La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2015 | FRANCE | N°12MA03629

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 22 juin 2015, 12MA03629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Auer a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner solidairement la commune de Cannes et la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) à lui payer la somme de 622 338,31 euros en paiement du solde du marché de réalisation de la structure métallique dans le cadre des travaux de réaménagement du Palais des Festivals de Cannes, assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 7 mars 2007.

Dans la même instance, par deux mémoires distincts, la comm

une de Cannes a demandé au tribunal que les sociétés Scau, RTA, Coplan Ingénierie, Copl...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Auer a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner solidairement la commune de Cannes et la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) à lui payer la somme de 622 338,31 euros en paiement du solde du marché de réalisation de la structure métallique dans le cadre des travaux de réaménagement du Palais des Festivals de Cannes, assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 7 mars 2007.

Dans la même instance, par deux mémoires distincts, la commune de Cannes a demandé au tribunal que les sociétés Scau, RTA, Coplan Ingénierie, Coplan Environnement Conseil et Campenon Bernard Méditerranée soient condamnées à la garantir en cas de condamnation prononcée à son encontre et la Semec a demandé au tribunal, à titre principal, la condamnation de la société Auer à payer au maître d'ouvrage la somme de 524 294,44 euros et du maître d'oeuvre à payer au maître d'ouvrage la somme de 67 423 euros HT et à titre subsidiaire, la condamnation de la société Auer à payer au maître d'ouvrage la somme de 490 280,20 euros et du maître d'oeuvre à verser au maître d'ouvrage la somme de 114 652,15 euros.

Par un jugement n° 0800323 du 11 mai 2012, le tribunal administratif de Nice a condamné la société Auer à verser à la commune de Cannes et à la Semec la somme de 172 836,69 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2007 et a condamné la société Campenon Bernard Côte d'Azur venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée à garantir la commune de Cannes et la Semec à hauteur de 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête, enregistrée le 21 août 2012 sous le n° 12MA03629 et par un mémoire, enregistré le 1er mai 2015, la société Campenon Bernard Côte d'Azur venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée, représentée par Me I..., demande à la cour :

1°) de joindre cette instance avec celle n° 12MA03638 ;

2°) d'annuler le jugement n° 0800323 du 11 mai 2012 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il l'a condamnée à garantir la commune de Cannes et la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) à hauteur de 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC ;

3°) de rejeter les demandes de la commune de Cannes et de la Semec présentées devant le tribunal administratif et de la mettre hors de cause ;

4°) en cas de condamnation, de limiter sa garantie à hauteur de 80 % de la somme de 170 068,81 euros TTC ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Cannes solidairement avec la Semec la somme de 4 000 euros portée à la dernière somme demandée de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Campenon Bernard Côte d'Azur soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité : elle n'a pas été mise en cause et n'a pas été invitée à produire de mémoire en défense ;

- lors de l'audience publique, elle n'a pas été invitée à présenter d'observations ;

- le jugement attaqué a été pris en méconnaissance de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- le tribunal administratif a commis une erreur manifeste de raisonnement ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu sa responsabilité au titre du changement de méthodologie des travaux de démolition ;

- la modification des termes du marchés par la Semec et sa maîtrise d'oeuvre a rendu impossible cette méthodologie ;

- la Semec n'a pas mis à la disposition du groupement la zone d'installation de chantier contractuellement définie laquelle comprenait un accès côté port ;

- cette situation a perduré jusqu'au 19 décembre 2005 ;

- elle a été amenée à proposer une modification de la méthodologie envisagée initialement qui a été entérinée par la maîtrise d'oeuvre et acceptée, au moins tacitement, par la Semec ;

- les travaux liés à l'augmentation de la durée du chantier ne résultent pas du prétendu changement fautif de méthodologie opéré par la société Campenon Bernard, qui doit donc être mise hors de cause ;

- le dépassement de la côte 15 NGF constitue l'événement causal, direct et principal expliquant les retards subis, nonobstant les dénégations contraires de la commune de Cannes et de sa maîtrise d'oeuvre ;

- elle a été contrainte de modifier sa méthodologie d'exécution des travaux ;

- la maîtrise d'ouvrage a admis une prolongation de délai au 24 février 2006 ;

- des manifestations supplémentaires ont été ajoutées ;

- elle a supporté des restrictions d'exécution des travaux lors des périodes de montage et démontage des salons et des contraintes imprévues d'installations et d'accès au chantier ;

- enfin, il convient de dénoncer l'immixtion fautive de la Semec et de la commune de Cannes dans le chantier ;

- aucune faute dans la réalisation des travaux ne peut lui être imputée ;

- en toute hypothèse, sa garantie ne saurait excéder 80 % d'une somme de 142 198 euros HT soit 80 % de 170 068,81 euros TTC.

Par des mémoires, enregistrés le 12 septembre 2013 et le 27 mai 2015, la commune de Cannes, représentée par Me D...de la Selarl Soler-Couteaux -D..., demande à la cour ;

1°) de joindre cette instance avec celle enregistrée sous le n° 12MA03638 ;

2°) de rejeter la requête de la société Campenon Bernard Méditerranée ;

3°) de mettre à la charge de la société Campenon Bernard Méditerranée la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Cannes soutient que :

- l'acte d'engagement fixait les dates de début et d'achèvement des travaux respectivement au 8 juin 2005 et au 20 janvier 2006 ;

- en raison de la tenue de salons au sein du bâtiment pendant la durée du chantier, le marché imposait, par ailleurs, à l'entrepreneur des obligations particulièrement strictes en matière d'étanchéité ;

- s'agissant du déroulement des travaux, l'entrepreneur s'était engagé, dans son offre, à respecter une méthodologie consistant à n'exécuter la dalle du niveau 1 (démolition comprise) qu'à l'abri de la toiture existante, une fois celle-ci surélevée et agrandie ;

- la société Campenon Bernard Méditerranée a décidé unilatéralement de changer de méthodologie ;

- cette société a gravement failli à son obligation en matière d'étanchéité, et ce dès le début des travaux ;

- à la suite d'orages et de pluies violentes, des infiltrations se sont produites le 21 août 2005, le 7 septembre 2005 et les 18 et 19 octobre 2005 ;

- la carence de la société Campenon Bernard Méditerranée, qui se trouve à l'origine du sinistre, est parfaitement relevée par Coplan ;

- parallèlement, et avant les inondations des 18 et 19 octobre 2005, un autre incident s'est produit sur le chantier en raison d'une erreur d'altimétrie de la toiture ;

- les activités n'ont pas cessé durant les périodes de tenue des salons ;

- l'entrepreneur ayant accumulé un retard considérable du fait de son changement de méthodologie, les travaux n'ont pu être achevés que trois mois seulement après la date contractuellement prévue, soit le 18 avril 2006, avec 88 jours de retard ;

- la société Campenon se prévaut du caractère prétendument irréalisable de la méthodologie initiale mais l'expert ne se prononce pas en ce sens ;

- la garantie de la société Campenon Bernard Méditerranée est parfaitement justifiée et doit être portée à 100 % ;

- les demandes de réduction formulées par l'appelante doivent être rejetées.

