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28/01/2016 | FRANCE | N°15NC00878

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 15NC00878


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D..., veuve C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1407202 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

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Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D..., veuve C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1407202 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 avril 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 4 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement, dès lors qu'elle répondait aux conditions pour se voir délivrer, de plein droit, un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît aussi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination n'est pas motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen de sa situation particulière et a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2015, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme C...n'est fondé.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Dhiver a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeC..., ressortissante arménienne née le 23 avril 1953, est entrée irrégulièrement en France le 22 décembre 2009 afin d'y rejoindre son époux ; que, jusqu'au décès de ce dernier intervenu le 6 janvier 2013, l'intéressée a été munie, en raison de l'état de santé de son mari, d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que le 7 mai 2014, Mme C...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 4 décembre 2014, le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays à destination duquel la requérante pourrait être éloignée à l'issue de ce délai ; que, par jugement du 9 avril 2015, dont Mme C...relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la compétence du signataire de l'arrêté du 4 décembre 2014 :

2. Considérant que Mme C...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions du 4 décembre 2014 lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;

4. Considérant que Mme C...fait valoir qu'elle réside en France depuis le mois de décembre 2009, que son époux est inhumé à Strasbourg et qu'elle n'a plus de famille en Arménie après le décès de sa mère et le départ du pays de ses deux filles, ainsi que de son frère et sa soeur ; qu'elle fait également état de ses efforts d'intégration en France ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme C...ne dispose pas d'attaches personnelles et familiales en France ; qu'en revanche, elle a conservé des attaches familiales dans son pays d'origine où au moins sa nièce réside toujours et où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de 56 ans ; que la circonstance que l'époux de Mme C...est décédé et inhumé à Strasbourg ne lui ouvre aucun droit particulier au séjour ; qu'en outre, si l'intéressée maîtrise la langue française et a entrepris des démarches en vue de son intégration sociale et professionnelle, aucun des éléments dont elle fait état ne permettent de la regarder comme manifestant une insertion sociale particulièrement réussie en France ; que, dans ces conditions, pour légitime que soit le souhait de Mme C...de se rendre régulièrement sur la tombe de son époux inhumé à Strasbourg, la décision du préfet du Bas-Rhin lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, elle n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en second lieu, que si Mme C...se prévaut des éléments relatifs à sa vie privée et familiale évoqués ci-dessus et de ce qu'elle dispose d'une promesse d'embauche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un refus de titre de séjour sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué par voie d'exception, tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit au point 4, le moyen tiré de ce que Mme C...ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle répondait aux conditions qu'elles fixent, ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, enfin, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent ce qui vient d'être dit à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 5 ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays à destination duquel Mme C... pourra être éloignée comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle vise en particulier l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise la nationalité de l'intéressée et indique qu'elle n'établit pas être exposée dans son pays d'origine à des traitements contraires aux stipulations susvisées ni que sa vie ou sa liberté y sont menacées ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque en fait ;

10. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C... avant de fixer l'Arménie comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., veuve C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

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N° 15NC00878


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00878
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-01-28;15nc00878 ?
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