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20/07/2017 | FRANCE | N°16NC00919

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 20 juillet 2017, 16NC00919


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La fondation Abbé A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler le certificat d'urbanisme négatif délivré le 23 juin 2014 par le maire de Chamesol au nom de l'Etat.

Par un jugement n° 1401342 du 24 mars 2016, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 mai et 30 novembre 2016, la fondation AbbéA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribun

al administratif ;

2°) d'annuler la décision du 23 juin 2014 du maire de Chamesol ;

3°) de mettre à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La fondation Abbé A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler le certificat d'urbanisme négatif délivré le 23 juin 2014 par le maire de Chamesol au nom de l'Etat.

Par un jugement n° 1401342 du 24 mars 2016, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 mai et 30 novembre 2016, la fondation AbbéA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler la décision du 23 juin 2014 du maire de Chamesol ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chamesol une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que le certificat d'urbanisme contesté n'avait pas retiré le certificat d'urbanisme tacite obtenu antérieurement avec les effets de droit qui y étaient attachés ;

- la commune ne démontre pas que le dossier a été instruit par les services compétents de l'Etat ;

- le certificat d'urbanisme ne comporte pas les mentions prévues par l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ;

- le certificat d'urbanisme est entaché d'erreur de fait en ce qu'il se fonde sur l'absence de réseaux publics, ainsi que d'erreur de droit, une telle circonstance ne justifiant pas la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif sans que l'administration vérifie au préalable que le raccordement sera réalisable ;

- la commune a commis une erreur de qualification juridique des faits en considérant que le terrain se trouvait en dehors du périmètre urbanisé de la commune ;

- subsidiairement, une des exceptions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme autoriserait l'opération prévue même si le terrain n'était pas en zone urbanisée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2017, le ministre de l'égalité des territoires et du logement conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le certificat d'urbanisme contesté n'avait pas retiré le certificat d'urbanisme tacite ;

- pour les autres moyens, il s'en remet aux écritures du préfet en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 11 décembre 2013, la fondation Abbé A...a déposé une demande de certificat d'urbanisme opérationnel prévu par le b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, en vue de la réalisation de trois lots portant chacun une habitation, sur une parcelle cadastrée ZC n° 47 située au lieudit " Champs Montants " à Chamesol, commune alors dépourvue de document d'urbanisme opposable. Un certificat d'urbanisme tacite est né le 18 février 2014. Le 23 juin 2014, la commune a délivré au nom de l'Etat à la fondation un certificat d'urbanisme négatif. La fondation Abbé A...interjette appel du jugement du 24 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre le certificat négatif du 23 juin 2014.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient l'appelante, le jugement attaqué explique, après avoir cité les textes applicables du code de l'urbanisme, les effets du certificat d'urbanisme tacite et les motifs pour lesquels, au regard de ces éléments, le certificat d'urbanisme explicite n'a pas eu pour conséquence de retirer le certificat d'urbanisme tacite. Ainsi, le jugement est suffisamment motivé.

Sur la légalité externe du certificat d'urbanisme du 23 juin 2014 :

3. Les moyens tirés de ce qu'il n'est pas établi que le certificat d'urbanisme contesté a été instruit par les services de l'Etat en méconnaissance de l'article R. 410-6 du code de l'urbanisme et de ce que ledit certificat serait entaché de vice de forme en ce qu'il ne comporte pas les mentions prévues par l'article L. 410-1 du code, qui relèvent de la légalité externe, ne peuvent être utilement invoqués dès lors que l'unique moyen de la demande de première instance se rattachait à la légalité interne.

Sur la légalité interne du certificat d'urbanisme :

4. En premier lieu, la fondation Abbé A...persiste à soutenir que le certificat d'urbanisme négatif qui lui a été délivré le 23 juin 2010 vaut retrait du certificat tacite acquis le 18 février 2014.

5. Aux termes de l'article R. 410-10 du code de l'urbanisme : " Dans le cas prévu au b de l'article L. 410-1, le délai d'instruction est de deux mois à compter de la réception en mairie de la demande (...) ".

6. Aux termes de l'article R. 410-12 de ce code : " A défaut de notification d'un certificat d'urbanisme dans le délai fixé par les articles (...) R. 410-10, le silence gardé par l'autorité compétente vaut délivrance d'un certificat d'urbanisme tacite. Celui-ci a exclusivement les effets prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 410-1, y compris si la demande portait sur les éléments mentionnés au b de cet article ".

7. Selon le quatrième alinéa de l'article L. 410-1 du même code : " Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique (...) ".

8. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le certificat d'urbanisme tacite résultant du silence gardé par l'autorité compétente a pour seul effet de faire obstacle à ce que l'administration puisse invoquer, pendant une période de 18 mois à compter de la naissance de ce certificat et pour le terrain sur lequel porte ce dernier, des dispositions d'urbanisme, un régime de taxes ou participations d'urbanisme ou des limitations administratives au droit de propriété autres que celles qui existaient à la date de ce certificat, à l'exception des dispositions ayant pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.

