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17/10/2014 | FRANCE | N°13MA04270

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 17 octobre 2014, 13MA04270


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 7 novembre 2013 et régularisée par courrier le 27 novembre suivant, présentée pour M. D...C...A..., demeurant..., par Me Ruffel ;

M. C...A...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1303831 en date du 9 septembre 2013 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre provisoirement au séjour et, d'autre part, de l'arrêté du

13 mai 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre d...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 7 novembre 2013 et régularisée par courrier le 27 novembre suivant, présentée pour M. D...C...A..., demeurant..., par Me Ruffel ;

M. C...A...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1303831 en date du 9 septembre 2013 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre provisoirement au séjour et, d'autre part, de l'arrêté du 13 mai 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation ;

2°) d'annuler la décision du 25 février 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre provisoirement au séjour en France ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 13 mai 2013 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant la Somalie comme pays de destination ;

4°) subsidiairement, de surseoir à statuer et de renvoyer devant la Cour de justice de l'Union européenne la question de l'inconventionnalité de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 39 de la directive 2005/85/CE ;

5°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation de séjour ou un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande d'admission au séjour ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ;

7°) de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 196 euros par application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, après renonciation, par celui-ci, à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2014,

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- et les observations de Me B...substituant Me Ruffel pour M. C... A..., requérant ;

1. Considérant que M. C...A..., de nationalité somalienne, relève appel de l'ordonnance en date du 9 septembre 2013 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, de l'arrêté du 13 mai 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par le préfet de l'Hérault :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision postérieure à l'introduction de la requête d'appel, M. C...A...s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que ce titre de séjour doit être regardé comme abrogeant les décisions attaquées du 13 mai 2013 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination, lesquelles n'ont reçu aucune exécution ; qu'il n'y a donc plus lieu de statuer sur la requête de M. C...A...en tant qu'elle est dirigée contre ces décisions ;

3. Considérant, en revanche, que la décision du 25 février 2013 refusant d'admettre provisoirement M. C...A...au séjour et la décision de refus de séjour du 13 mai 2013 n'ont pas été rapportées ; qu'elles ont produit des effets ; qu'il y a donc toujours lieu de statuer sur la requête de M. C...A...en ce qu'elle concerne ces décisions ;

Sur la décision en date du 25 février 2013 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée, ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant du dépôt de la réclamation. " ; qu'aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. " ;

5. Considérant que la demande présentée par M. C...A...devant le tribunal administratif de Montpellier n'était pas accompagnée de la décision du 25 février 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre provisoirement au séjour ; qu'invité, par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 13 août 2014, à produire cette décision, et avisé des conséquences de sa carence, l'intéressé n'a pas produit, dans le délai de quinze jours qui lui était imparti, la décision litigieuse, ni justifié de l'impossibilité de la produire ; que, dès lors, les conclusions de M. C...A...dirigées contre la décision du 25 février 2013 sont irrecevables et ne peuvent donc qu'être rejetées ;

Sur l'arrêté du 13 mai 2013 en tant qu'il porte refus de séjour :

En ce qui concerne la régularité de l'ordonnance attaquée :

6. Considérant que, devant le tribunal administratif de Montpellier, M. C... A... a invoqué un moyen tiré de ce que la décision prise à son encontre par le préfet de l'Hérault portant refus de séjour porte atteinte à son droit à un recours effectif, protégé par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par l'article 39 de la directive 2005/85/CE du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres, dès lors qu'elles permettent son éloignement avant que la Cour nationale du droit d'asile statue sans même lui permettre d'assister à l'audience ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a entaché son ordonnance d'irrégularité ; que le requérant est, dès lors, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation de l'ordonnance attaquée, en tant qu'elle rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mai 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

7. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C...A...devant le tribunal administratif de Montpellier ;

8. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 8° de l'article L. 314-11 du même code que l'examen d'une demande de séjour au titre de l'asile peut conduire successivement à l'intervention d'une décision du préfet sur l'admission provisoire au séjour en France pour permettre l'examen de la demande d'asile, puis d'une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et, le cas échéant, d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile, enfin, d'une décision du préfet statuant sur le séjour en France, le cas échéant à un autre titre que l'asile ; que la décision par laquelle le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'est pas prise pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de séjour ; que, par suite, les moyens soulevant, par voie d'exception, l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour opposé le 25 février 2013 à M. C...A..., aux motifs que l'administration ne rapporte pas la preuve d'une fraude, que la procédure prioritaire serait inconventionnelle au regard de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 39 de la directive 2005/85/CE et des articles 3, 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la notification de la décision a été faite dans une langue que l'intéressé ne comprend pas, ne peuvent être utilement invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision du 13 mai 2013 par laquelle le préfet, après la notification du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, a refusé de délivrer un titre de séjour au requérant ;

9. Considérant que si M. C...A...conteste l'instruction de sa demande d'asile selon la procédure prioritaire prévue par l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en faisant valoir que la fraude qui lui est reprochée n'est pas établie, il ressort des pièces du dossier que ses empreintes digitales n'ont pu être relevées malgré deux tentatives effectuées en ce sens les 21 janvier et 18 février 2013, le système de fichier européen " Eurodac " n'ayant pu fonctionner du fait que ses doigts avaient été endommagés ; que, dès lors, le préfet de l'Hérault a pu estimer qu'il relevait de l'un des cas mentionnés au 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, il a pu légalement, sur le fondement de l'article L. 742-6 du même code, refuser de lui délivrer un titre de séjour sans attendre que la Cour nationale du droit d'asile ait statué ;

10. Considérant que, si l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorise le préfet à prendre une mesure d'éloignement à l'égard de l'étranger dont l'admission provisoire au séjour a été refusée sur le fondement du 2° ou du 4° de l'article L. 741-4 de ce code dès la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant la demande d'asile, d'une part l'intéressé peut contester devant le tribunal administratif les motifs de sa non-admission au séjour et demander, notamment, la suspension de cette décision, d'autre part, les articles L. 512-1 et suivants du même code permettent à l'étranger de former un recours en annulation devant le tribunal contre la mesure d'éloignement ; qu'en vertu de l'article L. 513-1, celle-ci ne peut être mise à exécution tant que le délai de recours n'a pas expiré ; qu'en outre, l'exercice d'un tel recours a lui-même pour effet de suspendre l'exécution de la mesure jusqu'à la décision du tribunal ; qu'à l'occasion de sa demande d'annulation, l'étranger peut faire valoir les risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que la mesure d'éloignement ne peut être exécutée sans que l'étranger n'ait été mis à même de soumettre à un juge impartial et indépendant l'appréciation de son droit à se maintenir en France compte tenu des dangers qu'il encourrait s'il devait être renvoyé dans son pays d'origine ;

qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'article 39 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 doit être écarté ;

11. Considérant, qu'en l'espèce, l'arrêté contesté n'a ainsi pas eu pour effet d'empêcher M. C...A...de saisir la Cour nationale du droit d'asile d'un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 19 avril 2013 ; que, de même, l'intéressé a formé une demande d'annulation du refus de séjour pris à son encontre devant le tribunal administratif de Montpellier ; que l'intéressé a donc bénéficié d'un temps suffisant pour présenter utilement sa défense ; que, dans ces circonstances, il n'apparaît pas que M. C...A...ait été privé de son droit à un recours effectif en violation des articles 3, 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 13 mai 2013 en tant qu'il porte refus de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, le préfet de l'Hérault a délivré à M. C... A...une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande d'injonction présentée par l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sous réserve de la renonciation de Me Ruffel à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, le versement de la somme de 1 000 euros à Me Ruffel en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens :

15. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens " ; que les conclusions de M. C...A...tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des entiers dépens sont sans objet et ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C...A...dirigées contre les décisions du 13 mai 2013 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Article 2 : L'ordonnance en date du 9 septembre 2013 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée en tant qu'elle rejette la demande d'annulation de la décision du 13 mai 2013 portant refus de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me Ruffel, avocat de M. C...A..., sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, une somme de 1 000 (mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...A...et au ministre de l'intérieur.

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N° 13MA04270 2

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: M. Olivier EMMANUELLI
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Date de la décision : 17/10/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13MA04270
Numéro NOR : CETATEXT000029618615 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-17;13ma04270 ?
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