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13/11/2014 | FRANCE | N°14NC00088

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2014, 14NC00088


Vu I°), sous le n° 1400088, la requête, enregistrée le 16 janvier 2014, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par MeB... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302212 du 24 septembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 avril 2013 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné ;

2°) d'annuler cet arrê

té ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de sé...

Vu I°), sous le n° 1400088, la requête, enregistrée le 16 janvier 2014, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par MeB... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302212 du 24 septembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 avril 2013 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le premier juge a estimé sa requête irrecevable, sa demande n'étant pas tardive dans la mesure où la notification de la décision du 12 avril 2013 ne pouvait être faite par voie postale, compte tenu des garanties particulières attachées à la notification par voie administrative ;

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;

- il n'a pas été informé préalablement à l'édiction des décisions portant obligation de quitter le territoire français et refus d'octroi d'un délai de départ volontaire qu'une mesure d'éloignement était susceptible d'être prise à son encontre, et il n'a pas été mis à même de faire valoir ses observations ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car, hormis son fils qui réside en Suisse, il dispose en France de l'ensemble de ses attaches familiales, qu'il en est dépourvue dans son pays d'origine qu'il a quitté depuis plus de vingt ans et qu'il est bien intégré ;

- pour ces mêmes motifs, cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet de l'Isère a commis une erreur de fait en estimant qu'il s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement pour refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire en application du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 février 2014, présenté par le préfet du Doubs qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que le requérant ne conteste pas le jugement du 24 septembre 2013 en tant que celui-ci a statué sur la légalité de son placement en rétention administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2014, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que la demande de première instance était tardive et, sur le fond, s'en rapporte aux écritures qu'il a produites devant le Tribunal administratif de Nancy ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 17 décembre 2013, admettant M. C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu II°), sous le n° 1400089, la requête, enregistrée le 16 janvier 2014, présentée pour Mme E... D...épouseC..., demeurant..., par Me B... ;

Mme C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302213 du 24 septembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 avril 2013 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel elle peut être éloignée ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le premier juge a estimé sa requête irrecevable, sa demande n'étant pas tardive dans la mesure où la notification de la décision du 12 avril 2013 ne pouvait être faite par voie postale, compte tenu des garanties particulières attachées à la notification par voie administrative ;

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;

- elle n'a pas été informée préalablement à l'édiction des décisions portant obligation de quitter le territoire français et refus d'octroi d'un délai de départ volontaire qu'une mesure d'éloignement était susceptible d'être prise à son encontre, et elle n'a pas été mise à même de faire valoir ses observations ;

- elle ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement en application du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle réside habituellement en France, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entrainerait des conséquences d'une extrême gravité et qu'elle n'aura pas accès au traitement nécessaire au Kosovo ;

- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car, hormis son fils qui réside en Suisse, elle dispose en France de l'ensemble de ses attaches familiales et en est dépourvue dans son pays d'origine qu'elle a quitté depuis plus de vingt ans ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet de l'Isère a commis une erreur de fait en estimant qu'elle s'était soustraite à une précédente mesure d'éloignement pour refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire en application du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 février 2014, présenté par le préfet du Doubs qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que la requérante ne conteste pas le jugement du 24 septembre 2013 en tant que celui-ci a statué sur la légalité de son placement en rétention administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2014, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que la demande de première instance était tardive et, sur le fond, s'en rapporte aux écritures qu'il a produites devant le Tribunal administratif de Nancy ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 17 décembre 2013, admettant Mme C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les jugements et les décisions attaqués ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 16 octobre 2014, le rapport M. Fuchs, premier conseiller,

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 14NC00088 et n° 14NC00089 de M. et Mme C..., présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M et Mme C...relèvent appel des jugements en date du 24 septembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère du 12 avril 2013 les obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays à destination duquel ils peuvent être éloignés ;

Sur la régularité des jugements attaqués :

3. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. " ; qu'aux termes du paragraphe II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que seule la notification par voie administrative d'une obligation de quitter le territoire français sans délai fait courir à l'égard de l'intéressé le délai de recours contentieux de quarante-huit heures pour contester cette décision, ainsi que celles portant refus de séjour, fixant le pays de renvoi et interdisant le retour sur le territoire français notifiées simultanément ;

