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28/10/2014 | FRANCE | N°13NC01968

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 28 octobre 2014, 13NC01968


Vu la requête, enregistrée le 23 septembre 2013, présentée pour Mme A...C...épouseD..., domiciliée..., par Me B... ; Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°1302466 du 30 août 2013 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 22 avril 2013 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre

de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;

Elle sou...

Vu la requête, enregistrée le 23 septembre 2013, présentée pour Mme A...C...épouseD..., domiciliée..., par Me B... ; Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°1302466 du 30 août 2013 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 22 avril 2013 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;

Elle soutient que :

- le préfet ne mentionne pas l'ensemble des éléments prévus par l'arrêté du 8 juillet 1999 pour les avis rendus par les médecins inspecteurs de santé publique ;

- si l'avis rendu le 2 mars 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé ne mentionne pas ces éléments, la décision du préfet doit être annulée ;

- le préfet doit justifier de la décision nommant le médecin inspecteur de santé publique et de sa publication ;

- la décision refusant de l'admettre au séjour est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne pourrait avoir accès aux soins dans son pays d'origine ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que son époux et ses enfants sont en France et que seule une de ses grands-mères réside encore au Monténégro ;

Vu l'ordonnance et la décision attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 29 novembre 2013, présenté pour MmeD..., qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2014, présenté par le préfet de la Moselle ; le préfet conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu la décision du bureau de l'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy, du 11 octobre 2013, admettant Mme D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller ;

1. Considérant que, par une décision du 22 avril 2013, le préfet de la Moselle a refusé de délivrer un titre de séjour, sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à Mme D..., ressortissante monténégrine ; que Mme D...relève appel de l'ordonnance du 30 août 2013 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) / 7º Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. / (...) " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que Mme D... a fait valoir devant le Tribunal administratif de Strasbourg qu'elle présentait de nombreux symptômes anxieux, en joignant des certificats médicaux ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 était assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, d'autre part, elle a également fait valoir devant le tribunal qu'elle résidait en France avec son époux et leurs trois enfants et que seule une de ses grands-mères résidait encore au Monténégro ; que de tels faits, même s'ils n'étaient pas assortis de pièces justificatives, étaient susceptibles de venir au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces moyens de légalité interne, qui n'étaient ni irrecevables ni inopérants, étaient assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, dans ces conditions, le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg ne pouvait pas rejeter, par une ordonnance prise en application des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande de MmeD... ; que, par suite, l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 30 août 2013 doit être annulée comme irrégulière ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D...devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur la légalité de l'arrêté du 22 avril 2013 :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant que le préfet a indiqué, dans la décision de refus de séjour en litige, avoir saisi le médecin de l'agence régionale de santé qui lui a indiqué que les soins nécessaires au traitement de Mme D...étaient disponibles dans son pays d'origine ; que la seule circonstance que le préfet ne mentionne pas, dans cette décision, les éléments relatifs à la nécessité d'une prise en charge médicale ou aux conséquences que pourrait entraîner le défaut d'une telle prise en charge, ne permet pas d'établir que l'avis rendu le 2 avril 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé serait irrégulier ;

6. Considérant que si MmeD..., en mentionnant les modalités de désignation du médecin de l'agence régionale de santé, entend soulever un moyen tiré de l'irrégularité de l'avis émis le 2 avril 2013, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision de nature à permettre à la Cour d'en examiner le bien-fondé ;

7. Considérant que le refus de séjour en litige mentionne des éléments de fait propres à la situation de la requérante ainsi que les éléments de droit sur lesquels il se fonde ; que, par suite, la décision du 22 avril 2013 est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

En ce qui concerne la légalité interne :

8. Considérant qu'aux terme de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État " ;

9. Considérant que Mme D...fait valoir que les soins rendus nécessaires par son état de santé ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ; que les certificats qu'elle produit, postérieurs à la décision en litige et qui se bornent à affirmer que les soins doivent se poursuivre en France, ne suffisent pas à remettre en cause l'analyse du préfet selon laquelle les soins seraient disponibles dans le pays d'origine de l'intéressée ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

11. Considérant que Mme D...fait valoir que son époux et leurs enfants sont en France et que seule une de ses grands-mères réside encore au Monténégro ; que ces éléments, eu égard à la durée de son séjour en France où elle est entré en août 2009 à l'âge de trente-quatre ans, et alors que son époux ne justifie pas de l'obtention d'un titre de séjour, ne sont pas de nature à caractériser l'existence de liens personnels et familiaux en France tels que le refus de titre de séjour en litige puisse être regardé comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ni, par suite, comme méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 22 avril 2013 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires à fin d'injonction doivent également être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1302466 du 30 août 2013 du vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme D...devant le Tribunal administratif de Strasbourg ainsi que le surplus de ses conclusions devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouse D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet la Moselle.

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N° 13NC01968


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01968
Date de la décision : 28/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : PIERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-10-28;13nc01968 ?
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