Dans les dossiers n° 12MA03629 et n° 12MA03638, par une lettre du 18 mai 2015 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour était susceptible d'être fondée sur le moyen relevé d'office tiré de ce que la société Campenon Bernard Côte d'Azur venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée, la société Carrière JP, la société Ineo Réseaux Côte d'Azur venant aux droits de la société Etablissements Pignatta et la société Auer en tant qu'elles sollicitent la condamnation de la société d'économie mixte pour les événements cannois, maître d'ouvrage délégué de la commune de Cannes, ont mal dirigé leur action, dès lors que seul le maître d'ouvrage est susceptible de voir sa responsabilité engagée du fait des fautes commises à l'égard du cocontractant dans la passation ou l'exécution du marché.

Par un mémoire, enregistré le 21 mai 2015, la société Campenon Bernard Côte d'Azur a répondu au moyen d'ordre public.

Elle expose que le mandat confié à la Semec lui conférait un pouvoir de direction de projet, que la Semec est devenue presque l'unique interlocuteur des acteurs du projet et qu'elle est bien intervenue pour le compte et au nom de la commune de Cannes.

II°) Par une requête, enregistrée le 22 août 2012 sous le n° 12MA03638 et par des mémoires enregistrés le 11 septembre 2013 et le 27 mai 2015, la commune de Cannes, représentée par Me D... de la Selarl Soler-Couteaux -D..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0800323 du 11 mai 2012 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a limité à 172 836,69 euros TTC la somme due par la société Auer à la commune de Cannes et à la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) ;

2°) de condamner la société Auer à verser à la commune de Cannes et à la Semec la somme de 860 733,24 euros TTC, sauf à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2007 et leur capitalisation ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement entrepris en tant qu'il limite à 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC la garantie due par la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

4°) de condamner la société Campenon Bernard Côte d'Azur à la garantir, avec la Semec, de la totalité de la somme de 270 819,85 euros TTC ;

5°) d'annuler le jugement entrepris en tant qu'il rejette les conclusions d'appel en garantie dirigées contre les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

6°) de condamner les sociétés Scau, RTA et Coplan Ingénierie à la garantir, avec la Semec, de la somme de 134 846 euros HT, soit 161 275,80 euros TTC ;

7°) de mettre à la charge de la société Auer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Cannes soutient que :

- l'acte d'engagement fixait les dates de début et d'achèvement des travaux respectivement au 8 juin 2005 et au 20 janvier 2006 ;

- en raison de la tenue de salons au sein du bâtiment pendant la durée du chantier, le marché imposait, par ailleurs, à l'entrepreneur des obligations particulièrement strictes en matière d'étanchéité ;

- s'agissant du déroulement des travaux, l'entrepreneur s'était engagé, dans son offre, à respecter une méthodologie consistant à n'exécuter la dalle du niveau 1 (démolition comprise) qu'à l'abri de la toiture existante, une fois celle-ci surélevée et agrandie ;

- la société Campenon Bernard Méditerranée décide unilatéralement de changer de méthodologie ;

- cette société a gravement failli à son obligation en matière d'étanchéité, et ce dès le début des travaux ;

- à la suite d'orages et de pluies violentes, des infiltrations se sont produites le 21 août 2005, le 7 septembre 2005 et les 18 et 19 octobre 2005 ;

- la carence de la société Campenon Bernard Méditerranée, qui se trouve à l'origine du sinistre, est parfaitement relevée par Coplan ;

- parallèlement, et avant les inondations des 18 et 19 octobre 2005, un autre incident s'est produit sur le chantier en raison d'une erreur d'altimétrie de la toiture ;

- les activités n'ont pas cessé durant les périodes de tenue des salons ;

- l'entrepreneur ayant accumulé un retard considérable du fait de son changement de méthodologie, les travaux n'ont pu être achevés que trois mois seulement après la date contractuellement prévue, soit le 18 avril 2006, avec 88 jours de retard ;

- selon l'expert, la commune de Cannes et la Semec n'ont pris aucune part dans l'erreur d'altimétrie de la toiture ;

- la société Auer porte une part substantielle de responsabilité dans l'erreur d'altimétrie de la toiture ;

- dans ces conditions, la société Auer n'était pas fondée à réclamer réparation du surcoût que cette modification lui aurait fait supporter ;

- le dépassement de la toiture, révélé entre le 10 et le 14 octobre 2005, n'a pas empêché la société Auer de démarrer les travaux d'extension de la charpente ;

- si la Semec a interrompu les travaux entre le 20 octobre et le 20 novembre 2005, durant cette période, l'acte d'engagement prévoyait expressément l'interruption des travaux pendant la tenue de certains salons ;

- ce n'est pas le " 29 novembre 2005 qu'un plan est enfin proposé par la maîtrise d'oeuvre " ;

- l'ordre de service n° 17 prescrivant aux entreprises de reprendre les travaux sur la base de la solution mise au point par le bureau d'études Coplan et son sous-traitant IEC a été remis à la société Campenon Bernard Côte d'Azur dès le 8 novembre 2005 ;

- le compte rendu de chantier du 13 décembre 2005 relève qu'à cette date, douze charpentiers de la société Auer étaient présents sur le site ;

- si l'avancement des travaux de la société Auer s'est trouvé gravement entravé jusqu'à la date du 19 décembre 2005, la responsabilité en incombe à la gêne provoquée par les opérations de bâchage et de débâchage de chantier rendues nécessaires par le changement de méthodologie décidé unilatéralement par la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

- le chantier n'a jamais été dirigé par la Semec ;

- la société Auer a contribué à l'erreur d'altimétrie de la toiture et cette erreur est de nature à engager sa responsabilité ;

- la société Auer a manqué à son devoir de conseil ;

- les frais occasionnés par le changement de méthodologie ne sont pas justifiés et, en tout état de cause, ne sont pas fondés ;

- les frais générés par le changement de méthodologie ne sont pas de nature à bouleverser l'économie du marché ;

- le changement de méthodologie est exclusivement imputable à la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

- en tout état de cause, la demande de la société Auer, qui n'est pas justifiée, n'est pas recevable en application de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales Travaux ;

- les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen ;

- la demande de la société Auer dirigée contre le maître d'ouvrage ne pourra qu'être rejetée ;

- les pénalités infligées à la société Auer sont justifiées ;

- l'entrepreneur était, dès avant la révélation de l'erreur d'altimétrie, en retard de trois semaines ;

- le changement de méthodologie et les problèmes d'étanchéité en résultant constituent la cause principale du retard supplémentaire enregistré par l'entrepreneur ;

- concernant le sinistre " plancher ", la responsabilité de la société Auer et le montant de la somme devant être mise à sa charge sont établis ;

- par ailleurs, elle doit être garantie en totalité par la maîtrise d'oeuvre ;

- la société Coplan porte l'essentiel de la responsabilité de l'erreur d'altimétrie de la toiture ;

- la modification de la toiture résulte d'une erreur d'altimétrie de la maîtrise d'oeuvre et n'est pas imputable à une décision de la Semec ;

- en tout état de cause, le maître d'ouvrage ne peut supporter les conséquences onéreuses des modifications de la toiture consécutives à l'erreur d'altimétrie commise par le maître d'oeuvre.

