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23/07/2015 | FRANCE | N°14NC01827

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 23 juillet 2015, 14NC01827


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...épouse E...et M. A...E...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 7 février 2014 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits, ainsi que les décisions du 18 juin 2014 par lesquelles ce même préfet les a assignés à résidence.

Par deux jugements n°

1401427-1401521 et n° 1401428-1401522 du 24 juin 2014, le magistrat désigné par le présid...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...épouse E...et M. A...E...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 7 février 2014 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits, ainsi que les décisions du 18 juin 2014 par lesquelles ce même préfet les a assignés à résidence.

Par deux jugements n° 1401427-1401521 et n° 1401428-1401522 du 24 juin 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté les conclusions des requérants présentées à l'encontre des obligations de quitter le territoire français, des décisions fixant le pays de destination et des assignations à résidence.

Par deux autres jugements n° 1401427 et n° 1401428 du 23 septembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté les conclusions des requérants présentées à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2014 sous le n° 14NC01826, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1401427-1401521 du 24 juin 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- elle n'a pas été mise à même de présenter ses observations avant qu'une mesure d'éloignement soit prononcée à son encontre, en méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- invitée à présenter ses observations, elle aurait ainsi pu faire état d'éléments pertinents ;

- le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée pour l'obliger à quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité entachant la mesure d'éloignement ;

- cette décision n'est pas motivée en droit faute de se référer à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est également insuffisamment motivée en fait ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a omis de procéder à un examen de sa situation avant de fixer le pays de renvoi ;

- elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2014 sous le n° 14NC01827, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1401428-1401522 du 24 juin 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient les mêmes moyens que ceux qui sont exposés dans la requête susvisée, enregistrée sous le n° 14NC01826.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.

III. Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2014 sous le n° 15NC00150, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1401427 du 23 septembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2014 en tant qu'il porte refus de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée dès lors qu'elle omet de se référer à l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et ne comporte aucune mention se rapportant à sa situation personnelle ;

- le préfet a omis de procéder à un examen de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision de refus de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'annulation de cette décision entraine celle de la mesure d'éloignement ;

- cette décision devra encore être annulée en conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour opposée à son époux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.

IV. Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2014 sous le n° 15NC00157, M. E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1401428 du 23 septembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2014 en tant qu'il porte refus de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient les mêmes moyens que ceux qui sont exposés dans la requête susvisée, enregistrée sous le n° 15NC00150.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.

M. et Mme E...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par quatre décisions du 19 août 2014 et du 18 décembre 2014.

Vu :

- les jugements et les arrêtés attaqués ;

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. et MmeE..., de nationalité géorgienne, sont entrés irrégulièrement sur le territoire français au cours de l'année 2012, accompagnés de leurs deux enfants mineurs, afin de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 août 2013, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 6 janvier 2014 ; qu'en conséquence de ces décisions de rejet, le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par deux arrêtés du 7 février 2014, refusé de délivrer un titre de séjour à M. et à Mme E...et obligé ceux-ci à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Géorgie ; que les intéressés ont saisi le tribunal administratif de Nancy, le 7 juin 2014, d'une demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ; que les requérants ayant été assignés à résidence par deux décisions du 18 juin 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a, par deux jugements du 24 juin 2014, rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que, par deux autres jugements du 23 septembre 2014, le tribunal administratif a rejeté les conclusions des requérants présentées à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour ; que, par quatre requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. et Mme E...font appel des jugements précités ;

