La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2017 | FRANCE | N°15LY03043

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 16 mai 2017, 15LY03043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1300897 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2015, M. D..., représenté par Me E... de la sociét

é d'avocats Arbor-E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1300897 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2015, M. D..., représenté par Me E... de la société d'avocats Arbor-E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 juillet 2015 ;

2°) de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007 au titre des sommes provenant du patrimoine de Mme B...et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D... soutient que :

- il ne pouvait être taxé d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée dès lors que les revenus en cause relevaient de la catégorie des bénéfices non commerciaux ; l'administration ne pouvait ignorer que ces revenus devaient être qualifiés de bénéfices non commerciaux dès le 1er juin 2010, date à laquelle elle a consulté le dossier d'instruction judiciaire qui le concernait alors que sa condamnation par un jugement correctionnel du 14 février 2012 confirme les faits en cause ;

- la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales est irrégulière car il ne s'est pas abstenu de répondre à la demande d'éclaircissement ou de justification et à la mise en demeure qui lui ont été adressées ;

- c'est à tort que le tribunal a rejeté ses moyens de procédure relatifs au défaut d'avis de vérification de comptabilité et à l'incompétence de l'administration fiscale en matière de recouvrement des cotisations sociales, au motif qu'il n'établit pas que les sommes créditées relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2005, le ministre des finances et des comptes publiques, conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'économie et des finances soutient que :

- à défaut de toute justification, la nature des sommes en cause est demeurée inconnue lors du contrôle, c'est donc à bon droit que l'administration a taxé d'office les sommes en cause dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ;

- à titre subsidiaire, il demande à la cour de procéder à une substitution de base légale et de maintenir l'imposition des sommes en cause, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application de l'article 92-1 du code général des impôts.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 7 avril 2017, M. D...persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...D...a fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au titre des années 2007 et 2008 ; que, dans le cadre de ce contrôle, il a fait l'objet d'une taxation d'office, sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, sur des revenus d'origine indéterminée d'un montant de 165 000 euros au titre de l'année 2007 et d'une imposition, selon la procédure de rectification contradictoire, portant, notamment, sur des revenus provenant de l'achat-revente de vin au titre des années 2007 et 2008 ; que, par jugement du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales supplémentairement mises à sa charge au titre de ces deux rectifications ; que M. D...relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de la taxation d'office dont il a fait l'objet au titre de l'année 2007 sur des revenus d'origine indéterminée et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / l'administration peut demander au contribuable (...) / des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux , des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

3. Considérant que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les éléments relevés par l'administration, dans le cadre du droit de communication qu'elle a exercé le 1er juin 2010 auprès du tribunal de grande instance de Grenoble, devant lequel une procédure judiciaire concernant M. D...était en cours d'instruction, et l'étude des crédits bancaires de l'intéressé, ont établi que le montant des crédits bancaires non justifiés figurant sur les comptes bancaires de ce dernier étaient plus de deux fois supérieur au montant des revenus déclarés ; que s'agissant de l'origine et du montant des sommes en cause, M.D..., en réponse à la demande d'éclaircissements ou de justifications concernant ses revenus du 17 août 2010, a, dans son courrier du 20 septembre 2010, reconnu l'existence de versements d'espèces et de remise de chèques provenant de MmeB... ; que dans son courrier du 14 octobre 2010, M. D...a reconnu que le montant de ces versements régulièrement effectués au cours de l'année 2007 s'élevait à 165 000 euros ;

