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01/02/2016 | FRANCE | N°14MA02191

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 01 février 2016, 14MA02191


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société R2C a demandé à titre principal au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Forcalquier à lui verser la somme de 84 669,34 euros TTC au titre de l'enrichissement sans cause et la somme de 54 290,29 euros en réparation de son préjudice, ces sommes étant assorties des intérêts à compter du 25 juillet 2001 et les intérêts étant capitalisés.

Par un jugement n° 0800343 du 4 mars 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure d

evant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 mai 2014 et le 3 novembre 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société R2C a demandé à titre principal au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Forcalquier à lui verser la somme de 84 669,34 euros TTC au titre de l'enrichissement sans cause et la somme de 54 290,29 euros en réparation de son préjudice, ces sommes étant assorties des intérêts à compter du 25 juillet 2001 et les intérêts étant capitalisés.

Par un jugement n° 0800343 du 4 mars 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 mai 2014 et le 3 novembre 2015, la société R2C, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 mars 2014 ;

2°) de condamner la commune de Forcalquier à lui verser la somme de 84 669,34 euros TTC au titre de l'enrichissement sans cause, cette somme étant assortie des intérêts à compter du 25 juillet 2001 et les intérêts étant capitalisés ;

3°) de condamner la commune de Forcalquier à lui verser la somme de 54 290,29 euros en réparation du préjudice résultant des fautes commises par la commune, cette somme portant intérêts à compter du 25 juillet 2001 et les intérêts étant capitalisés ;

4°) de condamner la commune de Forcalquier à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels devront inclure les frais d'expertise taxés à la somme de 10 146,57 euros TTC.

Elle soutient que :

S'agissant de la recevabilité de sa demande :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, sa demande est recevable ; en effet, les dispositions de l'article 1690 du code civil ne s'appliquent pas à l'acte de cession de créance conclu le 23 avril 2002 entre les sociétés SA Bec Construction et SAS Bec Constructions, ancienne dénomination de la société R2C, dès lors que le tribunal de commerce de Montpellier a arrêté par jugement le plan de cession de la société Bec Construction et a rendu cette cession opposable à tous ;

- à titre subsidiaire, le défaut de notification de l'acte de cession ne rend pas le cessionnaire irrecevable à réclamer au débiteur cédé l'exécution de son obligation ;

- à titre plus subsidiaire, en application des dispositions combinées de l'alinéa 2 de l'article 1690 du code civil et de l'article 457 du code de procédure civile , la circonstance qu'il a été fait droit par ordonnance du 22 décembre 2002 à la demande d'expertise formée par la société Bec Constructions justifie la recevabilité de son action en qualité de cessionnaire de créances dirigée contre la commune ;

- elle justifie avoir signifié le 12 mai 2014 à la commune de Forcalquier la cession de créance intervenue à son profit ;

Sur l'enrichissement sans cause :

- elle est fondée à réclamer le remboursement des dépenses qui ont été utiles à la commune de Forcalquier ;

- compte tenu du montant des dépenses arrêté par l'expert et des sommes déjà versées par la commune, celle-ci lui est redevable d'une somme de 84 669,34 euros TTC ;

Sur le préjudice résultant de la faute commise par la commune :

- la commune de Forcalquier a commis une double faute constituée par des manquements lors de la procédure d'appel d'offres et par des manoeuvres destinées à faire croire à ses cocontractants qu'elle respecterait ses engagements ;

- elle a été privée d'une marge nette s'élevant à 3 % du montant hors taxe du marché.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2015, la commune de Forcalquier conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société R2C à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société R2C ne sont pas fondés.

Par courrier du 2 juillet 2015, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et de la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 29 septembre 2015, la clôture d'instruction a été prononcée immédiatement.

Par ordonnance du 5 novembre 2015, l'instruction a été rouverte.

Par ordonnance du 5 novembre 2015, la clôture d'instruction a été prononcée au 1er décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de procédure civile ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la société R2C, et de Me A... représentant la commune de Forcalquier.

Une note en délibéré présentée pour la société R2C a été enregistrée le 19 janvier 2016.

1. Considérant que la société R2C, ancienne dénomination de la société SAS Bec Constructions, relève appel du jugement du 4 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Forcalquier au titre de l'enrichissement sans cause et de la responsabilité quasi-délictuelle par suite de l'annulation du marché de construction de l'espace culturel " Bonne Fontaine " ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité de la société R2C :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1690 du code civil : " Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur./ Néanmoins le cessionnaire peut être également saisi par l'acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique. " ;

