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30/01/2015 | FRANCE | N°13MA04604

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2015, 13MA04604


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA04604, présentée pour Mme A...B...demeurant..., par MeC... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302402 du 10 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 9 juillet 2012 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé

le Maroc comme pays de destination, à ce qu'il soit enjoint à cette même auto...

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 13MA04604, présentée pour Mme A...B...demeurant..., par MeC... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302402 du 10 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 9 juillet 2012 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le Maroc comme pays de destination, à ce qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ladite astreinte courant pendant un délai de trois mois après lequel elle pourra être liquidée et une nouvelle astreinte fixée, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail durant le temps de l'examen de sa demande, et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ladite astreinte courant pendant un délai de trois mois après lequel elle pourra être liquidée et une nouvelle astreinte fixée, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail durant le temps de l'examen de sa demande;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991;

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Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne en date du 16 décembre 2008 ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi signé à Rabat le 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 22 septembre 2012 dans l'affaire C 277/11 :

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 10 septembre 2013 dans l'affaire C 383/13 PPU ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2015 le rapport de M. Pocheron, président-assesseur ;

1. Considérant que MmeB..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement en date du 10 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 9 juillet 2012 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'il ressort de l'examen de la décision de refus de titre de séjour contestée qu'elle comporte, de manière suffisamment précise et circonstanciée, les considérations de droit et de fait se rapportant à la situation personnelle et familiale de MmeB..., qui en constituent le fondement ; que, n'ayant pas de caractère stéréotypé, cette motivation est suffisante au regard des exigences précitées de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit donc être écarté ;

3. Considérant que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l' article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention " travailleur temporaire " lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention " salarié ", une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an ; (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord bilatéral franco-marocain du 9 octobre 1987, et que, dans cette mesure, ces stipulations font obstacle à l'application aux ressortissants marocains de celles des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont le même objet ; qu'il suit de là que le préfet des Yvelines a retenu une base légale erronée en se fondant, pour rejeter la demande de MmeB..., sur les dispositions de l'article L. 313-10 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de titre de séjour portant la mention " salarié ", le préfet s'est fondé sur le refus d'autorisation de travail opposé le 26 mars 2012 à la demande déposée par l'employeur de la requérante concernant un contrat de travail dans le cadre de sa demande de titre de séjour comme salarié ; que la décision contestée devant lui aurait donc pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 précité que les premiers juges ont a bon droit substitué, ainsi que les parties en ont été informées par le tribunal, aux dispositions de l'article L. 313-10 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme B...n'ayant été privée en l'espèce d'aucune garantie pour l'application dudit article 3 de l'accord franco-marocain ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : (...) 6° le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 " ;

6. Considérant que, le 26 mars 2012, la direction départementale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) des Yvelines a émis un avis défavorable à la demande de Mme B...au motif que le contrat qu'elle produisait n'était qu'à temps partiel et qu'il ne lui procurait pas une rémunération équivalente au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) au sens du 6e de l'article R. 5221-20 du code du travail ; que si la requérante fait valoir que la rémunération horaire qui lui est versée est égale au salaire minimum horaire, ses revenus mensuels sont bien inférieurs au SMIC ; que, par suite, l'illégalité du refus du 26 mars 2012 opposé à la demande d'autorisation de travail de la requérante n'est pas démontrée ; que le préfet, dont il ne ressort pas des pièces du dossier ni de la motivation de la décision querellée qu'il se serait estimé lié par l'avis de la DIRECCTE, après avoir examiné la situation personnelle de l'intéressée, s'est ainsi fondé, à bon droit, sur l'absence de contrat de travail répondant aux conditions posées par l'article L. 5221-2 précité pour rejeter la demande de titre de séjour de Mme B...;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état-civil français ; (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a été titulaire, après son entrée en France le 13 septembre 2009, d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français délivré sur le fondement de l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable du 13 avril 2010 au 12 avril 2011 ; que s'il ressort des motifs de la décision litigieuse que le préfet des Yvelines a estimé que l'intéressée n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'a pas évoqué, faute d'avoir été saisi en ce sens, une demande de renouvellement de ce titre ; qu'ainsi, la circonstance, à la supposer établie, que la communauté de vie aurait été rompue en raison des violences conjugales qu'elle aurait subies de la part de son ancien époux, ne permettait pas à la requérante de solliciter la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précitées des articles L. 313-12 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les dispositions de l'article L. 313-12 ne trouvant à s'appliquer que lorsque l'autorité administrative est appelée à se prononcer sur une demande de renouvellement de titre de séjour d'un étranger en qualité de conjoint d'un ressortissant de nationalité française, ou lorsque les violences ont été commises après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire ; qu'au surplus, il ressort des motifs du jugement en date du 30 octobre 2012 du juge des affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles, prononcé aux torts des deux époux, que les violences étaient réciproques entre les conjoints ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

