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12/11/2015 | FRANCE | N°15NC00552

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2015, 15NC00552


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le préfet du Jura a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au profit de son époux.

Par un jugement n° 1301476 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Besançon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2015, complétée par des mémoires enregistrés le 11 juin et le 27 juillet 2015, le préfet du

Jura demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 février 2015...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le préfet du Jura a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au profit de son époux.

Par un jugement n° 1301476 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Besançon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2015, complétée par des mémoires enregistrés le 11 juin et le 27 juillet 2015, le préfet du Jura demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 février 2015.

Il soutient que :

- Mme A...ne remplit pas les conditions de ressources pour qu'il soit fait droit à sa demande de regroupement familial ;

- il n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il ne s'est pas estimé en situation de compétence liée au motif que Mme A...ne disposait pas de ressources suffisantes.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 juin 2015, MmeA..., représentée par Me C..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2013 et à ce qu'il soit enjoint au préfet du Jura d'autoriser le regroupement familial au profit de son époux dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai, et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme A...fait valoir que :

- aucun des moyens soulevés n'est fondé ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée pour opposer un refus à sa demande ;

- le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président du bureau d'aide juridictionnelle du 10 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu à l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante marocaine née le 3 septembre 1980, titulaire d'une carte de résident, a demandé à bénéficier de son droit à être rejointe, au titre du regroupement familial, par son conjoint ; que, par un arrêté du 16 juillet 2013, le préfet du Jura a refusé de faire droit à cette demande au motif que Mme A...ne justifie pas d'un niveau de ressources suffisant ; que le préfet du Jura relève appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 16 juillet 2013 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que si Mme A...réside en France depuis le 22 décembre 2006 et bénéficie d'une carte de résident valable du 29 janvier 2009 au 28 janvier 2019, il ressort des pièces du dossier que son mariage avec un compatriote a été célébré le 13 juillet 2012, un an avant la date de l'arrêté attaqué, et que son enfant est né le 28 mai 2013, moins de deux mois avant cette même date ; que, dès lors, eu égard au caractère récent du mariage de MmeA..., au très jeune âge de son enfant et à la circonstance que le conjoint de l'intimée est titulaire d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet du Jura est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 16 juillet 2013 au motif qu'il méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A...devant le tribunal administratif de Besançon et devant la cour ;

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 8 juillet 2013 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, le préfet du Jura a donné à M. Poussier, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions concernant le regroupement familial des étrangers ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux, signé par M. Poussier, aurait été pris par une autorité n'ayant pas reçu régulièrement compétence à cet effet doit être écarté comme manquant en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; que l'arrêté litigieux n'a pas pour effet d'interdire l'entrée du territoire français à l'époux de MmeA..., alors que l'intéressé est titulaire d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes ; qu'ainsi, il n'est pas établi que l'enfant de l'intimée se trouverait privé de la présence de son père ; que, dans ces conditions, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

7. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Jura se serait estimé à tort en situation de compétence liée pour refuser de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par MmeA... ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Jura est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé son arrêté du 16 juillet 2013 ; que, par suite, les conclusions présentées en appel par Mme A...à fin d'injonction et de condamnation de l'Etat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 1301476 du 17 février 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Besançon, ainsi que ses conclusions présentées en appel, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B...A....

Copie en sera adressée pour information au préfet du Jura.

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N° 15NC00552


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00552
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DSC AVOCATS - SCP DUFAY SUISSA CORNELOUP WERTHE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-12;15nc00552 ?
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