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21/04/2015 | FRANCE | N°14MA00046

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 21 avril 2015, 14MA00046


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant à..., par MeC... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302621 du 6 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2013 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;


3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant à..., par MeC... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302621 du 6 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2013 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Gard de procéder au réexamen de sa situation, sous la même astreinte, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à MeC..., qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle, de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité sur l'Union européenne ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 31 mars 2015, le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

1. Considérant que, par jugement du 6 décembre 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B..., de nationalité russe, tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2013 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. B... relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que le refus de séjour comporte les éléments de fait et de droit relatifs à la situation particulière de M. B..., sur lesquels il est fondé ; qu'en particulier et contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté préfectoral mentionne la mesure d'éloignement prise à l'encontre de l'épouse de l'intéressé, qui avait sollicité son admission au séjour au titre de son état de santé ; qu'ainsi, il est suffisamment motivé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de la lecture de l'arrêté préfectoral, qui fait notamment référence au rejet de la demande d'asile de M. B... par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 juin 2012, confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 26 février 2013, puis au rejet de la demande de réexamen par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 16 mai 2013, que l'administration a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé ; que le préfet n'étant pas compétent pour se prononcer sur une demande d'admission au statut de réfugié, que M. B... n'a pas obtenu comme il vient d'être dit, et alors qu'il n'était saisi que d'une demande fondée sur l'état de santé, il n'avait pas à examiner la situation de M. B... au regard de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

4. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., né le 19 janvier 1955, déclare être entré irrégulièrement en France le 12 octobre 2011 en compagnie de son épouse ; que celle-ci a fait l'objet d'un arrêté préfectoral identique à celui de son mari, le même jour ; que, si cet arrêté a été annulé par jugement du 3 septembre 2013 et a donc disparu de l'ordonnancement juridique, le tribunal administratif de Nîmes n'a pas statué sur l'état de santé de l'intéressée ; que les certificats médicaux versés au débat, qui ne se prononcent pas sur ces points, ne permettent pas d'estimer que le défaut de prise en charge médicale de Mme B... pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. B... ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations selon lesquelles sa présence aux côtés de son épouse serait indispensable eu égard à la pathologie dont elle souffre ; que M. B... ne soutient pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. B..., le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par le refus de séjour ; qu'ainsi, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont été méconnues ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, d'abord, que le droit d'être entendu dans toute procédure, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision ; qu'ainsi la seule circonstance que le préfet n'ait pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé M. B... qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder ce dernier comme ayant été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

7. Considérant, ensuite, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que le refus de séjour n'est pas entaché d'illégalité ; que, dès lors, l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti n'est pas privée de base légale ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " ; que l'article L. 742-6 de ce code dispose : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ;

9. Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution, après la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant une demande d'asile, qu'à l'encontre d'un étranger entrant dans le champ d'application du 2° au 4° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il incombe de ce fait au juge saisi de la contestation de la légalité d'une obligation de quitter le territoire français après la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides fondée sur le 4° de cet article, de s'assurer que l'étranger entre bien dans le cas visé par ces dispositions ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la décision de refus d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile en date du 16 avril 2013, produite en défense, que la demande de réexamen qui a fait l'objet de la seconde décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 13 mai 2013, a été traitée selon la procédure prioritaire sur le fondement du 4° de l'article L. 742-6 au motif que, en l'absence d'élément nouveau communiqué à l'appui de la demande, elle constituait un recours abusif aux demandes d'asile ; que M. B... ne conteste pas ce motif, qui n'est pas erroné en droit, et doit dès lors être regardé comme établi ; que, par conséquent, le préfet a pu légalement édicter une obligation de quitter le territoire français après le refus de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sans attendre la nouvelle décision de la Cour nationale du droit d'asile, saisie le 23 juin 2013 ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation du droit au recours effectif, garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut être accueilli ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements inhumains ou dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'à l'appui du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions, dont l'examen relève en fait d'un contrôle normal, M. B... se borne dans l'instance à énoncer des considérations générales sans apporter aucun élément sur les risques personnellement encourus en cas de retour en Russie, qu'il lui appartient de démontrer contrairement à ce qu'il soutient ; qu'en outre les pièces communiquées, déjà produites devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne permettent pas de tenir pour établies les allégations de l'appelant relatives à la violente agression à caractère raciste dont son fils aurait été victime le 11 décembre 2010 à Moscou et à ses conséquences pour M. B..., qui seraient à l'origine des craintes de celui-ci en cas de renvoi en Russie ; que, dans ces conditions, le moyen ne peut être accueilli ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que, par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

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N° 14MA00046

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00046
Date de la décision : 21/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CHABBERT MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-21;14ma00046 ?
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