Par des mémoires, enregistrés le 31 octobre 2012 et le 4 mai 2015, la société Auer représentée par Me E...de la SCP E...-Mauguere, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la commune de Cannes ;

2°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif et de condamner la commune de Cannes à lui verser la somme de 673 542,06 euros TTC en paiement du solde du décompte général des travaux, avec les intérêts au taux contractuel à compter du 7 mars 2007 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cannes une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Auer soutient que :

- les travaux supplémentaires générés par les erreurs commises par la maîtrise d'oeuvre ne sauraient être laissés à la charge des entreprises exécutantes, même partiellement ;

- le changement de méthodologie a été proposé par les entreprises et accepté par la Semec et la maîtrise d'oeuvre ;

- en ce qui concerne les travaux de mise en conformité de la charpente, ces travaux générés par les erreurs commises par la maîtrise d'oeuvre ne sauraient être laissés à la charge des entreprises exécutantes ;

- elle n'a pas à supporter le coût des travaux induits par le changement de méthodologie ;

- si le changement de méthodologie a généré des sinistres, ces sinistres ont été pris en charge par les assurances des parties ;

- elle n'a pas manqué à son devoir de conseil ;

- c'est à bon droit que les premiers juges l'ont exonérée de toute pénalité de retard ;

- le sinistre " plancher " est intervenu postérieurement à la réception et ne doit donc pas faire partie du décompte général de l'entreprise ;

- le coût de la réfection du plancher aurait dû être diminué de l'enrichissement acquis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2012, la société Ginger Ingénierie venant aux droits de la société Coplan Ingénierie et la société Marseille Architecture Partenaires venant aux droits de la société RTA, représentées par Me G...de la SCP G...- de Villers, demandent à la cour :

1°) de confirmer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Cannes à leur encontre ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Cannes la somme de 2 000 euros à verser à chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le chantier contractuellement prévu pour être livré au 20 janvier devait finalement être réceptionné à effet au 18 avril 2006 avec un grand nombre de réserves n'ayant pas toutes été levées par le groupement d'entreprises ;

- la demande présentée par la société Auer devant le tribunal administratif a été enregistrée le 14 janvier 2008, soit postérieurement au délai de forclusion prévu à l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales Travaux ;

- la société Auer, n'ayant pas formulé de demandes en première instance à l'encontre de la maîtrise d'oeuvre, ne peut formuler des conclusions d'appel contre elle, qui seraient alors irrecevables ;

- les travaux supplémentaires réclamés par la société Auer pour modifier la forme de la charpente au motif que ces travaux supplémentaires n'étaient pas une conséquence directe de l'erreur d'altimétrie qui n'aurait nécessité qu'un simple rabaissement sans modification de la charpente mais résultait d'un choix du maître de l'ouvrage et de la Semec ayant voulu maintenir la hauteur libre sous plafond et sont donc justifiés ;

- concernant l'indemnisation des frais occasionnés par le changement de méthodologie, la cour ne pourra que confirmer l'analyse des premiers juges, sauf à débouter la société Auer de ses demandes qui n'ont pas été assorties des justifications nécessaires dans son mémoire de réclamation comme l'exige le cahier des clauses administratives générales Travaux, ou éventuellement, mettre cette somme entièrement à la charge de la société Campenon Bernard Côte d'Azur, seule responsable du changement de méthodologie ;

- concernant les pénalités de retard, la société Auer était bien pour une part substantielle responsable de l'erreur altimétrique ;

- le retard n'est pas entièrement imputable à l'erreur altimétrique découverte le 14 octobre 2005 dès lors, qu'à cette date, le groupement avait déjà entre trois et cinq semaines de retard et que par la suite, se sont produites des inondations ayant conduit la Semec à prononcer un arrêt de chantier d'un mois ;

- les conclusions d'appel en garantie dirigées contre elles à un autre titre que celui des frais générés par l'erreur d'altimétrie et la modification de la toiture seraient des demandes nouvelles en appel et donc irrecevables ;

- en tout état de cause, les conclusions d'appel en garantie sont infondées : la décision de modifier la forme de la charpente de manière à maintenir une hauteur sous plafond maximum procédait bien d'un choix du maître d'ouvrage et de la Semec ;

- au surplus, le coût des travaux supplémentaires réclamés par l'entreprise rentre dans le taux de tolérance du marché, prévu par l'article 16 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2014, la société Scau représentée par Me F...demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête de la commune de Cannes ;

2°) en cas de condamnation prononcée à son encontre, de dire qu'elle devra être entièrement relevée et garantie par les sociétés Ginger Ingénierie et Marseille Architecture Partenaires ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cannes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a été chargée de la conception de l'ensemble de l'opération ;

- la société Campenon Bernard Côte d'Azur s'était engagée et a été retenue en raison de la méthodologie contractuelle qu'elle avait proposée, acceptée et planifiée au moment de la signature du marché ;

- l'erreur d'altimétrie n'est pas à l'origine du retard de chantier dont la responsabilité pleine et entière repose sur la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

- l'expert ne relève aucune part de responsabilité à son encontre, étant rappelé qu'elle n'a eu ni la direction, ni la surveillance des travaux ;

- elle ne saurait être tenue pour responsable du changement de méthodologie imposé par la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

- elle n'était pas investie de la mission de direction de chantier.

Par un mémoire, enregistré le 30 avril 2015, la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il limite à 172 836,69 euros TTC la somme due par la société Auer à la commune de Cannes et la Semec ;

2°) de condamner la société Auer à lui verser la somme de 860 733,25 euros TTC majorée des intérêts légaux à compter du 16 mars 2007 ;

3°) de rejeter l'appel incident de la société Auer et les conclusions des sociétés Ginger Ingénierie et Marseille Architecture Partenaires ;

4°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il limite à 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC la garantie due par la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

5°) de condamner la société Campenon Bernard Côte d'Azur à la garantir, avec la commune de Cannes, de la totalité de la somme de 270 819,85 euros TTC ;

6°) d'annuler le jugement entrepris en tant qu'il rejette les conclusions d'appel en garantie dirigées contre les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

7°) de condamner les sociétés Scau, Ginger Ingénierie venant aux droits de la société Coplan Ingénierie et Marseille Architecture Partenaires venant aux droits de la société RTA à la garantir, avec la commune de Cannes, de la somme de 134 846 euros HT, soit 161 275,80 euros TTC ;

8°) de mettre à la charge de la société Auer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si la société Auer avait correctement rempli sa mission, elle aurait détecté l'erreur d'altimétrie de la toiture avant de commencer le montage de la charpente ;

- la société Auer n'est donc pas fondée à réclamer au maître d'ouvrage le remboursement du surcoût que la modification de la charpente lui a fait supporter ;

- le maître d'ouvrage n'a commis aucune faute en ce qui concerne les travaux de mise en conformité de la charpente ;

- en application de l'article 30 du cahier des clauses administratives générales travaux, aucune plus-value ne saurait être versée à l'entrepreneur au motif qu'il doit effectuer des travaux de reprise lui permettant de mettre ses ouvrages en conformité avec les exigences du marché ;

- les travaux de mise en conformité en litige ne peuvent être qualifiés de travaux supplémentaires ;

- en ce qui concerne l'indemnisation des frais occasionnés par le changement de méthodologie, les demandes de la société Auer procèdent exclusivement d'un litige entre la société Auer et la société Campenon Bernard Côte d'Azur ;