Sur la légalité des décisions portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que, d'une part, s'il appartient au préfet, avant de refuser la délivrance d'un titre de séjour, de s'assurer que sa décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, celles-ci ne constituent pas pour autant le fondement du refus de séjour ; qu'ainsi, la circonstance que les décisions attaquées omettent de les mentionner n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation en droit, alors, en outre, que le préfet a pris soin de viser dans ses décisions les articles L. 313-13 et L. 313-14, 8°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lesquels il s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour aux requérants ; que, d'autre part, les décisions attaquées, qui rappellent l'ensemble des circonstances de fait se rapportant à la situation de M. et de Mme E...depuis leur entrée sur le territoire français en 2012, sont également suffisamment motivées en fait ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions attaquées doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait omis de procéder à un examen personnel de la situation des requérants avant de refuser de leur délivrer un titre de séjour ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme E...sont entrés en France au cours du mois de février 2012, après avoir vécu dans leur pays d'origine jusqu'à l'âge, respectivement, de 22 et 21 ans ; que les deux époux sont en situation irrégulière et font l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'il n'est pas établi que leurs deux enfants mineurs ne pourraient les accompagner en cas d'éloignement à destination du pays d'origine de la famille ; que si les parents de M. E... résident actuellement sur le territoire français, ils ont seulement été admis au séjour dans l'attente qu'il soit statué sur leur demande d'asile ; que, dans ces conditions, eu égard aux conditions et à la durée du séjour en France de M. et de MmeE..., les décisions refusant de leur délivrer un titre de séjour n'ont pas porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale ; que, par suite, les moyens tirés d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que l'unité de la cellule familiale serait compromise en cas d'éloignement de M. et de Mme E... à destination de la Géorgie, pays dont ils ont tous les deux la nationalité ; qu'il n'est fait état d'aucune circonstance susceptible de faire obstacle à ce que la fille aînée des requérants, inscrite dans une école maternelle en France, poursuive sa scolarité dans le pays d'origine de la famille ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que ni M.E..., ni son épouse ne sont fondés à obtenir l'annulation du refus de séjour qui leur a été opposé par le préfet ; que, par suite, ni l'un, ni l'autre n'est fondé à soutenir, en tout état de cause, que la décision lui refusant un titre de séjour doit être annulée en conséquence de l'annulation du refus de séjour opposé à son conjoint ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que les décisions les obligeant à quitter le territoire français doivent être annulées en conséquence de l'annulation des décisions de refus de séjour ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que le droit d'être entendu, résultant de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où la mesure d'éloignement est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, cette mesure découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ; que, lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion de l'examen de sa demande d'asile par l'Office de protection des réfugiés et apatrides, puis de son recours formé contre un rejet par la Cour nationale du droit d'asile, il est entendu de manière utile et effective sur l'ensemble des éléments lui permettant de prétendre à la délivrance du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de cette demande d'asile, de faire valoir auprès de l'administration préfectorale toute observation complémentaire utile concernant la régularité de son séjour, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux et en sollicitant la délivrance d'un titre de séjour sur un fondement autre que celui du droit d'asile ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

9. Considérant que M. et MmeE..., qui ont été entendus par l'Office de protection des réfugiés et apatrides dans le cadre de l'examen de leur demande d'asile, puis par la Cour nationale du droit d'asile, et pouvaient faire valoir à tout moment auprès du préfet les éléments pertinents relatifs à leur séjour en France avant que n'interviennent les obligations de quitter le territoire français litigieuses, ne sont ainsi pas fondés à soutenir qu'ils ont été privés de leur droit à être entendus, tel qu'il est notamment consacré par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet se serait estimé, à tort, en situation de compétence liée pour assortir ses décisions de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en dernier lieu, eu égard à ce qui a été dit aux points 4 et 5, que les moyens tirés d'une méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ne peuvent qu'être écartés ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de renvoi :

12. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des obligations de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que les décisions attaquées visent le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel " l'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ", et sont ainsi suffisamment motivées en droit ; que ces décisions précisent également qu'à l'expiration du délai qui leur est imparti pour quitter volontairement le territoire français, M. et Mme E...pourront être reconduits d'office à la frontière à destination du pays dont ils ont la nationalité, soit la Géorgie, ou de tout autre pays dans lequel ils établiraient être admissibles ; que les décisions attaquées rappellent encore que les demandes d'asile des requérants ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, et précisent que les intéressés n'établissent pas être exposés à des traitements contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Géorgie ; qu'ainsi, les décisions fixant le pays de destination sont suffisamment motivées en fait ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions fixant le pays de renvoi doit être écarté ;

14. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait omis de procéder à un examen personnel de la situation des requérants avant de fixer la Géorgie comme pays de renvoi ;

15. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que, selon ces stipulations : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que M. et Mme E... soutiennent qu'ils encourent des risques de persécutions en cas de retour dans leur pays d'origine, notamment de la part de compatriotes de religion yézide qui ne tolèrent pas la conversion du requérant à la religion chrétienne ; que, toutefois, ils n'apportent aucun élément, à l'appui de leurs allégations, de nature à établir la réalité des risques personnels auxquels ils prétendent être exposés en cas de retour en Géorgie ; qu'au demeurant, leur demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ; que, pour les mêmes raisons, il n'est pas établi que les enfants des requérants encourraient des risques pour leur sécurité en cas de retour dans le pays d'origine de la famille ; que, dans ces conditions, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et de Mme E... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D...épouseE..., à M. A... E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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N° 14NC01826, 14NC01827, 15NC00150, 15NC00157


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01827
Date de la décision : 23/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-07-23;14nc01827 ?
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