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21/04/2015 | FRANCE | N°14NC00255

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 21 avril 2015, 14NC00255


Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée pour Mme C...B..., domiciliée..., par Me A... ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303450 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 17 juin 2013 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre

au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et fami...

Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée pour Mme C...B..., domiciliée..., par Me A... ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303450 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 17 juin 2013 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour, que :

- elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- les premiers juges ne se sont pas prononcés sur l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine en raison des évènements qu'elle y a vécus ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français, que :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de portant refus de titre de séjour ;

- cette décision emporte des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa vie personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination, que :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2014, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérante n'est fondé ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 28 janvier 2014, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015, le rapport de M. Michel, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante arménienne née le 9 juillet 1951, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 18 mai 2011 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité son admission au séjour en qualité de refugiée ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 31 mai 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 décembre 2012 ; que Mme B...a présenté une nouvelle demande d'admission au séjour, en tant qu'étranger malade ; que par un arrêté du 17 juin 2013 le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que Mme B... relève appel du jugement du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Strasbourg, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'absence de traitement approprié à l'état de santé de Mme B...dans son pays d'origine ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays " ;

4. Considérant que Mme B...soutient qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine compte tenu de l'offre de soins en Arménie et des évènements qu'elle y a vécus ; qu'il ressort des pièces du dossier que par avis du 23 mai 2013 le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les soins présentent un caractère de longue durée, l'intéressée peut cependant bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les certificats médicaux produits par l'intéressée, selon lesquels notamment elle présente plusieurs pathologies chroniques sévères mettant sa vie en danger en l'absence de traitement et nécessitant un suivi médical régulier et spécialisé, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé quant à l'existence de soins appropriés dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le syndrome anxio-dépressif de la requérante trouverait son origine dans des évènements traumatisants vécus en Arménie, qui seraient tels qu'ils feraient obstacle à ce qu'elle puisse y bénéficier d'un traitement approprié ; que, par suite, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...soutient qu'elle réside en France depuis deux ans et demi et que son fils est titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée irrégulièrement en France le 18 mai 2011, à l'âge de soixante ans, et a sollicité son admission au séjour en qualité de refugiée puis en tant qu'étranger malade ; que, par ailleurs, elle n'établit pas être dépourvue de toutes attaches personnelles et familiales en Arménie où vivent son époux ainsi que ses frère et soeur ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de Mme B...doit être écarté ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme B...n'établit pas l'illégalité la décision portant refus de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour sur laquelle elle se fonde doit être écarté ;

7. Considérant, en second lieu, qu'en l'absence de tout autre élément, et pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme B...doit être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

9. Considérant que Mme B...soutient qu'elle serait exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Arménie en raison des activités militantes de son fils, membre du parti politique " voie démocratique ", qui lui a valu de faire l'objet de pressions de la part des autorités et d'accusation du chef de faux témoignages ; que, toutefois, Mme B...n'établit pas le caractère réel, personnel et actuel des risques allégués en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors que sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 21 décembre 2012, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 14NC00255


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00255
Date de la décision : 21/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTÉRA
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : KLING

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-04-21;14nc00255 ?
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