularité de la décision attaquée au regard des dispositions de l'article R. 752-35 du code de commerce doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I. L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. " ;

6. Considérant qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci, avec lesquels les autorisations délivrées par les commissions d'aménagement commercial doivent être compatibles en vertu de ce même article, doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs ; qu'en matière d'aménagement commercial, s'il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d'aménagement commercial, d'interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d'extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales, définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme ; que si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale de la Dombes, qui identifie la zone industrielle de la Sûre, dans laquelle doit s'insérer le projet, comme une zone d'activités de rang intercommunal, prévoit que " la localisation des commerces "structurants" sera prioritairement réalisée dans les bourgs centres. Dans la mesure du possible (...) on cherchera une localisation capable de favoriser l'utilisation des modes doux. " ; que ce document précise que " le SCOT ne peut apporter que des réponses d'ordre quantitatif, une qualification des zones (vocation, spécialisation, ...) paraissant "prématurée" " et que " si la vocation des zones ne peut être précisée, elles restent chacune, quelle que soit leur localisation ou leur taille, conditionnées à des projets d'aménagement qualitatif (composition urbaine, zone tampon, qualité architecturale...) " ; qu'il ajoute que " les zones existantes ou en projet sur Mionnay, Saint André de Corcy et Villars les Dombes créent un chapelet de ZA le long de l'axe de la RD1083, véritable épine dorsale du territoire. " ; que contrairement à ce que soutient la société CSF, il ne résulte pas de ces dispositions du DOG du SCOT que les activités commerciales seraient exclues de la zone d'activités de la Sûre ; que, dès lors, le projet autorisé par la décision contestée n'apparaît pas incompatible avec les orientations de ce document ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. " ;

9. Considérant que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;

10. Considérant que la société CSF soutient que le projet va entrainer une dégradation des conditions de circulation dès lors que "les réserves de capacité au niveau du panneau stop de la rue de la Sûre, permettant de s'insérer sur la route de Bourg-en-Bresse, sont faibles" et que "les conditions de circulation seront excessivement dégradées par l'afflux de véhicules supplémentaires" ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale, que tant les caractéristiques de la rue de la Sûre que celles de la RD 1083 et du carrefour aménagé, permettront une desserte satisfaisante de l'ensemble commercial ; qu'il ressort de l'étude de trafic produite devant la CNAC par la société pétitionnaire que les intersections entre la rue de la Sûre, la RD 1083 et la rue de l'Industrie disposent de réserves de capacités suffisantes ; qu'aucun élément du dossier ne vient étayer les affirmations selon lesquelles l'accès au projet depuis le nord de la rue de l'Industrie serait accidentogène et la signalisation au moyen d'un panneau "stop" sur la rue de l'Industrie, en provenance du centre-ville, inadaptée ; que, dans ces conditions, la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial contestée n'apparaît pas entachée d'une erreur d'appréciation des effets du projet en matière d'aménagement du territoire ;

11. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet, qui implique la création de places de stationnement au sud du tènement mais comprend la création de 1 310 m² d'espaces verts, aboutirait à accroître l'imperméabilisation du site ; que si la société CSF soutient que la réhabilitation d'une friche industrielle "aurait dû être l'occasion (...) de mener une réflexion globale sur la performance énergétique du bâtiment", il ressort des pièces du dossier que plus de cinquante arbres doivent être plantés sur le site et que l'isolation thermique du bâtiment sera renforcée ; que l'ensemble commercial s'insérera dans le paysage environnant, constitué de bâtiments industriels et commerciaux ; que l'absence d'utilisation de matériaux naturels ou éco-responsables, alors en outre que le projet consiste à utiliser un bâtiment existant, ne paraît pas suffisante pour justifier un refus d'autorisation ; que, dès lors, l'appréciation par la Commission nationale d'aménagement commercial des effets du projet en matière de développement durable n'apparaît pas erronée ;

12. Considérant que, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet, qui consiste à réhabiliter une friche industrielle, est situé dans la partie nord de la commune de Saint-André-de-Corcy, au sein d'une zone d'activités comprenant des activités artisanales et commerciales et à quelques dizaines de mètres de quartiers d'habitat ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société requérante, le projet participera à la revitalisation du tissu commercial de la commune ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le site du projet serait soumis à un risque technologique majeur, dès lors que l'établissement de stockage d'engrais classé Seveso qui est situé à quelques mètres du site n'exerce plus d'activité de stockage d'engrais depuis plusieurs années et que la seule présence d'un établissement classé Seveso à 1,2 km ne suffit pas, par elle-même à justifier un refus d'autorisation alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas soutenu par la requérante que le projet se situerait à une distance faisant obstacle à son implantation, ni que les mesures de sécurité applicables dans l'environnement de cet établissement seraient méconnues ; que, dès lors l'appréciation par la Commission nationale d'aménagement commercial des effets du projet en matière de protection des consommateurs n'apparaît pas à cet égard erronée ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CSF n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale délivré par le maire de Saint-André-de-Corcy à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires le 27 octobre 2015;

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la société CSF demande sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société CSF le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de Saint-André de Corcy, d'une part, et à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires, d'autre part, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société CSF est rejetée.

Article 2 : La société CSF versera une somme de 1 500 euros à la commune de Saint-André-de-Corcy, d'une part, et à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires, d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CSF, au ministre de l'économie et des finances, à la commune de Saint-André-de-Corcy et à la SAS Immobilière européenne des Mousquetaires.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 14 février 2017, à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mars 2017.

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N° 15LY04006


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