4. Considérant que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a, par les jugements attaqués du 24 septembre 2013, rejeté les demandes visées ci-dessus au motif que les conclusions étaient tardives, car présentées après l'expiration du délai de recours de quarante-huit heures suivant la notification prévue au II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que les décisions contestées ont fait l'objet d'une simple notification par voie postale, qui ne présente pas les mêmes garanties qu'une notification effectuée par voie administrative ; que, dès lors, le premier juge ne pouvait pas opposer à M. et Mme C...le délai de recours contentieux de quarante-huit heures prévu par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal a rejeté les demandes dont il était saisi ; que les jugements attaqués doivent, par suite, être annulés ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. et Mme C...devant le tribunal administratif de Nancy ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté qu'à la date des arrêtés en litige, le secrétaire général de préfecture était absent ; que M. Bruno Charlot, secrétaire général adjoint de la préfecture de l'Isère, signataire des arrêtés attaqués, avait reçu par arrêté du préfet de l'Isère en date du 27 août 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs, délégation pour signer, dans le cadre de la permanence de responsabilité départementale, les obligations de quitter le territoire français ainsi que les décisions fixant le pays de destination ; que, dès lors, le moyen tiré de l'existence d'une incompétence doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la charte des droits fondamentaux, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

8. Considérant que M. et Mme C...ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour et ont été mis à même de faire valoir, avant l'intervention des décisions contestées qui ont été prises concomitamment à celles leur refusant le séjour, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; qu'il suit de là que les intéressés ne sont pas fondés à soutenir que le droit d'être entendu et de présenter des observations, garanties consacrées par le droit de l'Union, a été méconnu ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que M. et MmeC..., nés au Kosovo et se disant de nationalité " serbe kosovare ", soutiennent avoir résidé en France de 2004 à 2006, avant de se rendre en Suisse à la suite du rejet par l'Office de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile, d'une première demande tendant à l'octroi du statut de réfugié ; qu'après que les requérants sont à nouveau entrés sur le territoire français au cours de l'année 2009, l'Office de protection des réfugiés et apatrides, le 9 avril 2010, puis la Cour nationale du droit d'asile, le 8 juillet 2011, ont rejeté leurs demandes de réexamen au titre du droit d'asile ; que si les intéressés soutiennent avoir l'essentiel de leurs attaches familiales en France, eu égard au fait que leur fille Nedzmija et des membres de leurs fratries seraient en situation régulière sur le territoire, ils ne contestent toutefois pas que leur fils et sa compagne ont également fait l'objet de mesures d'éloignement, par des arrêtés du même jour que les décisions attaquées ; qu'ils n'établissent pas, en outre, que leur seconde fille séjournerait de manière régulière sur le territoire français ; qu'ainsi, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour, les arrêtés en litige n'ont pas porté au droit de M. et Mme C...à une vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels ils ont été pris ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

12. Considérant que s'il est constant que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle n'établit pas, en se bornant à faire état des discriminations que subiraient les personnes d'origine rom, qu'il n'existerait pas de traitement approprié au Kosovo, alors que le médecin de l'agence régional de santé de Rhône-Alpes, saisi à la suite de la demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de l'intéressée en date du 4 septembre 2012, a estimé, dans son avis rendu le 16 octobre 2012, qu'un traitement approprié existait au Kosovo ; qu'en outre, les autres circonstances dont elle fait état, relatives en particulier à l'absence de couverture sociale, ne peuvent être considérées comme des circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant, en cinquième lieu, qu'eu égard en particulier aux motifs énoncés aux points 10 et 12, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences des obligations de quitter le territoire français sur leurs situations personnelles ne peut qu'être écarté ;

14. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3°) S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement " ;

15. Considérant que si M. et Mme C...soutiennent qu'ils ont respecté les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière pris à leur encontre le 13 juillet 2006, il ne ressort pas des termes de la lettre du 18 avril 2007 de l'Office de l'immigration de la Confédération Suisse que les intéressés, qui n'étaient pas légalement admissibles dans ce pays, auraient effectivement résidé en Suisse à compter de cette date ; qu'ainsi, le préfet de l'Isère a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, considérer que les intéressés s'étaient soustraits à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement et, en conséquence, ne pas assortir l'obligation de quitter le territoire d'un délai de départ volontaire, dès lors que ceux-ci entraient ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

16. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

17. Considérant que l'affirmation de M. C...selon laquelle il serait considéré comme déserteur dans son pays d'origine depuis 1991, qui n'est pas mentionnée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Commission de recours des réfugiés prises en 2005, ni par celle de l'Office du 9 avril 2010 portant rejet de sa demande de réexamen, ne peut être regardée comme établie ; que si les intéressés soutiennent par ailleurs être menacés dans leur pays d'origine en raison, en particulier, de leurs origines rom et y avoir fait l'objet de racket et de violences, ils n'apportent toutefois aucun élément circonstancié suffisamment probant de nature à établir la réalité des risques personnels qu'ils pourraient ainsi encourir en cas de retour au Kosovo ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère du 12 avril 2013, en tant que ceux-ci les obligent à quitter le territoire français sans délai et fixent le pays à destination duquel ils seront éloignés ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Nancy en date du 24 septembre 2013 sont annulés.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme C...devant le tribunal administratif de Nancy sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme E...D...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée aux préfets du Doubs et de l'Isère.

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N° 14NC00088,14NC00089


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00088
Date de la décision : 13/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-11-13;14nc00088 ?
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