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09/04/2015 | FRANCE | N°14NC01234

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 09 avril 2015, 14NC01234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 2 septembre 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné.

Par un jugement n° 1304042 du 19 novembre 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enreg

istrée le 22 mai 2014, M.A..., représenté par Me Maillet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 2 septembre 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné.

Par un jugement n° 1304042 du 19 novembre 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2014, M.A..., représenté par Me Maillet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 novembre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 2 septembre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée et ne comprend, en particulier, aucun élément propre à sa situation ;

- le préfet ayant été saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait apprécier sa demande sur le fondement de l'article L. 313-10 du même code ;

- en exigeant la production d'une autorisation de travail préalable, le préfet de la Moselle a commis une erreur de droit ;

- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de la Moselle a entaché sa décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les procédures judiciaires menées à l'encontre de son employeur ne peuvent lui être opposées ;

- il remplissait les critères énoncés par la circulaire NOR INTK 1229185C du 28 novembre 2012 auquel il appartenait au préfet de se référer, même si celle-ci n'a pas de caractère réglementaire ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, en particulier en ce que le préfet se réfère uniquement, sur ce point, à l'appréciation de sa situation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également les stipulations des articles 3, 9 et 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2014, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il a examiné la demande de M. A...sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) a été saisie uniquement afin d'évaluer la situation du requérant au regard des dispositions de cet article et les conditions requises par l'article L. 313-10 du même code ne lui ont pas été opposées ;

- il ne lui appartenait pas de saisir la commission du titre de séjour, dès lors que le requérant ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer un titre de plein droit ;

- l'intéressé ne l'ayant nullement informé de la présence sur le territoire français de sa femme et de sa fille, il ne pouvait prendre en compte ces éléments ;

- la décision en litige ne méconnaît pas en tout état de cause les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 22 avril 2014, M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Fuchs, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant bangladais, né le 7 août 1972, est entré irrégulièrement en France en 2006 ; que, par un arrêté du 2 septembre 2013, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné ; que le requérant relève appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 novembre 2013 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; que, d'une part, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement, non pas du 1° de l'article L. 313-10, mais du seul article L. 313-14 n'est pas subordonnée à la détention par l'étranger d'une autorisation de travail ou d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative ; qu'il suit de là que pour refuser de délivrer une telle carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14, le préfet ne peut se fonder sur les éléments d'appréciation énoncés par les dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail relatives à l'examen des demandes d'autorisation de travail ; que, d'autre part, en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant par là-même des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

3. Considérant que pour refuser à M. A...la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Moselle, après avoir mentionné l'avis défavorable des services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Lorraine relatant les procédures initiées à l'encontre de son employeur pour travail dissimulé, a estimé que l'intéressé ne présentait " aucun justificatif probant de son insertion professionnelle en France " et devait, dès lors, se voir refuser le titre de séjour sollicité ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté, que M. A...avait notamment produit à l'appui de sa demande de titre de séjour le contrat de travail à durée indéterminée qu'il avait signé avec la société Sushi Metz le 11 juin 2009, ainsi que des bulletins de salaire se rapportant à la période de septembre 2008 à novembre 2009 et d'autres bulletins de salaires établissant qu'il exerçait son travail de cuisinier pour la société Sushi Metz de façon continue depuis deux ans et demi ; que, dans ces conditions, le préfet de la Moselle ne pouvait légalement rejeter la demande de régularisation présentée par M. A... en se bornant à invoquer les procédures pour travail dissimulé diligentées à l'encontre de son employeur, sans procéder à l'examen particulier de sa situation et des justificatifs précis de son expérience professionnelle ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 2 septembre 2013 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

6. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que la demande de M. A...soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Moselle de procéder à ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, durant cette période d'instruction, M. A...sera muni d'une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

7. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Maillet, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me Maillet de la somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 novembre 2013 et l'arrêté du préfet de la Moselle du 12 septembre 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de procéder au réexamen de la demande de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me Maillet une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 14NC01234


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01234
Date de la décision : 09/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : MAILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-04-09;14nc01234 ?
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