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21/04/2016 | FRANCE | N°15NC01335

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 21 avril 2016, 15NC01335


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 18 avril 2012 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1202235 du 21 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision et a enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. C...un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, e

nregistrée sous le n° 15NC01335, et des mémoires enregistrés les 16 juin 2015, 24 novembre 2015 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 18 avril 2012 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1202235 du 21 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision et a enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. C...un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée sous le n° 15NC01335, et des mémoires enregistrés les 16 juin 2015, 24 novembre 2015 et 26 février 2016, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Strasbourg.

Il soutient que :

- la demande de M. C...devant le tribunal était irrecevable ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'état de santé de M. C...ne justifiait pas qu'il lui soit délivré un titre de séjour dès lors que l'essai thérapeutique auquel M. C...souhaite participer ne constitue pas un traitement au sens de l'article L. 311-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2016, M.C..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif de Strasbourg a écarté le moyen tiré de la méconnaissance du principe de l'autorité de la chose jugée le 18 avril 2012 ;

- son état de santé justifiait qu'un titre de séjour lui soit délivré, sa participation à un essai thérapeutique devant être regardée comme un traitement médical au sens de l'article L. 311-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

II) Par une requête, enregistrée sous le n° 15NC01337, et des mémoires enregistrés les 16 juin 2015, 24 novembre 2015 et 26 février 2016, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 mai 2015.

Il soutient qu'il existe des moyens sérieux d'annulation du jugement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2016, M.C..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le préfet ne parait sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement du 21 mai 2015 ou sa réformation ainsi que le rejet de la demande d'annulation qu'il a présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions en date du 25 février 2016.

Vu

- les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guidi.

1. Considérant que les requêtes du préfet du Haut-Rhin visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions de la requête n° 15NC01337 :

2. Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par le préfet du Haut-Rhin contre ce même jugement ;

Sur les conclusions de la requête n° 15NC01335 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ;

4. Considérant que M.C..., qui souffre d'une insuffisance limbique complète bilatérale ainsi que des symblépharons supérieurs, séquelles d'une brûlure oculaire caustique grave, a demandé, le 13 avril 2012, au préfet du Haut-Rhin la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales en faisant valoir qu'il ne pourrait bénéficier au Kosovo d'une greffe de cellules souches ce qui constituerait un traitement approprié à son état de santé dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que le traitement dont M. C...souhaite pouvoir bénéficier constitue un procédé, au stade expérimental, s'inscrivant dans un processus de recherche mené par le centre hospitalier national d'ophtalmologie des Quinze-Vingt à Paris ; qu'à supposer que cette greffe permettrait d'améliorer l'état de santé de M.C..., celui-ci n'établit pas qu'il serait inscrit dans le protocole d'essai thérapeutique engagé par le centre hospitalier et qu'une opération serait programmée ni même seulement envisagée ; que, d'une part, il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le traitement médical actuel de M. C..., qui consiste en l'administration d'un sérum autologue et de flucon collyre, médicaments principalement destinés à soulager les douleurs, ne serait pas disponible dans son pays d'origine alors que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Alsace du 14 octobre 2011 précise notamment que l'intéressé peut avoir accès aux soins dans son pays d'origine et peut voyager sans risques ; qu'il n'est, d'autre part, pas contesté qu'il a déjà subi une greffe de membrane amniotique au Kosovo ; que, dans ces conditions, le préfet du Haut-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a estimé qu'il avait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de l'état de santé de M. C...en refusant de faire droit à sa demande de titre de séjour et a annulé la décision du 18 avril 2012 pour ce motif ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif et, le cas échéant, devant la cour ;

6. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 12 décembre 2011, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet du Haut-Rhin a donné délégation de signature à M.A..., directeur de la réglementation et des libertés publiques, " à l'effet de signer dans le cadre de ses attributions et compétences : (...) Immigration (...) les décisions portant refus de séjour (...) " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté ;

7. Considérant, en second lieu, que si le préfet du Haut-Rhin a mentionné par erreur l'article R. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rappelant à M. C... qu'il était sous le coup d'une obligation de quitter le territoire exécutoire datée du 30 août 2011, cette mention est sans incidence sur la légalité de la décision du 18 avril 2012 qui a seulement pour objet de refuser de faire droit à la demande de titre de séjour pour raisons de santé présentée par M.C... ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Haut-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a, sur demande de M.C..., annulé la décision du 18 avril 2012 par laquelle il a refusé de délivrer à celui-ci un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas dans les présentes instances la partie perdante, soit condamné à verser au conseil de M. C...une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15NC01337 du préfet du Haut-Rhin.

Article 2 : Le jugement n° 1202235 du 21 mai 2015 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 4 : Les conclusions de M. C...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... C....

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N° 15NC01335 et 15NC01337


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01335
Date de la décision : 21/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-04-21;15nc01335 ?
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