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26/06/2014 | FRANCE | N°13NC02185

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 26 juin 2014, 13NC02185


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 octobre 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant ...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300763 en date du 12 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 mars 2013 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoin

dre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour dans les plus brefs délais et à tout...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 octobre 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant ...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300763 en date du 12 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 mars 2013 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour dans les plus brefs délais et à tout le moins de réexaminer sa situation, au besoin sous astreinte ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocat, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- qu'il est insuffisamment motivé en ce que les éléments indiqués sont stéréotypés et que le refus n'est pas motivé ;

- qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences sur la vie personnelle du requérant, dès lors que ce dernier a établi sa résidence durable en France où il est arrivé à 17 ans, qu'il souhaite bénéficier de nouvelles formations, qu'il a suivi avec succès une formation et a révélé spontanément sa véritable identité ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- que l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de motivation au regard de l'article 12 paragraphe 1 de la directive 2008/115/CE dite "retour" ;

- que la décision fixant un délai de départ de trente jours est dépourvue de motivation au regard de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- que l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- que pour les mêmes motifs entachant le refus de titre de séjour d'erreur manifeste d'appréciation, l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 février 2014, présenté par le préfet de l'Aube ;

Le préfet conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que le refus de titre de séjour est suffisamment motivé et n'est pas stéréotypé ;

- que le contrat jeune majeur du requérant a pris fin deux mois après sa signature, dès que l'intéressé a révélé sa véritable date de naissance et qu'il ne pouvait en bénéficier ; que les parents de M. B...résident en Egypte ; que l'intéressé n'est pas inséré en France dont il ne respecte pas les règles ; qu'il est célibataire et n'a pas de famille en France ; qu'ainsi, le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- que l'obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée et que la décision fixant le délai de départ, qui était le délai de droit commun, n'avait pas à être motivée ;

- que l'exception d'illégalité ne peut qu'être rejetée ;

- que pour les mêmes motifs que pour le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nancy, en date du 11 octobre 2013, admettant le requérant au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la lettre du 24 avril 2014 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 5 juin 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 9 mai 2014 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 16 mai 2014 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer les conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :

- le rapport de Mme Stefanski, président ;

Sur le refus de titre de séjour :

1. Considérant, d'une part, que la décision du 2 mars 2013 par laquelle le préfet de l'Aube a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., comporte de façon précise les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, fait mention des circonstances propres à l'espèce et n'est pas stéréotypée, contrairement à ce que soutient le requérant ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;

2. Considérant, d'autre part, que si M. B...soutient qu'il réside en France, où il est entré à l'âge de 17 ans, depuis cinq ans, qu'il a suivi avec succès une formation, qu'il souhaite en suivre d'autres et qu'il a révélé spontanément sa véritable identité, ce qui démontre son insertion dans la société française, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré irrégulièrement sur le territoire national, qu'il n'a pas pu bénéficier du maintien du contrat de jeune majeur qu'il avait obtenu, dont il est apparu qu'il ne remplissait pas les conditions après qu'il ait avoué son âge véritable, qu'il s'est présenté successivement sous trois identités, que ses parents sont en Egypte, qu'il est célibataire et n'a pas de famille en France ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, l'arrêté litigieux aurait porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle du refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination doit être écarté ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 12, paragraphe 1, de la directive 2008/115/CE susvisée du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent les motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ;

4. Considérant que l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a ni pour objet ni pour effet de restreindre le champ d'application de l'obligation de motivation des décisions de retour ; qu'il se borne à prévoir les cas où la motivation de l'obligation de quitter le territoire étant identique à celle de la décision de refus de séjour dont elle procède nécessairement, elle n'a pas à faire l'objet d'une énonciation distincte ; qu'ainsi, la rédaction de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile issue de l'article 37 de la loi du 16 juin 2011 n'apparaît pas comme n'ayant pas intégralement transposé les dispositions précitées de l'article 12 de la directive ;

5. Considérant que la décision contestée, qui fait obligation à M. B...de quitter le territoire français au motif qu'il s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, vise expressément le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dès lors que, comme en l'espèce, le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que le fondement légal de l'obligation de quitter le territoire français a été énoncé, la motivation de cette obligation, qui se confond avec celle de la décision de refus de séjour ainsi qu'il ressort des énonciations mêmes du I de l'article L. 511-1, n'implique pas de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait entachée d'un défaut de motivation doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus pour le refus de titre de séjour, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peuvent qu'être rejetés ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

9. Considérant que l'arrêté contesté prévoit que M. B...est obligé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de la notification dudit arrêté, soit dans le délai maximal prévu par les dispositions précitées pour un départ volontaire ; que l'autorité administrative, lorsqu'elle accorde ce délai de trente jours, n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point dès lors que l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande tendant à la prolongation dudit délai de départ volontaire en faisant état de circonstances propres à son cas ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation du délai de départ volontaire ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai sous astreinte, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à l'avocat de M. B...la somme que celui-ci demande sur le fondement des dispositions susmentionnées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

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13NC02185


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SICHLER
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : HUG

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 26/06/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13NC02185
Numéro NOR : CETATEXT000029147170 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-06-26;13nc02185 ?
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