La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/03/2017 | FRANCE | N°15NC01377

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 23 mars 2017, 15NC01377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon de le décharger, en droits, intérêts de retard et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011.

Par un jugement n° 1301383 du 28 mai 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
>1°) d'annuler le jugement n° 1301383 du tribunal administratif de Besançon du 28 mai 2015 ;

2°) de pronon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon de le décharger, en droits, intérêts de retard et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011.

Par un jugement n° 1301383 du 28 mai 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301383 du tribunal administratif de Besançon du 28 mai 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige, en droits, intérêts de retard et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'application du régime de la marge, le service n'apportant la preuve ni d'une collusion entre lui et ses fournisseurs étrangers, ni de ce qu'il ne pouvait ignorer avoir appliqué à tort le régime de la marge à raison de la revente des véhicules d'occasion ;

- à défaut pour l'administration de démontrer son intention délibérée, il est fondé à demander la décharge des majorations pour manquement délibéré.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le service ne fonde pas les impositions en litige sur le seul fait que la carte grise des véhicules mentionnait le nom de professionnels de l'automobile ;

- le service a également démontré que M. A...consultait régulièrement les annonces Internet des véhicules qu'il vendait à ses clients, de sorte qu'il aurait dû être alerté ;

- le requérant n'a pu expliquer en quoi consistaient les frais de gestion administrative versés à la société Bianchi, ni leur mode de calcul, ni l'identité de ses contacts commerciaux au sein de ladite société, alors que l'intérêt de l'ajout d'un intermédiaire dans la chaîne des opérations n'est pas démontré ;

- la connaissance nécessaire des principes et celle de l'origine des véhicules suffit à déterminer le régime applicable aux opérations réalisées sans qu'il soit utile de connaître le prix d'achat des véhicules ;

- le service établit le caractère délibéré des manquements.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Di Candia,

- et les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public.

1. Considérant que M. A...a exercé sous la forme d'une entreprise individuelle une activité de négoce de véhicules d'occasion ; qu'à raison de cette activité, il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a estimé que M. A...avait appliqué à tort le régime de taxation sur la marge lors de la revente de vingt-huit véhicules acquis auprès de la société roumaine Develin ou des sociétés espagnoles Calas et Auto CDC ; que M. A...relève appel du jugement du tribunal administratif de Besançon qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011 ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions en litige :

2. Considérant qu'aux termes du 1° du I de l'article 256 bis du code général des impôts : " Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son état du régime particulier de franchise des petites entreprises " ; qu'en vertu du 2° bis du même I : " Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'État membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet État prises pour la mise en oeuvre des articles 312 à 325 ou 333 à 341 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 (...) " ; qu'aux termes de l'article 297 A du même code : " I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) " ; qu'aux termes de l'article 297 E de ce code : " Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur la marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre État membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur marge prévu par la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ; que lorsqu'une entreprise produit des factures émanant de ses fournisseurs mentionnant que les ventes de véhicules s'effectuaient sous le régime de la taxation sur la marge, il incombe à l'administration, si elle s'y croit fondée, de démontrer, d'une part, que les mentions portées sur ces factures sont erronées, d'autre part, que le bénéficiaire de ces achats de véhicules savait ou aurait dû savoir que les opérations présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients, et sans que pèse sur le contribuable l'obligation de vérifier la qualité d'assujetti revendeur de ses fournisseurs ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté que les vingt-huit véhicules en litige acquis par le requérant auprès des sociétés Develin, Calas, Auto CDC et Automocion, appartenaient initialement soit à des vendeurs allemands ayant cédé ces véhicules sous le régime général de la taxe sur la valeur ajoutée, soit à des sociétés allemandes, intervenant dans le secteur automobile dans le domaine de la concession, du garage ou de la construction, toutes redevables de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'elles n'avaient pas la qualité d'assujettis-revendeurs ; qu'enfin, certains de ces véhicules avaient été acquis à l'état neuf et ne pouvaient en conséquence entrer dans le champ du régime de taxation sur la marge ; qu'ainsi, l'ensemble de ces véhicules devait, lors de leur revente, être soumis à la taxe sur l'intégralité de leur prix de cession ; que les sociétés Develin, Calas, Auto CDC et Automocion n'étaient dès lors pas autorisées à appliquer le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge et à délivrer au requérant des factures faisant référence à ce régime ; que, par suite, l'administration fiscale apporte la preuve que les mentions portées sur ces factures relatives à l'application du régime de la marge étaient erronées ;

5. Considérant, d'autre part, que si M. A...était en possession de factures des sociétés Develin, Calas, Auto CDC et Automocion mentionnant l'application du régime de la taxation sur la marge, il résulte de l'instruction qu'il était en mesure de consulter lui-même les listes d'annonces de véhicules copiées à partir de sites allemands auxquels les courriels des sociétés Develin, Auto CDC et Automocion, qui ne disposaient pas de leur propre site internet, renvoyaient par un lien hypertexte ; que contrairement à ce que soutient M.A..., l'administration fiscale a joint en annexe à la proposition de rectification du 10 juillet 2012 divers exemples d'annonces auxquelles il devait nécessairement accéder depuis les sites allemands ; que ces annonces contenaient pour la plupart des informations relatives au régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux opérations en cause, lesquelles, dans une large majorité des cas, ne correspondaient pas au régime de taxation sur la marge appliqué par le requérant ; qu'en outre, à supposer même que ces mentions fussent imprécises ou inexistantes, M. A...disposait des certificats d'immatriculation des véhicules faisant apparaître qu'en raison de l'état neuf des véhicules ou de la qualité de leur ancien propriétaire, les véhicules ne pouvaient relever du régime de taxation sur la marge ; qu'en outre, M. A..., qui assurait lui-même le transport des véhicules achetés à ses intermédiaires roumain et espagnol directement de l'Allemagne vers la France, a versé des commissions à une société espagnole tierce, la société Bianchi, pour chacune des opérations réalisées auprès de la société Develin, pour des frais de gestion administrative, sans justifier de l'intérêt économique que représentaient ces frais ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments, le requérant, en sa qualité de professionnel expérimenté du secteur, ne pouvait pas ignorer que les véhicules dont il a fait l'acquisition appartenaient originellement à des sociétés qui pouvaient exercer leur droit à déduction ; que l'administration établit donc que le requérant savait ou aurait dû savoir que les opérations en litige, provenant de fournisseurs dont le rôle effectif n'était au demeurant pas démontré, présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients ;

En ce qui concerne les majorations pour manquement délibéré :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a fait application aux rectifications opérées de la majoration prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, M. A...ne pouvait ignorer la circonstance que ses fournisseurs n'avaient pas la qualité d'assujettis revendeurs et n'étaient pas autorisés à appliquer eux-mêmes le régime de taxation sur marge ; que, par suite, l'administration établit le manquement délibéré du requérant, sans que ce dernier puisse utilement se prévaloir ni de ce que la société Develin aurait fait l'objet d'un contrôle fiscal par les autorités roumaines n'ayant donné lieu à aucune rectification, ni de ce que le contrôle de facturation dont il a été l'objet a donné lieu à une clôture d'intervention ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable au titre de la période allant du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'économie et des finances.

2

15NC01377


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01377
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-06-02-08 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL BESANCON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-23;15nc01377 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award