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28/10/2014 | FRANCE | N°13NC01544

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 28 octobre 2014, 13NC01544


Vu la requête, enregistrée le 3 août 2013, présentée pour Mme C...B..., élisant domicile..., par MeA..., Mme B...demande à la Cour ;

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 1301480 du 3 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 mars 2013 par laquelle le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de

quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100...

Vu la requête, enregistrée le 3 août 2013, présentée pour Mme C...B..., élisant domicile..., par MeA..., Mme B...demande à la Cour ;

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 1301480 du 3 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 mars 2013 par laquelle le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'État à verser à Me A...la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;

- l'article 6-5° de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus et le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations ;

- la décision litigieuse méconnait l'article 6-7° du même accord, car il n'est pas démontré qu'un traitement approprié est disponible et accessible en Algérie et le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de son état de santé ;

- l'article 7 bis du même accord a été méconnu, dès lors qu'elle est à la charge de son fils de nationalité française ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2013, présenté par le préfet du Haut Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

Vu la décision du 5 septembre 2013, par laquelle le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy a admis Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller ;

1. Considérant que, par arrêté du 27 mars 2013, le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer un certificat de résidence à MmeB..., ressortissante algérienne, née en 1951 ; qu'elle relève appel du jugement n° 1301480 rendu le 3 juillet 2013 par le Tribunal administratif de Strasbourg en tant que, par l'article 2 de ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant que par arrêté du 18 février 2013, régulièrement publié, le préfet du Haut-Rhin a donné à M. Barrois, secrétaire général de la préfecture du Haut-Rhin, signataire de la décision attaquée, délégation " à l'effet de signer tous les arrêtés, décisions (...), à l'exception des actes pour lesquels une délégation a été donnée à un chef des services de l'État dans le département et des mesures générales concernant la défense (...) et des arrêtés de conflit " ; que, l'acte attaqué n'étant pas au nombre des exceptions limitativement énumérées par l'arrêté du 18 février 2013, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris par une autorité incompétente manque en fait ;

Sur la légalité interne :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que Mme B...fait valoir que son fils unique, qui la prend en charge, réside en France ; que ces éléments sont insuffisants pour justifier de l'intensité et de la stabilité de ses liens en France alors qu'elle n'est entrée dans ce pays qu'en 2009, sous couvert d'un visa de court séjour, après avoir vécu jusqu'à l'âge de cinquante-huit ans en Algérie, où vivent ses trois soeurs et sa mère ; qu'en outre, si la requérante fait valoir qu'elle ne peut ni travailler ni bénéficier d'une retraite en Algérie, il ressort des pièces du dossier qu'elle perçoit une pension mensuelle dans son pays d'origine et que son fils est susceptible de l'aider financièrement ; que, par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, le refus de séjour en litige n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, en refusant de lui accorder un titre de séjour, le préfet n'a méconnu ni les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays.(...) " ; qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un certificat de résident à un ressortissant algérien qui se prévaut de ces stipulations, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

6. Considérant que, pour refuser d'admettre au séjour Mme B...pour raison de santé, le préfet s'est fondé, notamment, sur l'avis rendu le 11 mars 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait cependant effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que cet avis indique également que les soins dont l'intéressée avait besoin présentaient un caractère de longue durée et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis l'état de santé de Mme B...lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine ;

7. Considérant que les éléments produits par MmeB..., et notamment le certificat médical établi le 12 décembre 2012 par son médecin traitant, endocrinologue, ne suffisent pas à remettre en cause l'avis émis le 11 mars 2013 selon lequel il existe en Algérie un traitement approprié à son état de santé ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les revenus de sa pension, ainsi que l'aide financière qu'elle est susceptible de recevoir de son fils, seraient insuffisants pour permettre à Mme B...de se procurer le traitement dont elle a besoin ; qu'enfin, la requérante fait valoir, en s'appuyant sur le certificat du 12 décembre 2012, que son état de santé lui permet difficilement de vivre seule ; que, toutefois, eu égard au caractère peu circonstancié dudit certificat, sur ce point précis, la circonstance que l'intéressée vivrait seule, en cas de retour en Algérie, ne peut être regardée comme faisant obstacle à un accès effectif au traitement que son état de santé nécessite ; que dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que le préfet a fait une inexacte application des stipulations du 7) de l'article 6 de l'article franco-algérien ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco algérien modifié du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : (...) b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge.(...) " ;

9. Considérant que les stipulations précitées subordonnent la délivrance de plein droit d'un certificat de résidence à la régularité du séjour de l'intéressé en France ; qu'à la date de l'arrêté contesté, Mme B...était en situation irrégulière ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 7 bis de l'accord susmentionné doit être écarté ;

10. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet du Haut-Rhin

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N° 13NC01544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01544
Date de la décision : 28/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-10-28;13nc01544 ?
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