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27/12/2016 | FRANCE | N°15NC01801

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 27 décembre 2016, 15NC01801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ambulance Bridoux Fils a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler la décision du 12 mars 2014 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne lui a retiré, sans limitation de durée, son agrément de transporteur sanitaire et de condamner l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 158 696,46 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de son pr

éjudice moral.

Par un jugement n° 1400882 du 9 juin 2015, le tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ambulance Bridoux Fils a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler la décision du 12 mars 2014 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne lui a retiré, sans limitation de durée, son agrément de transporteur sanitaire et de condamner l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 158 696,46 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1400882 du 9 juin 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

La société Ambulance Bridoux Fils a, d'autre part, demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 23 juin 2013 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne a refusé de lui transférer les autorisations de mise en service de quatre véhicules affectés aux transports sanitaires terrestres qui étaient détenus par la Société Ambulances Bridoux et de condamner l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 158 696,46 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1301308 du 9 juin 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête et un mémoire enregistrés le 7 août 2015 et le 11 octobre 2016, sous le n° 15NC01801, la société Ambulance Bridoux Fils, représentée par la SELARL Ahmed Harir, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400882 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 juin 2015 ;

2°) d'annuler la décision de retrait d'agrément de transporteur sanitaire prise à son encontre par le directeur général de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne le 12 mars 2014 ;

3°) de condamner l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 368 822,50 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

4°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 12 mars 2014 a été notifié par un acte portant la date du 11 mars 2014 ;

- dès lors que l'avis du sous-comité des transports sanitaires est visé dans la décision en litige, il aurait dû être communiqué à la société ;

- la mise hors service d'un de ses véhicules ne résulte pas de sa volonté ;

- le décompte de ses véhicules ne tient pas compte de certains de ces véhicules faisant l'objet d'une instance pendante devant le tribunal administratif ;

- la décision en litige fait obstacle à la poursuite de l'activité de l'entreprise et, par suite, risque d'empêcher la procédure de redressement judiciaire d'aboutir ;

- cette décision lui a causé un préjudice financier tenant à une perte de chiffre d'affaires et à des frais d'immobilisation ainsi qu'un préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2016, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II - Par une requête et un mémoire enregistrés, sous le n°15NC01803, le 10 août 2015 et le 11 octobre 2016, la société Ambulance Bridoux Fils, représentée par la SELARL Ahmed Harir, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301308 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 juin 2015 ;

2°) d'annuler la décision de refus de transfert d'autorisation de mise en service prise à son encontre par le directeur général de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne le 25 juin 2013 ;

3°) de condamner l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 368 822,50 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

4°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision en litige peut faire obstacle à une issue favorable de la procédure de redressement judiciaire de la société ;

- elle n'a pas demandé de transfert d'autorisation dès lors qu'elle est propriétaire des véhicules en cause et que la décision est par suite entachée de détournement de procédure ;

- l'agence régionale de santé n'a pas produit le dossier de demande ;

- cette décision lui cause un préjudice financier et un préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2016, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me D...représentant la société Ambulance Bridoux Fils.

1. Considérant que la société Ambulance Bridoux fils a obtenu en septembre 2009 l'agrément pour exercer l'activité de transports sanitaires terrestres ; qu'elle a été placée en redressement judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Sedan du 13 septembre 2012 ; que le transfert des autorisations de mise en service de quatre véhicules lui a été refusé par une décision du 25 juin 2013 du directeur général de l'agence régionale de santé ; que, le 12 mars 2014, le directeur général a décidé de lui retirer l'agrément qui lui avait été délivré sans limitation de durée ; que, sous le n° 15NC01801, la société Ambulance Bridoux Fils relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 12 mars 2014 ; que, sous le n° 15NC01803, elle relève appel du jugement par lequel le même tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 juin 2013 ;

2. Considérant que les deux requêtes susvisées concernent la situation d'une même société et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 25 juin 2013 :

3. Considérant, en premier lieu, que la seule circonstance que la société ait été placée en redressement judiciaire n'imposait pas au directeur général de l'agence régionale de santé de s'abstenir de prendre à l'égard de cette société les décisions qui lui incombaient en application des dispositions du code de la santé publique ; qu'il lui appartenait ainsi de se prononcer sur la possibilité de transfert des autorisations de mise en service de quatre véhicules au profit de la société Ambulance Bridoux Fils sans tenir compte de la procédure de redressement judiciaire en cours ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 6312-4 du code de la santé publique : " Dans chaque département, la mise en service (...) de véhicules affectés aux transports sanitaires terrestres est soumise à l'autorisation du directeur général de l'agence régionale de santé " ; qu'aux termes de l'article R. 6312-37 du même code : " (...) II.-1° Le transfert de l'autorisation initiale de mise en service d'un véhicule sanitaire est soumis à l'accord préalable du directeur général de l'agence régionale de santé en cas de (...) - cession du véhicule ou du droit d'usage de ce véhicule, au profit et à la demande du cessionnaire au titre de la même catégorie et du même département " ;

