La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2016 | FRANCE | N°14MA03666

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 02 février 2016, 14MA03666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement.

Par un jugement n° 1401945 du 8 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A... B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistr

ée le 18 août 2014, M. E...A...B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement.

Par un jugement n° 1401945 du 8 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A... B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 août 2014, M. E...A...B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 juillet 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 janvier 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de séjour est insuffisamment motivé ;

- le droit d'être entendu et le principe général du contradictoire n'ont pas été respectés par l'administration ;

- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne lui a pas été communiqué ;

- le préfet, qui s'est volontairement placé en situation de compétence liée au regard de l'avis du médecin de l'administration en refusant au demandeur la possibilité de lui fournir des éléments sur son état de santé, a dénaturé le secret médical et entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant la demande de titre de séjour au titre de l'état de santé, eu égard aux graves conséquences du défaut de soins et à l'absence du traitement approprié en République Démocratique du Congo ;

- pour la même raison, une obligation de quitter le territoire français ne pouvait lui être opposée ;

- il ne pouvait être renvoyé dans son pays d'origine compte tenu des risques qu'il y encourt.

M. A... B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 septembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-congolais du 25 octobre 2007 relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chanon, premier conseiller.

1. Considérant que, par jugement du 8 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A... B..., de nationalité congolaise, tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement ; que M. A... B...relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; que l'article R. 313-22 de ce code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...). L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que le refus de séjour comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, l'étranger qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient en particulier, lorsqu'il fonde sa demande sur son état de santé, d'inclure dans son dossier le rapport médical prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier, mentionnant si une prise en charge médicale est nécessaire, les conséquences d'un défaut de soins et la possibilité d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ; qu'il est loisible à celui-ci, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le secret médical ne fait pas obstacle à ce que ce dernier remette sous pli confidentiel au médecin de l'agence régionale de santé, outre le rapport médical lui-même, toutes les pièces qu'il juge utiles ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé doit être transmis au demandeur avant que le préfet ne prenne sa décision ; que, dès lors, en respectant le secret médical et en ne transmettant pas l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet des Bouches-du-Rhône ne peut être regardé comme ayant privé M. A... B...de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ou comme ayant méconnu le principe du contradictoire ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'en précisant, dans le formulaire remis aux étrangers déposant une demande de titre de séjour sur le fondement de leur état de santé, qu'" aucun document contenant des informations médicales personnelles ne doit être remis aux services de la préfecture ", le préfet n'a pas dénaturé le secret médical mais l'a au contraire protégé ; qu'il appartenait à M. A... B..., s'il entendait lever ce secret médical, de l'indiquer expressément au moment de la remise de son dossier, alors au demeurant que le personnel administratif chargé de l'instruction de la demande ne peut se prononcer sans l'avis préalable du médecin de l'agence régionale de santé ; que, dans ces conditions, le préfet ne s'est pas, de ce seul fait, placé en situation de compétence liée au regard de l'avis du médecin de l'administration et n'a pas, compte tenu en outre des autres éléments qu'il a pris en compte, entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M. A... B... ;

6. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que le préfet a estimé, suivant en cela l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner pour M. A... B...des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié existait dans le pays d'origine de l'intéressé ; que, si le rapport du médecin agréé, établi le 20 novembre 2013 en vue de la demande de titre de séjour, mentionne que M. A... B...soufre d'une dépression post-traumatique récente, assez profonde mais sans trouble associé, et que l'absence de tout traitement aurait de graves conséquences en " prolongeant la dépression certainement pendant plusieurs années ", il ne se prononce pas sur la possibilité de soins au Congo ; qu'aucun autre certificat médical versé au débat n'apporte d'élément sur ce point ; que, si le requérant soutient que les médicaments précis qui lui étaient alors prescrits en France ne figurent pas sur la " liste nationale des médicaments essentiels " du ministère de la santé publique de la République Démocratique du Congo, il ne démontre pas que cette liste ne comporterait pas des molécules équivalentes et ne contredit pas ainsi l'avis du médecin de l'administration ; que les certificats médicaux produits n'indiquent pas, en tout état de cause, qu'une psychothérapie serait nécessaire ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que M. A... B...ne peut se prévaloir de son état de santé pour contester la mesure d'éloignement ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

8. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements inhumains ou dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant que, par décision du 20 décembre 2013, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours juridictionnel formé par M. A... B...à l'encontre de la décision du 30 mai 2013 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile présentée par l'intéressé ; que les pièces communiquées dans l'instance sont insuffisamment probantes pour établir les violences alléguées, qui auraient été subies lors de manifestations de l'opposition au pouvoir politique en place, et les risques personnellement encourus par M. A... B...en cas de retour au Congo ; que, par conséquent, l'appelant ne peut se prévaloir de la violation des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Chanon, premier conseiller,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 2 février 2016.

''

''

''

''

N° 14MA03666 5

sm


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CHARTIER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 02/02/2016
Date de l'import : 13/02/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14MA03666
Numéro NOR : CETATEXT000031981097 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-02;14ma03666 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award