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15/06/2017 | FRANCE | N°16LY02123

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 juin 2017, 16LY02123


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Savoie lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1507734 du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 17 novembre 2015 et enjoint au préfet de la Haute-Savoie de

réexaminer la situation de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notificat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Savoie lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1507734 du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 17 novembre 2015 et enjoint au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer la situation de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 juin 2016, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 mai 2016 ;

2°) de rejeter les conclusions de M. A...devant le tribunal administratif.

Il soutient que son arrêté ne méconnaît pas le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire enregistré le 30 septembre 2016, M.A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et à la mise à la charge de l'Etat du paiement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que le moyen invoqué n'est pas fondé.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Savouré, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant kosovar, né le 12 janvier 1974, déclare être entré en France le 5 juin 2013 ; qu'il a présenté une demande d'asile rejetée, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile le 9 mai 2014 ; que, souffrant de la maladie de Behçet, il a sollicité par ailleurs, le 27 mars 2013, un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, par un avis du 23 janvier 2014, que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé ne pouvait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. A... a obtenu une autorisation provisoire de séjour valable à compter du 18 août 2014 et prolongée jusqu'au 8 octobre 2015 ; qu'à l'issue d'une nouvelle demande, formulée le 30 septembre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a, cette fois, estimé qu'il existait un traitement approprié à la pathologie de M. A...au Kosovo ; que, par un arrêté du 17 novembre 2015, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que par un jugement du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer la situation du demandeur ; que le préfet de la Haute-Savoie relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

4. Considérant que l'arrêté contesté fait suite à l'avis du 15 octobre 2015, défavorable à M.A..., de sorte qu'il supporte la charge de la preuve ; qu'en l'espèce, il est constant que la maladie dont souffre M.A..., qui présente une forme sévère et invalidante, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que M.A..., qui suit un traitement composé des médicaments Imurel, Cortancyl, Colchimax, Amlor et Cacit D3 1000, produit un courrier du 9 décembre 2015 émanant du ministère de la santé du Kosovo, avec sa traduction en français, affirmant que les médicaments nécessaires au traitement de la maladie de Behçet ne sont pas disponibles dans ce pays ; que, si le préfet de la Haute-Savoie produit un courriel du 22 février 2016 écrit par le conseiller santé auprès du directeur général des étrangers en France (ministère de l'intérieur), affirmant que des traitements équivalents à la plupart de ces médicaments sont disponibles, ce courriel mentionne clairement que la colchicine n'y est pas disponible ; que, si ces documents sont postérieurs à l'arrêté en litige, ils peuvent être pris en compte pour évaluer la situation sanitaire au Kosovo au moment dudit arrêté, compte tenu notamment de la proximité de leurs dates ; que, dans ces conditions, M. A...doit être regardé comme rapportant la preuve de ce que les traitements appropriés à son état de santé ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'il avait méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et prononcé l'annulation de l'arrêté litigieux ;

5. Considérant que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif a enjoint au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer la situation de M. A...dans le délai de deux mois suivant la notification dudit jugement ; que, dès lors, les conclusions de M. A...tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ;

6. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Haute-Savoie est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à MeB..., conseil de M.A..., la somme de 1 000 euros, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C...A.... Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 juin 2017.

4

N° 16LY02123


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : DJINDEREDJIAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 15/06/2017
Date de l'import : 27/06/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16LY02123
Numéro NOR : CETATEXT000034978092 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-06-15;16ly02123 ?
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