3. Considérant que la société Bec Construction, titulaire du marché conclu le 22 juin 2000 avec la commune de Forcalquier, a fait l'objet le 7 janvier 2002 d'une procédure de redressement judiciaire ; que par jugement du 8 mars 2002 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 10 avril 2002, le tribunal de commerce de Montpellier a ordonné la cession de cette société au profit de la société Fayat-Genest avec clause de substitution au profit de trois structures juridiques distinctes à constituer ; que la SAS Bec Constructions a été substituée comme cessionnaire des créances de la société Bec Construction, cette cession de créances étant formalisée par un acte du 23 avril 2002 conclu sous seing privé ; que la société R2C, nouvelle dénomination de la SAS Bec Constructions depuis le 21 juillet 2006, soutient que l'absence de signification de l'acte de cession de créance du 23 avril 2002 à la commune de Forcalquier, qu'elle a finalement notifié à la commune le 12 mai 2014, postérieurement au jugement critiqué, ne pouvait lui être opposée par les premiers juges ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 621-65 du code de commerce, dans sa rédaction applicable : " Le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions opposables à tous (...) " ; que ces dispositions doivent s'entendre comme rendant le plan de redressement opposable à toutes les personnes directement concernées par ce dernier et non à l'ensemble des tiers ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des termes du jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 7 janvier 2002 prononçant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Bec Construction ni du jugement du même tribunal du 8 mars 2002 et de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 10 avril 2002 que le projet de reprise de la société Bec Construction prévoyait la cession des créances de cette société à la SAS Bec Constructions ; qu'ainsi qu'il a été dit, l'acte de cession de créance entre la société Bec Construction et la SAS Bec Constructions a été établi sous seing privé ; que, par suite, la société R2C n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions susmentionnées du code de commerce pour soutenir qu'elle n'était pas tenue de procéder à la signification de l'acte de cession de créance auprès de la commune de Forcalquier ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les premiers juges n'étaient pas tenus, dès lors qu'il est constant que l'acte de cession de créance n'avait pas alors été signifié à la commune de Forcalquier, de rechercher si l'exécution de cette obligation était susceptible de faire grief à un droit advenu depuis la naissance de cette créance à la commune ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'à défaut de respect des formalités prescrites par l'article 1690 du code civil, la simple connaissance par le débiteur cédé de la cession de créance ne suffit pas à la lui rendre opposable, sauf si le débiteur cédé l'a acceptée de façon certaine et non équivoque ; que si la SAS Bec Constructions a fait valoir lors de sa demande d'expertise qu'elle disposait d'une créance sur la commune de Forcalquier, il ressort des mentions portées sur l'ordonnance du 22 décembre 2002 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille statuant sur cette demande que la commune de Forcalquier a contesté " être débitrice d'une quelconque indemnité à l'égard de la société requérante " et a indiqué que " rien ne prouve que la société Bec Constructions SAS soit titulaire d'une cession valide de la créance de la société Bec Construction SA " ; que la commune de Forcalquier ne saurait donc être regardée comme ayant accepté de façon certaine et non équivoque cette cession de créance, quand bien même elle n'a pas relevé appel de l'ordonnance du 22 décembre 2002 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société R2C n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande à fin d'indemnité ;

Sur les conclusions à fin de condamnation de la commune de Forcalquier aux dépens :

8. Considérant que les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions de la société R2C tendant à ce que les frais de l'expertise ordonnée le 22 décembre 2002 soient mis à la charge de la commune de Forcalquier ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement dans cette mesure et de statuer, par la voie de l'évocation, sur les dites conclusions ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./ Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) " ;

10. Considérant que les conclusions de la société R2C ne peuvent qu'être rejetées, la commune de Forcalquier n'étant pas la partie perdante dans la présente instance et aucune circonstance particulière ne justifiant que les frais d'expertise soient mis à sa charge ou partagés entre les parties ;

11. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge définitive de la société R2C, nouvelle dénomination de la SAS Bec Constructions, les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 10 146,57 euros TTC et mis à la charge de cette dernière par l'ordonnance n° 0205680 du 2 juillet 2007 du président du tribunal administratif de Marseille ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société R2C, partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la commune de Forcalquier et de condamner la société R2C à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0800343 du 4 mars 2014 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions de la société R2C tendant à la condamnation de la commune de Forcalquier aux dépens.

Article 2 : Les conclusions de la demande de la société R2C présentées devant le tribunal administratif de Marseille et tendant à la condamnation de la commune de Forcalquier aux dépens sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société R2C est rejeté.

Article 4 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 10 146,57 euros (dix mille cent quarante-six euros et cinquante-sept centimes) TTC par ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 2 juillet 2007 sont mis à la charge définitive de la société R2C.

Article 5 : La société R2C versera la somme de 2 000 (deux mille) euros à la commune de Forcalquier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la commune de Forcalquier est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société R2C et à la commune de Forcalquier.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er février 2016.

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N° 14MA02191


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : BALIQUE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 01/02/2016
Date de l'import : 12/02/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14MA02191
Numéro NOR : CETATEXT000031978109 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-01;14ma02191 ?
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