10. Considérant que si MmeB..., séparée de son conjoint de nationalité française et engagée dans une procédure de divorce à la date de la décision querellée, ainsi qu'il a été dit, fait valoir qu'elle réside en France de manière continue depuis le mois de septembre 2009 et qu'elle y travaille comme femme de ménage, elle n'établit cependant pas avoir implanté en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante n'est entrée sur le territoire national que le 13 septembre 2009, à l'âge de 33 ans ; qu'elle ne conteste pas que ses parents, son enfant et trois de ses cinq frères et soeurs résident au Maroc ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré, par MmeB..., de ce que le refus de titre de séjour contesté porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11, ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article, peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, ne faisant plus mention de ce que la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour exprime un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour, le moyen tiré de ce que le préfet des Yvelines se serait abstenu de saisir ladite commission doit être écarté ;

13. Considérant que si Mme B...expose qu'elle a été victime de violences de la part de son ancien époux, cette circonstance qui, au demeurant, et ainsi qu'il a été dit, n'est pas établie, ne saurait constituer un motif exceptionnel ou une considération humanitaire au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet des Yvelines n'a pas entaché ladite décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de la requérante ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours :

14. Considérant qu'en vertu des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui énoncent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant, la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre d'un ressortissant étranger auquel la délivrance d'un titre de séjour a été opposée, doit être motivée, cette motivation se confondant, le cas échéant, avec celle de la décision de refus de séjour ; que l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 prévoit que les décisions de retour indiquent les motifs de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que le (5) de l'article 2 de la même directive précise qu'une " décision de retour " est un acte de nature notamment administrative déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant une obligation de retour ; qu'il suit de là que l'obligation de quitter le territoire français en litige constitue une décision de retour au sens des dispositions mentionnées de la directive, au même titre que la décision de refus de séjour ; que dans ces conditions, en édictant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision refusant à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour, le législateur français n'a pas méconnu les objectifs de la directive du 16 décembre 2008 ;

15. Considérant que la décision portant refus de séjour étant, ainsi qu'il a été dit, elle-même suffisamment motivée, et l'article L. 511-1 étant visé par l'arrêté litigieux, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'obligation de quitter le territoire français dont elle a fait l'objet ne serait pas motivée ;

16. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions, qu'un délai de trente jours est laissé pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et prévoient qu'à titre exceptionnel seulement, l'autorité administrative puisse accorder un délai de départ volontaire d'une durée supérieure ; que, dès lors, l'autorité administrative, lorsqu'elle accorde ce délai de trente jours et se borne ainsi à reprendre la durée prévue par le II de l'article L. 511-1 du code, elle-même égale à la durée prévue par l'article 7 de la directive à titre de limite supérieure du délai devant être laissé pour un départ volontaire, n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point si l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande en ce sens ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français en tant que cette obligation comporterait un refus d'accorder un délai supérieur à trente jours pour son exécution volontaire est inopérant et doit être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que l'assimilation de la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français comportant un refus d'accorder un délai supérieur à trente jours pour son exécution volontaire à celle de la décision refusant à l'intéressée la délivrance d'un titre de séjour méconnaîtrait les objectifs assignés par la directive du 16 décembre 2008 ; que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français en cause serait dénuée de base légale au motif que l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile serait incompatible avec les objectifs de la directive 2008/115/CE doit également être écarté ;

18. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

20. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la Charte des droits fondamentaux ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;

21. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

22. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé à être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

23. Considérant que la seule circonstance que le préfet des Yvelines, qui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme B...en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français n'a pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé l'intéressée qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, elle serait susceptible d'être contrainte de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder la requérante comme ayant été privée de son droit à être entendue, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

24. Considérant que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés pour rejeter les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ; que les moyens tirés de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de ce que la requérante pouvait être admise au séjour de plein droit en application de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, pour les mêmes motifs, être écartés ;

25. Considérant que la circonstance que MmeB..., postérieurement à la décision litigieuse, justifierait d'une vie commune avec un ressortissant marocain en situation régulière, avec lequel elle a eu un enfant, qui ferait obstacle à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision querellée ;

26. Considérant que les circonstances que Mme B...vivait en France depuis plus de trois ans à la date de la décision querellée, et qu'elle avait entamé une procédure de divorce, ne sont pas de nature à démontrer qu'en n'octroyant pas un délai de retour supérieur à trente jours le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée ;

27. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant que ces dispositions font en tout état de cause obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme B...la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.

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N°13MA04604


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04604
Date de la décision : 30/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CAUCHON-RIONDET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-01-30;13ma04604 ?
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