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16/10/2014 | FRANCE | N°13NC01887

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2014, 13NC01887


Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2013, présentée pour Mme A...C..., demeurant à..., par la SCP Roth-Pignon, Leparoux et associés ;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302615 du 17 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2013 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle peut être éloignée ;

2°) d'annule

r cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer ...

Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2013, présentée pour Mme A...C..., demeurant à..., par la SCP Roth-Pignon, Leparoux et associés ;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302615 du 17 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2013 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle peut être éloignée ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à exercer une activité professionnelle ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer, pendant la durée de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 1196 euros à verser à la SCP Roth-Pignon, Leparoux et associés, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- il ressort du certificat médical de son médecin psychiatre, qui faisait précisément état des troubles qui l'affectent, ainsi que du fait qu'ils étaient liés aux évènements vécus dans son pays d'origine, que le défaut de traitement et de suivi psychiatrique pourrait entraîner, pour sa santé, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

- les premiers juges ne pouvaient se contenter d'affirmer que les documents produits n'étaient pas de nature à infirmer l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et à établir qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement médical approprié dans son pays d'origine, dans la mesure où il appartient au préfet du Bas-Rhin d'apporter la preuve que des soins médicaux appropriés à la nature et à la gravité de son affection pourront lui être dispensés dans son pays d'origine ;

- l'offre de soins psychiatriques étant pratiquement inexistante dans son pays d'origine, elle ne pourra y bénéficier d'un traitement approprié à sa condition ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, car elle a, en France, l'essentiel de ses attaches privées et familiales et se trouverait isolée en cas de retour dans son pays d'origine ;

- saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la Cour devra statuer sur l'ensemble des moyens développés en première instance, qui ont été rejetés par le tribunal mais sont expressément repris en appel ;

Vu le jugement et la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2014, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée doit être écarté ;

- il ne peut, en raison du secret médical, avoir accès au rapport médical du demandeur et est donc conduit à s'approprier le contenu de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- en l'espèce, le médecin de l'agence régionale de santé a porté, dans son avis, toutes les informations qu'il lui incombait de transmettre, tout en préservant le secret médical ;

- il ne s'est pas cru lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se bornant à requérir l'existence de soins dans le pays d'origine et non leur accès effectif, il ne lui appartenait pas d'apporter la preuve de l'accès effectif à ces soins ;

- le certificat médical produit par la requérante se borne à reprendre les dires de celle-ci et est dépourvu de précisions quant à la disponibilité des soins dans son pays d'origine ;

- des médicaments similaires à ceux actuellement prescrits à la requérante sont disponibles dans son pays d'origine, de même que des soins psychiatriques adaptés ;

- la faiblesse alléguée du nombre de spécialistes en psychiatrie est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

- la décision contestée ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu notamment des attaches que l'intéressée a dans son pays d'origine et des conditions de son séjour en France ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 15 novembre 2013, admettant Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :

- le rapporteur M. Fuchs, premier conseiller,

- et les observations de Me B...pour MmeC... ;

1. Considérant que MmeC..., ressortissante congolaise, née le 18 mai 1977, est entrée en France, selon ses dires, le 3 août 2010 ; que sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 janvier 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 24 octobre 2012 ; que la requérante a alors sollicité, par un courrier en date du 1er février 2013, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 12 avril 2013, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle peut être éloignée ; que Mme C...relève appel du jugement du 17 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, " à l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; que l'article R. 313-22 du même code dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

3. Considérant que, pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet du Bas-Rhin a relevé, conformément à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 27 mars 2013, que si l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que si Mme C...fait valoir que l'offre de soins en matière de psychothérapie est largement insuffisante au Congo, elle n'apporte pas la preuve de l'absence de tels traitements ; qu'en effet, le certificat médical de son médecin psychiatre est, sur ce point, insuffisamment circonstancié et les données de l'organisation mondiale de la santé sur lesquelles elle s'appuie, au demeurant corroborées par la fiche de l'état sanitaire du Congo produite par le préfet du Bas-Rhin, indiquent qu'existent de tels soins ; qu'il ne ressort en outre pas des pièces du dossier qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement médicamenteux approprié ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, de surcroît, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin se serait estimé lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 27 mars 2013 ;

4. Considérant, en second lieu, que Mme C...reprend en appel les moyens, qu'elle avait invoqués en première instance, tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'absence d'examen de sa situation personnelle, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal administratif de Strasbourg ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N° 13NC01887


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01887
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP ROTH-PIGNON LEPAROUX ROSENSTIEHL ET ANDREINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-10-16;13nc01887 ?
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