- le changement de méthodologie procède d'une initiative de la seule société Campenon Bernard Côte d'Azur qui doit garantir intégralement le maître d'ouvrage ;

- l'erreur d'altimétrie étant, pour partie, imputable à la société Auer, cette dernière ne peut être déchargée des pénalités de retard ;

- la maîtrise d'oeuvre doit la garantir des sommes mises à sa charge au titre de l'erreur d'altimétrie ;

- en ce qui concerne le sinistre " plancher ", c'est à bon droit que le maître d'ouvrage a déduit la somme correspondante du décompte général de l'entreprise Auer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mai 2015, la société Campenon Bernard Côte d'Azur représentée par MeI..., demande à la cour :

1°) de joindre cette instance avec celle n° 12MA03629 ;

2°) d'annuler le jugement n° 0800323 du 11 mai 2012 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il l'a condamnée à garantir la commune de Cannes et la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) à hauteur de 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC ;

3°) de rejeter les demandes de la commune de Cannes et de la Semec présentées devant le tribunal administratif et de la mettre hors de cause ;

4°) en cas de condamnation, de limiter sa garantie à hauteur de 80 % de la somme de 170 068,81 euros TTC ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Cannes solidairement avec la Semec la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les travaux liés à l'augmentation de la durée du chantier ne résultent pas du prétendu changement fautif de méthodologie opéré par la société Campenon Bernard, qui doit donc être mise hors de cause ;

- le dépassement de la côte 15 NGF constitue l'événement causal, direct et principal expliquant les retards subis, nonobstant les dénégations contraires de la commune de Cannes et de sa maîtrise d'oeuvre ;

- elle a été contrainte de modifier sa méthodologie d'exécution des travaux ;

- la maîtrise d'ouvrage a admis une prolongation de délai au 24 février 2006 ;

- des manifestations supplémentaires ont été ajoutées ;

- elle a supporté des restrictions d'exécution des travaux lors des périodes de montage et démontage des salons et des contraintes imprévues d'installations et d'accès au chantier ;

- enfin, il convient de dénoncer l'immixtion fautive de la Semec et de la commune de Cannes dans le chantier ;

- aucune faute dans la réalisation des travaux ne peut lui être imputée.

Dans les dossiers n° 12MA03629 et n° 12MA03638, par une lettre du 18 mai 2015 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour était susceptible d'être fondée sur le moyen relevé d'office tiré de ce que la société Campenon Bernard Côte d'Azur venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée, la société Carrière JP, la société Ineo Réseaux Côte d'Azur venant aux droits de la société Etablissements Pignatta et la société Auer en tant qu'elles sollicitent la condamnation de la société d'économie mixte pour les événements cannois, maître d'ouvrage délégué de la commune de Cannes, ont mal dirigé leur action, dès lors que seul le maître d'ouvrage est susceptible de voir sa responsabilité engagée du fait des fautes commises à l'égard du cocontractant dans la passation ou l'exécution du marché.

Dans le dossier n° 12MA03638, par une lettre du 18 mai 2015 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour était susceptible d'être fondée sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie de la société Scau, dirigées contre les sociétés Ginger Ingénierie et Marseille Architecture Partenaires, présentées pour la première fois en appel.

Par un mémoire, enregistré le 21 mai 2015, la société Campenon Bernard Côte d'Azur a répondu au moyen d'ordre public.

Elle expose que le mandat confié à la Semec lui conférait un pouvoir de direction de projet, que la Semec est devenue presque l'unique interlocuteur des acteurs du projet et qu'elle est bien intervenue pour le compte et au nom de la commune de Cannes.

Par un mémoire, enregistré le 26 mai 2015, la société Grontmij, venant aux droits de la société Ginger Ingénierie, elle-même venant aux droits de la société Coplan Ingénierie Groupe et la société Marseille Architecture Partenaires, concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures et par les mêmes moyens. Elles demandent, en outre, à la cour de porter à 5 000 euros la somme sollicitée, pour chacune, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 27 mai 2015, la société Auer a répondu au moyen d'ordre public.

Elle expose que dans ses dernières écritures, elle sollicite la condamnation du maître de l'ouvrage en la personne de la commune de Cannes et que ses demandes sont donc parfaitement dirigées.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- et les observations de Me I... représentant la société Campenon Bernard Côte d'Azur, de Me D...représentant la commune de Cannes, de Me A...représentant la société d'économie mixte pour les événements cannois, de Me J...-F... représentant la société Scau et de Me C...H...représentant les sociétés Grontmij et Marseille Architecture Partenaires.

1. Considérant que les requêtes nos 12MA03629 et 12MA03638 sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Nice et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

2. Considérant que la société d'économie mixte pour les événements cannois (Semec) a été chargée de conduire, en qualité de mandataire de la commune de Cannes, l'opération de réaménagement du bâtiment annexe du Palais des Festivals et des Congrès, dit " Espace Riviera " ; que cette opération consistait à étendre l'Espace Riviera en créant un plancher à son niveau 1, comblant environ 2 400 m2 de vide dans le bâtiment existant et à rehausser la toiture " par une modification en extension de la coupole existante en charpente métallique tridimensionnelle " ; que la Semec a confié, par un marché du 31 décembre 2004, une mission de maîtrise d'oeuvre complète à un groupement solidaire formé par l'agence Scau, la société RTA aux droits de laquelle vient la société Marseille Architecture Partenaires, la société Coplan Ingénierie aux droits de laquelle vient la société Ginger Ingénierie aux droits de laquelle vient la société Grontmij, bureau d'études, la société Coplan Environnement Conseil, paysagiste et la société Le Five, économiste de la construction ; que la mission de contrôle technique a été attribuée à la Société Cete Apave Sud Europe ; que par un marché du 7 juin 2005, la Semec a confié la réalisation des travaux à un groupement conjoint composé de la société Campenon Bernard Méditerranée, mandataire solidaire, la société Constructions Métalliques Auer, la société Etablissements Pignatta et la société Carrière JP ; que le marché a été passé pour un montant forfaitaire de 10 544 055,60 euros TTC dont 2 423 096 euros TTC pour la société Auer, chargée de réaliser la structure métallique, à savoir la réalisation de la charpente métallique plancher, de la modification de la nappe tridimensionnelle existante, des structures métalliques porteuses des escaliers de secours et de la verrière au droit du monte-charge ; que la société Auer s'est vue notifier par le maître d'ouvrage un décompte général définitif faisant apparaître un solde négatif de 878 299,17 euros TTC ; que la société Auer a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à ce que ledit solde soit établi à un montant positif en sa faveur de 622 338,31 euros TTC ; que le tribunal administratif, par le jugement attaqué du 11 mai 2012, a condamné, d'une part, la société Auer à verser à la Semec et à la commune de Cannes la somme de 172 836,69 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2007 et d'autre part, la société Campenon Bernard Côte d'Azur venant aux droits de la société Campenon Bernard Méditerranée à garantir la commune de Cannes et la Semec à hauteur de 80 % de la somme de 270 819,85 euros TTC ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;

4. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Campenon Bernard Côte d'Azur, appelée en garantie par la commune de Cannes, ait reçu communication de la requête de la société Auer et des mémoires produits par les parties, dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ; qu'ainsi, les premiers juges ont méconnu le caractère contradictoire de la procédure ; que par suite, le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité et doit être annulé dans cette mesure ;

5. Considérant d'autre part, que comme le fait valoir la commune de Cannes, les premiers juges ont omis de statuer sur la fin de non-recevoir opposée aux conclusions de la société Auer au titre des travaux supplémentaires, tirée de la méconnaissance de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales Travaux ; que par suite, le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité et doit être annulé dans cette mesure ;

6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer partiellement l'affaire et de statuer immédiatement sur les conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Cannes contre la société Campenon Bernard Côte d'Azur ainsi que sur les conclusions présentées au titre des travaux supplémentaires par la société Auer devant le tribunal administratif de Nice et de statuer sur les autres conclusions dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel ;

Sur les conclusions dirigées contre la société d'économie mixte pour les événements cannois :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'acte d'engagement signé le 7 juin 2005, que la Semec est intervenue en qualité de maître d'ouvrage délégué, agissant en qualité de mandataire de la commune de Cannes, au nom et pour le compte de cette dernière ; que, par l'effet de la représentation attaché au contrat de mandat, l'administration mandante est responsable envers les personnes qui ont contracté avec le mandataire et qu'elle est seule susceptible de voir sa responsabilité engagée du fait des fautes commises à l'égard du cocontractant dans la passation ou l'exécution du marché ; qu'il s'ensuit que la société Auer a mal dirigé son action en sollicitant la condamnation de la Semec, solidairement avec celle de la commune de Cannes ; que la Semec doit donc être mise hors de cause ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Cannes aux conclusions de la société Auer en ce qui concerne les travaux supplémentaires :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales Travaux : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de (...) quarante-cinq jours dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. Si les réserves sont partielles, l'entrepreneur est lié par son acceptation implicite des éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portent pas " ;

9. Considérant que la commune de Cannes soutient que le mémoire en réclamation du 23 avril 2007 adressé par le groupement d'entreprises n'a pas " produit les justifications nécessaires " exigées par l'article 13.44 précité en ce qui concerne la société Auer et que, dès lors, sa demande est irrecevable ; que toutefois, ce mémoire en réclamation indique les motifs et le montant de la réclamation formulée, repris dans le projet de décompte final de la société ; que par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Cannes à la demande présentée par la société au titre des travaux supplémentaires doit être écartée ;

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance par la société Coplan Ingénierie et la société RTA :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales travaux : " Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable dans les conditions du 4 du présent article " ;

11. Considérant que l'entreprise ou le maître d'oeuvre, condamné à garantir le maître d'ouvrage de la condamnation à indemniser un constructeur dont il a fait l'objet, peut, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il a prononcé cette condamnation à garantir le maître de l'ouvrage, invoquer tous moyens de nature à établir que l'indemnisation du constructeur était injustifiée ; que l'entreprise ou le maître d'oeuvre peut ainsi invoquer à son seul profit et à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné à garantir le maître d'ouvrage, le caractère définitif du décompte de ce constructeur et par suite l'irrecevabilité de sa demande d'indemnisation dirigée contre le maître d'ouvrage ; qu'en revanche, l'entreprise ou le maître d'oeuvre n'est pas recevable à présenter des conclusions tendant à l'annulation de la partie du jugement ayant condamné le maître d'ouvrage à indemniser le tiers constructeur ;

12. Considérant que les sociétés Coplan ingénierie et RTA, tiers au marché de travaux, appelées en garantie par la commune de Cannes en leur qualité de maître d'oeuvre de l'opération, ont invoqué le caractère définitif du décompte dudit marché, la commune de Cannes n'a pas elle-même opposé aux conclusions de la demande de son cocontractant la société Auer une fin de non-recevoir tirée du caractère définitif dudit décompte ; que seule la commune de Cannes, pouvait opposer une fin de non-recevoir de la demande présentée par la société Auer devant le tribunal administratif, tirée des stipulations précitées de l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales travaux ; que les sociétés Coplan Ingénierie et RTA pouvaient seulement faire valoir cette irrecevabilité au soutien de leurs conclusions tendant au rejet de l'appel en garantie ;

Sur les demandes indemnitaires de la société Auer :

En ce qui concerne les travaux de mise en conformité de la charpente (134 846 euros HT) :

13. Considérant que dans le cadre d'un marché à prix global et forfaitaire, l'entreprise titulaire dudit marché n'est fondée à réclamer un supplément de prix au maître d'ouvrage que pour autant qu'elle justifie qu'elle a effectué des travaux non prévus au marché, sur ordre de service, ou que ces travaux présentent un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art et ce quel qu'en soit le montant ; que le caractère forfaitaire du marché en litige ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la destination conforme de l'ouvrage, et alors même que ces travaux supplémentaires n'auraient pas bouleversé l'économie du contrat et n'auraient pas été imprévisibles ;

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que le 11 octobre 2005, il est constaté que la toiture dépassait la cote maximum de 15 NGF, autorisée par les règlements d'urbanisme et repris par le cahier des clauses techniques particulières ; qu'après la découverte de l'erreur d'altimétrie de la toiture, le maître d'ouvrage a décidé de modifier la toiture afin de ne pas diminuer la hauteur libre sous celle-ci ; qu'un faux plafond prévu a été supprimé, ce qui a eu des conséquences en matière de performance acoustique ; que cette modification, qui a substantiellement transformé l'ouvrage prévu au marché en dehors de tout avenant, a consisté à remplacer la coupole hémisphérique prévue au marché par une coupole brisée, l'extension de la toiture n'étant plus réalisée dans le prolongement de la coupole existante mais horizontalement ;

15. Considérant que cette demande du maître d'ouvrage de modifier la toiture, alors que la hauteur libre n'avait pas de valeur contractuelle et que le problème du dépassement de la cote NGF aurait pu se résoudre par un abaissement de la toiture de 20 cm, a donné lieu à des modifications architecturales de la charpente imputable indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; que ces travaux ont entraîné un surcoût pour un montant, non contesté, de 134 846 euros HT, soit 161 275,81 euros TTC ; que la société Auer a droit au versement de cette somme par le maître d'ouvrage ;

16. Considérant que contrairement à ce que soutient la commune de Cannes, la société Auer n'est pas, pour partie, responsable de l'erreur d'altimétrie de la toiture ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que Coplan Ingéniérie, membre du groupement de maîtrise d'oeuvre, a réalisé des plans d'exécution de la charpente métallique prévoyant une hauteur de la charpente à 15,144 NGF ; que ces plans n'étaient pas conformes au cahier des clauses techniques particulières qui fixait une côte maximum de 15 NGF ; que la société Auer, membre du groupement conjoint en tant que sous-traitant chargé de réaliser la charpente, a établi des plans d'atelier conformes au plan d'exécution de Coplan mais, elle les a réalisés à une hauteur supérieure à celle qu'ils comportaient (15,38 NGF contre 15,144 NGF pour les plans de Coplan Ingénierie) ; qu'ainsi que le relève l'expert, Coplan Ingénierie a produit des plans d'exécution conduisant à dépasser cette côte altimétrique, a visé les plans de son sous-traitant IEC et n'a pas vérifié en cours de montage l'altitude atteinte par les ouvrages ; qu'il s'ensuit que Coplan Ingéniérie est responsable du dépassement de la cote NGF de 15 m du fait de ses erreurs de conception et de son défaut de surveillance de l'entreprise chargée de la charpente ;