5. Considérant que la société requérante soutient qu'elle n'a pas formulé de demande de transfert des autorisations de mise en service dès lors qu'elle était propriétaire des véhicules en cause ; qu'il ressort des pièces du dossier que coexistaient, jusqu'en avril 2013, deux sociétés, la société Ambulances Bridoux, d'une part, et la société Ambulance Bridoux Fils, d'autre part ; que l'agrément accordé à la société requérante, Ambulance Bridoux Fils, en septembre 2004, ne mentionne que trois véhicules ; que les autorisations de mises en service des quatre véhicules en cause ont été accordées en 2009 à la société Ambulances Bridoux ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de demander à l'agence régionale de santé de produire l'entier dossier d'instruction de la demande, la société Ambulance Bridoux Fils n'établit pas, alors même qu'elle aurait utilisé lesdits véhicules, avoir été titulaire des autorisations de mise en service correspondantes ; que dès lors que la mise en service de véhicules par une personne effectuant un transport sanitaire doit être autorisée, le directeur de l'agence régionale de santé était tenu, en application des dispositions précitées de l'article R. 6312-37 du code de la santé publique, de se prononcer sur la possibilité de transférer quatre des autorisations de mise en service accordées à la société Ambulances Bridoux à la société Ambulance Bridoux Fils ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Ambulance Bridoux Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1301308, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 juin 2013 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2014 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6312-2 du code de la santé publique : " Toute personne effectuant un transport sanitaire doit avoir été préalablement agréée par le directeur général de l'agence régionale de santé. (...) " ;

8. Considérant que la circonstance que le courrier de notification de la décision du 12 mars 2014 porte, par erreur, la date du 11 mars 2014 est sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé a retiré l'agrément qui avait été accordé à la société Ambulance Bridoux Fils ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 6313-6 du code de la santé publique : " Le sous-comité donne un avis préalable au retrait par le directeur général de l'agence régionale de santé de l'agrément nécessaire aux transports sanitaires mentionné à l'article L. 6312-2 " ; qu'aucune disposition du code de la santé publique, ni aucun principe général du droit n'imposent, avant que le directeur général de l'agence régionale de santé ne prenne sa décision, la communication de l'avis du sous-comité à la personne physique ou morale concernée par un retrait d'agrément ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article R. 6312-5 du code de la santé publique : " En cas de manquement aux obligations de la présente section par une personne bénéficiant de l'agrément, celui-ci, après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations, en préalable à l'avis du sous-comité des transports sanitaires, peut être retiré temporairement ou sans limitation de durée par décision motivée du directeur général de l'agence régionale de santé. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 6312-6 : " L'agrément est délivré aux personnes physiques ou morales qui disposent : (...) 2° De véhicules, appartenant aux catégories A, B, C ou D mentionnées à l'article R. 6312-8, véhicules dont elles ont un usage exclusif " ; qu'aux termes de l'article R. 6312-8 : " Les véhicules spécialement adaptés au transport sanitaire ressortissent aux catégories suivantes :1° Véhicules spécialement aménagés : a) Catégorie A : ambulance de secours et de soins d'urgence "ASSU" ; b) Catégorie B : voiture de secours aux asphyxiés et blessés "VSAB" ; c) Catégorie C : ambulance ; 2° Autres véhicules affectés au transport sanitaire terrestre : - catégorie D : véhicule sanitaire léger " ; qu'aux termes de l'article R. 6312-13 : " L'agrément portant à la fois sur les transports effectués au titre de l'aide médicale urgente et sur ceux effectués sur prescription médicale ne peut être délivré qu'aux personnes physiques ou morales de droit privé et aux établissements de santé publics ou privés disposant : (...) 2° D'au moins deux véhicules des catégories A, C ou D mentionnées à l'article R. 6312-8, dont au moins un véhicule des catégories A ou C ; (...) " ;

11. Considérant, d'une part, que l'agrément délivré à la société Ambulance Bridoux Fils le 23 septembre 2009 et complété le 1er octobre suivant mentionne une ambulance et deux véhicules sanitaires légers ; qu'il n'est pas contesté que l'ambulance de cette société ne peut plus circuler depuis le mois de juin 2013 en raison d'une panne de moteur ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société n'a entrepris aucune démarche en vue de faire réparer ce véhicule ; que, dans ces conditions, le directeur général de l'agence régionale de santé pouvait considérer que l'autorisation de mise en service de cette ambulance était réputée caduque en application des dispositions de l'article R. 6312-39 du code de la santé publique qui prévoit une telle caducité " Lorsque, du fait de son bénéficiaire, le véhicule est mis hors service pendant plus de trois mois ; (...) " ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, la société requérante ne pouvait se prévaloir d'autorisations de mise en service pour quatre autres véhicules ; que, dans ces conditions, la société Ambulance Bridoux Fils n'établit pas disposer du nombre de véhicules requis par les dispositions précitées de l'article R. 6312-13 du code de la santé publique ; que, d'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 3, la seule circonstance que la société ait été placée en redressement judiciaire ne faisait pas obstacle à ce que le directeur général de l'agence régionale de santé prenne à l'égard de cette société les décisions qui lui incombaient en application des dispositions du code de la santé publique ; que, dans ces conditions, le directeur général de l'agence régionale de santé a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, considérer que la société requérante ne remplissait plus les conditions lui permettant de bénéficier d'un agrément, et décider de le lui retirer, sans limitation de durée ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Ambulance Bridoux Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1400882 le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2014 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni la décision du 25 juin 2013, ni celle du 12 mars 2014 ne sont illégales ; que, dans ces conditions, aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ne peut être retenue ; que, par suite, la société Ambulance Bridoux Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que à ce que soit mis à la charge de l'agence régionale de santé, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Ambulance Bridoux Fils demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de la société Ambulance Bridoux Fils sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ambulance Bridoux Fils, et au ministre des affaires sociales et de la santé.

Copie en sera adressée au directeur général de l'agence régionale de la santé, à Me B...C..., mandataire judiciaire de la société et à Me A...E..., administrateur judiciaire de la société.

7

Nos 15NC01801, 15NC01803


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01801
Date de la décision : 27/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-01-02 Santé publique. Protection générale de la santé publique. Transports sanitaires.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : SELARL AHMED HARIR

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-12-27;15nc01801 ?
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