5. Considérant que, dans sa réponse du 20 septembre 2010 à la demande d'éclaircissements ou de justifications concernant ses revenus du 17 août 2010, M. D...a justifié les versements de Mme B...en indiquant qu'il s'agissait d'un prêt personnel ; que dans son courrier du 26 octobre 2010 il a indiqué que " la totalité des sommes provenant de Mlle A... B...est un prêt d'argent à court et moyen terme et non un don manuel " et que ce prêt ne comportait pas d'intérêts ; que, dans son courrier du 26 octobre 2010, il a confirmé qu'il s'agissait d'un prêt et non d'un don manuel, raison pour laquelle il n'avait pas déposé une déclaration de don manuel comme le vérificateur l'avait invité à le faire par lettre du 14 octobre 2010 ; que, toutefois, en réponse au courrier n° 2172 bis -SD du 4 novembre 2010, M.D... n'a produit aucun contrat de prêt, aucun justificatif relatif à des garanties prises par le prêteur, à un éventuel remboursement ou au versement d'intérêts ; que, dans ces conditions, il résulte de l'instruction, qu'au vu des renseignements dont disposait l'administration avant l'envoi des demandes de justifications fondées sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à ces demandes, la nature des sommes en cause demeurait inconnue ; que, M. D...n'est dès lors pas fondé à soutenir que la procédure de taxation d'office mise en oeuvre sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales serait irrégulière au motif que les versements en cause auraient été obtenus dans le cadre d'un abus de faiblesse et par suite auraient été imposables en bénéfices non commerciaux au lieu de l'être dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; que la circonstance que, par jugement correctionnel du tribunal de grande instance de Grenoble du 14 février 2012, M. D...ait été condamné pour avoir profité de la faiblesse de Mme B...pour l'amener à notamment lui remettre une somme de 218 341 euros, est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors qu'il n'a pu, en tout état de cause, permettre d'établir la nature des versements en cause et ainsi la catégorie de leur imposition avant la taxation d'office dont le requérant a fait l'objet ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. D...n'a pas apporté de justifications suffisantes sur la nature des sommes en cause en réponse à la demande d'éclaircissements ou de justifications n° 2172 du 17 août 2010 ni à la mise en demeure n° 2172 bis qui lui a été en conséquence adressée le 4 novembre 2010 ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à contester la régularité de la procédure de taxation d'office dont il a fait l'objet sur des revenus d'origine indéterminée, en application des articles L. 16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant, en dernier lieu, que le moyen du requérant tiré de ce que l'administration était tenue de lui adresser un avis de vérification de comptabilité doit être écarté comme inopérant dès lors qu'il résulte de ce qui précède que M. D...a régulièrement été taxé d'office sur ses crédits demeurés inexpliqués dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

8. Considérant qu'en vertu du 1 de l'article 92 du code général des impôts sont considérés comme provenant de l'exercice d'une activité non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitation lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ;

9. Considérant qu'ainsi que cela est susmentionné, M. D...n'établit pas que les sommes en cause proviendraient d'un emprunt ; qu'il résulte du jugement correctionnel du tribunal de grande instance de Grenoble du 14 février 2012, devenu définitif, que ces sommes doivent être regardées dans leur ensemble comme ayant été obtenues par M. D...par abus de faiblesse d'une tierce personne, MmeB... ; que ne pouvant se rattacher à aucune autre catégorie d'imposition, ces sommes sont dès lors imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement du 1 de l'article 92 du code général des impôts ;

10. Considérant que le ministre est en droit à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition ; que le ministre demande, à titre subsidiaire, que les sommes en cause soient imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au lieu de la catégorie des revenus d'origine indéterminée dans laquelle elles ont été initialement imposées ; qu'ainsi que cela est susmentionné, la procédure de taxation d'office dont M. D...a fait l'objet au titre de ses revenus demeurés inexpliqués est régulière et il n'y a pas lieu de subordonner la demande de substitution de base légale présentée par l'administration au respect de la procédure de rectification contradictoire ; qu'au surplus, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été effectivement saisie et a émis un avis favorable sur le bien-fondé de l'imposition de ces crédits inexpliqués ; qu'il ne résulte pas ainsi de l'instruction que la substitution de base légale sollicitée par le ministre aurait ainsi pour effet de priver M. D...d'une garantie ; que cette demande de substitution de base légale doit, par suite, être accueillie ;

Sur les contributions sociales :

11. Considérant que les revenus litigieux, imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, ne constituent pas des revenus d'activité et de remplacement au sens des articles L. 136-1 à L. 136-5 du code de la sécurité sociale ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé, en application des articles 1600-0C, 1600-0F bis et 1600-0G du code général des impôts, à soutenir que le recouvrement des contributions sociales afférentes à ces revenus ne relèvent pas de la compétence de l'administration fiscale ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. D... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C... D...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 13 avril 2017, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mai 2017.

2

N° 15LY03043

ld


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award