En ce qui concerne les travaux non prévus contractuellement et l'augmentation de la durée du chantier (226 438 euros HT) :

17. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure celle-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique, mais pas du seul fait de fautes commises par d'autres intervenants ;

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que les travaux en litige étaient prévus selon une méthodologie initiale d'exécution contraignante ; que devait être réalisée la dalle du niveau 1 à l'abri de la toiture existante surélevée et agrandie de façon à assurer la mise hors d'eau du niveau rez-de-chaussée où se tenaient les manifestations pendant les travaux ; que cette méthodologie avait été acceptée par la société Campenon Bernard Côte d'Azur qui avait assorti son offre d'une notice exposant l'organisation du chantier propre à la respecter ; que toutefois, la société Campenon Bernard Côte d'Azur a proposé une modification de la méthodologie d'exécution consistant à inverser les deux phases à savoir, la démolition préalable de la dalle béton du niveau 1, avant le surélèvement de la toiture ; que ce changement de méthodologie dans la réalisation des travaux a eu des conséquences sur l'étanchéité du bâtiment, dont une partie s'est retrouvée à découvert durant les travaux, et sur le planning des travaux ; qu'ainsi, les dispositions prises par la société Campenon Bernard Côte d'Azur n'ont pas permis d'assurer l'étanchéité du rez-de-chaussée du bâtiment ; que toutefois, les difficultés rencontrées par la société Auer, dans l'exécution du marché, en raison de ces inondations, sont imputables à la société Campenon Bernard Côte d'Azur et n'ouvrent aucun droit à indemnité à la charge de la commune de Cannes ; que par ailleurs, le montant sollicité à ce titre s'élève à 169 558 euros HT ; que cette somme qui représente environ 8,37 % du montant total du marché (2 026 000 euros HT), n'a pas entraîné un bouleversement de l'économie du contrat ;

19. Considérant, en outre, que la société Auer n'apporte aucun élément de nature à la faire regarder comme ayant rencontré, dans l'exécution du marché en litige des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat ;

20. Considérant qu'une dépense de 56 880 euros HT a été exposée par la société Auer pour l'adaptation du planning avec le renforcement des équipes afin de rattraper le retard pris du fait de l'arrêt des travaux entre le 11 octobre 2005, date de la découverte du dépassement de la cote NGF, et le 16 décembre 2005, date de la production de plans de la toiture validés par le bureau de contrôle ; que ce retard résulte de l'erreur d'altimétrie et de la volonté du maître d'ouvrage de modifier sensiblement la toiture prévue au marché afin de ne pas perdre de hauteur libre sous plafond et du délai pour produire de nouveaux plans validés ; que les conséquences du retard lié à l'erreur d'altimétrie, imputable au maître d'oeuvre, n'ouvrent aucun droit à indemnité à la charge de la commune de Cannes ; que seules les conséquences du retard lié à la reconfiguration de la toiture doivent être mises à la charge du maître d'ouvrage ; que la société Auer sollicite une somme de 56 880 euros HT, soit 68 028,48 euros TTC ; qu'il sera fait une juste appréciation en évaluant à 15 000 euros HT la somme à mettre à la charge du maître d'ouvrage ;

21. Considérant que si la société Auer demande, par ailleurs, une somme de 53 375,50 euros au titre de la réalisation de certains travaux supplémentaires, elle n'assortit sa demande indemnitaire d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'une somme de 15 000 euros HT, soit 17 940 euros TTC, doit être mise à la charge de la commune de Cannes au titre de l'augmentation de la durée du chantier ;

Sur la somme mise à la charge de la société Auer dans le décompte général au titre de la réparation du sinistre " plancher " (707 674,54 euros) :

23. Considérant, d'une part, que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement prévue au contrat, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu'ainsi, la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif ; qu'en outre, en l'absence de stipulations particulières prévues par les documents contractuels, lorsque la réception est prononcée avec réserves, les rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs se poursuivent au titre des travaux ou des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet des réserves ;

24. Considérant, d'autre part, que l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché public de travaux est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l'établissement du décompte définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les sommes exposées par la commune de Cannes, au titre de la réalisation des travaux de confortement du plancher réalisés à la suite d'un dommage relevant de la garantie de parfait achèvement, dont elle impute la responsabilité à la société Auer, ont été inscrites au passif du décompte général de la société ; que le maître d'ouvrage pouvait, lors de l'établissement du décompte du marché, faire état de ces sommes qui constituent un des éléments du décompte général du marché passé avec cette société, alors même que le sinistre est intervenu après la réception de l'ouvrage ;

26. Considérant qu'aux termes de l'article 3.4.6 du cahier des clauses techniques particulières : " Platelage bois : - platelage en panneaux de particules dérivés du bois suivant NFP 63.203.1 référence DTU 51.3, classement M1 à haute densité épaisseur 38 mm environ, assemblage par rainures et languettes posés à joint décalés sur la structure métallique et bandes résilientes de désolidarisation. Ce plancher est prévu pour supporter la surcharge de 500 daN/m² et les charges roulantes de poinçonnement de 1500 daN sur 2 roues. Ces panneaux sont prévus pour supporter tous revêtements additionnels. La stabilité au feu suivant la norme EN 13501.1 : 2002, soit résistance au feu d'environ 1 heure. - Fixations mécaniques type crapautage pour absorber les variations thermiques. Localisation sur l'ensemble du plancher haut du rez-de-chaussée " ;

27. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux de pose du plancher de la salle R+1 de l'extension du palais des congrès de Cannes ont été réalisés, par la société Auer, entre le 16 décembre 2005 et la fin du mois de février 2006 ; que la réception de l'ouvrage est intervenue le 18 avril 2006 ; qu'en avril 2006, le plancher du rez-de-chaussée a été perforé par les roues d'un transpalette durant les travaux de préparation du festival international du film ; que le maître d'ouvrage a profité d'une période libre du Palais des Festivals pour faire réaliser des travaux de confortement après un appel d'offres pour un montant de 707 674,54 euros HT (846 378,75 euros TTC), soit 10 812 euros d'essais avant renforcement, 655 465 euros pour le marché de renforcement, 30 500 euros de maîtrise d'oeuvre, 6 577,54 euros de frais de publicité de l'avis de mise à concurrence et 4 320 euros au titre de la mission de contrôle technique ; que la solution mise en oeuvre par le maître d'ouvrage pour le confortement du plancher a permis une intervention rapide, sans entraver l'exploitation du palais des congrès et en évitant une démolition du plancher au prix d'une diminution de la résistance dudit plancher qui n'admet qu'une charge de poinçonnement de 750 daN et non de 1500 comme prévu au cahier des clauses techniques particulières ; que le maître d'ouvrage a imputé, dans le décompte général, le coût de ces travaux à l'entreprise Auer chargée du platelage bois ;

28. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le transpalette dont les galets ont perforé le plancher avait une charge inférieure aux 1500 daN sur deux roues prévue au cahier des clauses techniques particulières ; que toutefois, l'épaisseur du plancher fixée à 38 mm par le cahier des clauses techniques particulières était insuffisante pour permettre audit plancher de présenter la résistance souhaitée ; que selon l'expert, les panneaux fournis par la société Belipa ne sont pas adaptés à l'usage qui devait en être fait puisqu'ils ne pouvaient pas supporter une charge roulante de 1500 daN ainsi que l'exige le cahier des clauses techniques particulières ; que la société Auer, qui ne s'est pas assurée de l'adéquation entre les matériaux prescrits par le cahier des clauses techniques particulières et la résistance souhaitée par ledit cahier des clauses techniques particulières, a failli à la mission de conseil auprès du maître d'ouvrage qui incombe à tout homme de l'art ; que toutefois, l'expert précise que si la société Auer est responsable de l'adéquation entre l'ouvrage livré et sa destination, il relève également une succession d'erreurs concernant la conception de l'ouvrage et notamment que le cahier des clauses techniques particulières est " mal rédigé et imprécis en ce qui concerne les charges de poinçonnement tout en se montrant directif : utilisation de panneaux dérivés de bois avec une épaisseur fixée à 38 mm (même précisé "environ" car le problème de hauteur de faîtage de l'immeuble limitait l'épaisseur du plancher) " ; que l'expert précise que le maître d'oeuvre et le bureau de contrôle étaient chargés du contrôle de l'exécution et de la surveillance des travaux et qu'ils n'ont pas " détecté l'inadéquation du panneau " avec la note de calculs, établie par la société Belipa et produite par la société Auer ; qu'ainsi, eu égard aux manquements de la maîtrise d'oeuvre et en tenant compte de la plus-value qui résulte de la réalisation des travaux de confortement du plancher, il sera fait une juste appréciation de la somme à mettre à la charge de la société Auer en la fixant à 400 000 euros TTC ; qu'il s'ensuit que le maître d'ouvrage est seulement fondé à appliquer à la société Auer une réfaction de 400 000 euros TTC dans le décompte général ;

Sur les pénalités de retard :

29. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour la période courant d'octobre à décembre 2005, les retards dans l'exécution des travaux ont résulté de la conjonction de deux faits : les infiltrations au rez-de-chaussée en octobre 2005 conduisant le maître d'ouvrage à produire un ordre de service d'arrêt des travaux pour intempéries du 19 octobre au 20 novembre 2005 et le constat du dépassement de niveau de la toiture entraînant une modification profonde de cette toiture entraînant une interruption des travaux du 11 octobre au 16 décembre 2005 ; qu'en raison du dépassement d'altimétrie de la toiture, et indépendamment de tout changement de méthodologie dans l'exécution des travaux opéré par la société Campenon Bernard Côte d'Azur, les travaux ont été interrompus sur la toiture pendant 66 jours ; que cette période d'arrêt n'est pas cumulable avec l'arrêt des travaux, pour intempéries, du 19 octobre au 20 novembre 2005 ; que si la commune de Cannes soutient qu'en raison du changement de méthodologie d'exécution, les travaux auraient dû être interrompus, l'expert relève " qu'il n'est pas assuré que la modification de la méthodologie proposée par l'entreprise et acceptée par le maître d'oeuvre ait pu conduire à elle seule à un décalage du planning avec arrêts pour inondation " ; qu'en revanche, il est certain que l'erreur de conception des plans d'exécution de la hauteur de la toiture aurait conduit à elle seule et indépendamment de tout autre événement, à une interruption des travaux ; que par ailleurs, la commune de Cannes soutient que de ces 66 jours doivent être déduits 21 jours correspondant au retard de la société Campenon Bernard Côte d'Azur dans l'exécution des travaux antérieurement à octobre 2005 ; que toutefois, pour cette période, l'expert relève que " le chantier se déroule normalement avec les aléas inévitables à ce type de travail dans un établissement en fonctionnement " ; que le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre tiennent compte des difficultés pour l'entreprise ; que selon le compte rendu de chantier du 30 août 2005, le maître d'oeuvre reporte la livraison au 27 février 2006 pour tenir compte des sujétions d'exécution ; qu'il ressort de ce même compte rendu de chantier que les entreprises ont été confrontées à une impossibilité d'installation et de circulation côté Sud, côté port de Cannes, et à une réduction de l'utilisation de la grue mobile côté nord (Croisette) et une obligation de grutage de nuit par grues mobiles : la " Semec a confirmé que pour les livraisons R+1 par grue mobile, l'accès port ne pourra être utilisé avant le 30/0905. Tout devra être livré côté plage jusqu'à cette date. Dès que les installations du salon de la plaisance seront montées, Semec verra avec le Port où et comment pourront être faites quelques livraisons de nuit " ; que ces contraintes n'étaient pas prévues au marché ; qu'il en résulte que la commune de Cannes n'est pas fondée à solliciter une déduction de 21 jours sur les 66 jours devant être retenus au titre d'un report d'exécution des travaux pour l'erreur d'altimétrie de la toiture ; qu'en revanche, la commune est fondée à soutenir que les stipulations de l'article 4.1 de l'acte d'engagement prévoyaient des interruptions de travaux pour permettre le déroulement des manifestations prévues et que pendant ces interruptions, et indépendamment de toute autre cause d'interruption du chantier, les sociétés auraient dû suspendre l'activité de chantier ; que ces interruptions prévues sont d'une durée totale de 19 jours qui doivent être déduits des 66 jours retenus au titre du report d'exécution des travaux en raison de l'erreur d'altimétrie de la toiture ;

30. Considérant que par ailleurs, l'expert retient également une période d'interruption des travaux pendant 23 jours pour les salons du MIDEM, du 16 au 30 janvier 2006, et du MIPIM en mars 2006 durant 9 jours ; que ces salons ne faisaient pas partie des manifestations contractuellement prévues et ouvrent donc droit à une prolongation du délai d'exécution de la même durée ;

31. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'un report de délai pour l'exécution des travaux peut être accordé au groupement d'entreprises pour un total de 70 jours, soit 66 jours au titre de l'erreur d'altimétrie de la toiture moins 19 jours au titre des interruptions de travaux contractuellement prévues, et 23 jours au titre de l'organisation par la Semec de salons supplémentaires non contractuellement prévus ;

32. Considérant qu'en application des stipulations de l'article 4.3.1 du cahier des clauses administratives particulières, des pénalités de retard ont été infligées au groupement d'entreprises calculées sur une période de 88 jours ; que pour la société Auer, la maîtrise d'ouvrage a retenu 255 797,90 euros TTC ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment, que le retard de chantier résulte de l'erreur d'altimétrie de la toiture et des manifestations supplémentaires organisées par la Semec dans le Palais des Festivals et n'est donc pas imputable à la société Auer ; que toutefois, le report de délai pour l'exécution des travaux qui peut être accordé au groupement d'entreprises s'élève à un total de 70 jours ; qu'il s'ensuit que seules des pénalités de retard pour 18 jours peuvent être infligées à la société Auer, soit la somme de 52 322,30 euros TTC ; que la société Auer est seulement fondée à solliciter la décharge du surplus, soit la somme de 203 475,60 euros TTC ;

Sur le solde du marché :

33. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la personne responsable du marché, par ordre de service n° 5/08-81, du 7 mars 2007, a arrêté le décompte général et définitif du marché ; que le montant dû par le groupement d'entreprises est arrêté à 271 903,73 euros ; que le solde par cotraitant est établi comme suit : solde à payer à la société Campenon Bernard Côte d'Azur : 136 143,16 euros TTC, solde négatif à la charge de la société Auer : - 878 299,17 euros TTC, solde à payer à la société Carrière JP : 48 312,41 TTC (et à son sous-traitant Comptoir de la Gaine : 23 920 euros TTC) et solde à payer à la société Etablissements Pignatta : 398 019,87 euros TTC ; que la société Auer n'a pas réglé la somme restant à sa charge selon le décompte général ;

34. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la somme restant à la charge de la société Auer s'élève à 95 607,76 euros TTC (- 878 299,17 euros + 161 275,81 euros, somme due par le maître d'ouvrage au titre de l'erreur d'altimétrie de la toiture ; + 17 940 euros, somme due par le maître d'ouvrage au titre des frais supplémentaires dus au prolongement du chantier ; + 203 475,60 euros, somme due par le maître d'ouvrage au titre des pénalités de retard non justifiées + 400 000 euros au titre du sinistre plancher), dans les mêmes conditions d'intérêts que celles prévues au jugement attaqué ;

Sur les conclusions d'appel en garantie :

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Campenon Bernard Côte d'Azur :

35. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'aucune somme n'est mise à la charge de la commune de Cannes au titre du changement de méthodologie et des inondations en résultant ; que par suite, les conclusions d'appel en garantie de la commune de Cannes dirigées contre cette société ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie dirigées contre les sociétés Ginger Ingénierie, Marseille Architecture Partenaires et Scau :

36. Considérant que la modification architecturale de la toiture est la conséquence de l'erreur d'altimétrie imputable à la maîtrise d'oeuvre et résulte d'un choix de la maîtrise d'ouvrage qui a voulu maintenir la hauteur libre sous plafond ;

37. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la maîtrise d'oeuvre a réalisé des plans d'exécution de la toiture non conformes au cahier des clauses techniques particulières en ce qu'ils prévoyaient un point culminant de la toiture à la cote à 15,144 NGF alors que le cahier des clauses techniques particulières fixait la hauteur maximum à la cote 15 NGF ; que si la société Auer, membre du groupement solidaire en tant que sous-traitant, a réalisé des plans d'atelier portant la toiture à 15,38 NGF, ces plans d'atelier étaient, compte tenu des caractéristiques des matériaux, conformes aux plans de la maîtrise d'oeuvre ; que la maîtrise d'oeuvre a donc engagé sa responsabilité en raison d'une erreur de conception et d'un défaut de surveillance des entreprises, manquements qui ont conduit au dépassement de la cote 15 NGF, prévue contractuellement, et à une prolongation de la durée du chantier ; que, par ailleurs, les sociétés Ginger Ingénierie et Marseille Architecture Partenaires ne peuvent utilement invoquer l'absence de dépassement du taux de tolérance prévu au marché dès lors qu'il n'a ni pour objet, ni pour effet, de dispenser le maître d'oeuvre de supporter les conséquences de ses actes et notamment de le dégager de sa responsabilité lorsque les fautes qu'il a commises ont eu pour effet de rendre plus onéreuse l'opération qui lui a été confiée ;

38. Considérant qu'il résulte également de l'instruction que la Semec a décidé de modifier la toiture prévue au marché alors que les conséquences de l'erreur d'altimétrie auraient été moindres si la maîtrise d'ouvrage avait accepté un abaissement de la hauteur sous plafond du bâtiment et de descendre la structure de 20 cm, ce que le bureau d'études IEC et la société Auer avaient anticipé par les trous de réglage sur les poteaux et que les entreprises étaient prêtes à mettre en oeuvre ; que la maîtrise d'ouvrage a préféré s'engager sur la voie plus longue et plus coûteuse d'une reconfiguration de la toiture ; que dans ces conditions, et alors même que Coplan Ingénierie ne l'a pas suffisamment informée des conséquences financières résultant du choix de modifier la toiture et a manqué à son devoir de conseil, il y a lieu de mettre 80 % de la somme de 161 275,81 euros TTC à la charge des sociétés Ginger Ingénierie, Marseille Architecture Partenaires et Scau ;

39. Considérant que la société Scau, qui avait une mission de conception de l'ensemble de l'ouvrage, demande à être mise hors de cause ; que toutefois, il résulte de l'instruction que le groupement de maîtrise d'oeuvre est un groupement solidaire ; qu'aucune répartition des tâches entre les membres de la maîtrise d'oeuvre n'est mentionnée dans l'acte d'engagement ou dans un document contre signé par le maître d'ouvrage ; que par suite, la société Scau ne peut utilement soutenir que sa responsabilité n'est pas engagée solidairement et demander sa mise hors de cause ;

40. Considérant, enfin, que les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Scau et dirigées contre les sociétés Ginger Ingénierie, Marseille Architecture Partenaires sont nouvelles en appel et doivent, par suite, être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

41. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 11 mai 2012 est annulé en tant qu'il concerne les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Campenon Bernard Côte d'Azur et en tant qu'il concerne les conclusions présentées par la société Auer au titre des travaux supplémentaires.

Article 2 : La somme de 172 836,69 euros (cent soixante-douze mille huit cent trente-six euros et soixante-neuf centimes) TTC que le tribunal administratif a mise à la charge de la société Auer due à la commune de Cannes doit être ramenée à 95 607,76 euros (quatre-vingt-quinze mille six cent sept euros et soixante-seize centimes) TTC, dans les mêmes conditions d'intérêts que celles prévues audit jugement.

Article 3 : Les sociétés Ginger Ingénierie, Marseille Architecture Partenaires et Scau sont condamnées à garantir la commune de Cannes à hauteur de 80 % de la somme de 176 161 275,81 euros (cent soixante-seize millions cent soixante et un mille deux cent soixante-quinze euros et quatre-vingt-un centimes) TTC.

Article 4 : La Semec est mise hors de cause.

Article 5 : Le surplus du jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par la société Auer devant le tribunal administratif et devant la cour est rejeté.

Article 7 : Le surplus des conclusions présentées par la commune de Cannes est rejeté.

Article 8 : Les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Scau sont rejetées.

Article 9 : Les conclusions présentées par les parties au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à la société Campenon Bernard Côte d'Azur, à la commune de Cannes, à la société d'économie mixte pour les événements cannois, à la société Scau, à la société Grontmij, venant aux droits de la société Ginger Ingénierie, venant elle-même aux droits de la société Coplan Ingénierie, à la société Marseille Architecture Partenaires venant aux droits de la société RTA et à la société Auer.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2015, où siégeaient :

- M. Guerrive, président,

- M. Thiele, premier conseiller,

- Mme Carotenuto, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 juin 2015.

''

''

''

''

2

Nos 12MA03629 et 12MA03638


Type d'affaire : Administrative

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés - Décompte général et définitif.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : SELARL MOLAS ET ASSOCIES ; LLORENS ; SELARL MOLAS ET ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 22/06/2015
Date de l'import : 06/08/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12MA03629
Numéro NOR : CETATEXT000030944923 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-22;12ma03629 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award