9. En délivrant, postérieurement à un tel certificat tacite, un certificat indiquant que le terrain ne peut être utilisé pour réaliser l'opération envisagée en raison des dispositions d'urbanisme qui lui sont applicables, l'administration, sauf dans l'hypothèse où elle opposerait ainsi des dispositions d'urbanisme entrées en vigueur après la naissance du certificat tacite, ne retire à ce dernier aucun des effets de droit qui lui sont attachés et ne peut, dès lors, être regardée comme procédant à son retrait.

10. Il s'ensuit qu'en l'espèce, le maire de Chamesol, qui n'a pas opposé de dispositions d'urbanisme entrées en vigueur après la naissance du certificat d'urbanisme tacite, n'a pas, en prenant le certificat d'urbanisme négatif, procédé au retrait du certificat d'urbanisme tacite né du silence gardé sur la demande que la fondation Abbé A...avait présenté le 11 décembre 2011 sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et n'a pas pris, contrairement à ce que soutient la fondation, deux décisions contradictoires. La requérante ne peut, dès lors, utilement soutenir que le certificat d'urbanisme explicite contesté serait illégal en ce qu'il procéderait à un retrait irrégulier du certificat d'urbanisme tacite.

11. En deuxième lieu, la fondation Abbé A...soutient que contrairement à ce qu'a mentionné le maire dans la décision contestée, son terrain est desservi par les réseaux publics et, qu'en tout état de cause, dès lors qu'un lotisseur peut se charger des travaux nécessaires, le maire ne pouvait lui opposer un certificat d'urbanisme négatif.

12. Il appartient à l'autorité compétente pour délivrer le certificat d'urbanisme d'apprécier si les équipements publics existants ou prévus susceptibles de desservir le terrain concerné permettent ou non la construction sur ce terrain. Si elle estime que tel n'est pas le cas, cette autorité peut, sous le contrôle du juge, déclarer que le terrain est inconstructible ou non utilisable pour cette opération, alors même qu'aucune règle d'urbanisme n'imposerait le refus de toute construction ou autorisation. (CE 26 décembre 2012 n° 351680).

13. D'une part, si la fondation requérante fait valoir qu'un poteau électrique et un regard d'égout se trouvent entre les terrains d'assiette de son projet et la route qui le borde, les photographies qu'elle produit montrent que ces deux ouvrages sont situés à proximité de la dernière maison qui borde la voie, aucun autre élément n'indiquant que les réseaux se poursuivent au-delà de cette construction jusqu'à la partie de la parcelle de la requérante destinée à la construction.

14. D'autre part, la seule circonstance qu'un lotisseur peut contribuer à la réalisation de réseaux publics ne suffit pas à établir que les autorités administratives prendraient la décision de prolonger leurs réseaux publics jusqu'aux trois maisons dont la fondation Abbé A... envisage la construction, y compris avec la participation financière éventuelle du lotisseur. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le maire de Chamesol a pu estimer que, compte tenu des équipements publics existants ou prévus susceptibles de desservir le terrain concerné, les constructions envisagées pouvaient ne pas être permises.

15. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : " I. En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (...) / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national (...) ".

16. D'une part, la fondation Abbé A...soutient que le terrain d'assiette du projet est situé dans une partie actuellement urbanisée de la commune. Cependant, il ressort des pièces du dossier que la partie du terrain sur laquelle il est envisagé de créer trois lots portant chacun une habitation, se situe en sortie du village, au-delà des dernières maisons situées de part et d'autre de la rue de la Caserne, le long de la voie qui prolonge cette rue, dans une vaste zone agricole, le terrain de la fondation étant d'ailleurs utilisé en pâturage et n'étant pas entouré d'habitations. Dans ces conditions, la parcelle en cause est située en dehors des parties actuellement urbanisée de la commune.

17. D'autre part, l'appelante fait valoir à titre subsidiaire que son projet relève de l'une des exceptions prévues par l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme et que les maisons dont la construction est envisagée doivent être regardées comme des équipements collectifs au sens de cet article, dès lors que la fondation est reconnue d'utilité publique et qu'elle envisage de céder les terrains à un partenaire social pour qu'il construise des habitations pour les plus démunis. Elle fait en outre valoir que le projet n'est pas incompatible avec l'activité agricole car si la parcelle est actuellement exploitée en pâture par un fermier, celui-ci pourra continuer son activité sur la partie non construite.

18. Cependant, contrairement à ce que soutient la requérante, la construction de maisons d'habitation, à usage privé, ne saurait, quels que soient les buts poursuivis par la fondation, être regardée comme conduisant à la réalisation d'un équipement collectif au sens de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le maire de Chamesol a fondé le certificat d'urbanisme contesté sur l'inconstructibilité de la parcelle appartenant à la fondation AbbéA....

19. Par suite, le maire de Chamesol a pu légalement se fonder sur les circonstances que le terrain est situé en dehors du périmètre actuellement urbanisé de la commune, qu'il n'est pas desservi par les réseaux publics, que l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme fait obstacle à la délivrance d'un certificat d'urbanisme positif et que le terrain fait partie d'un ensemble homogène de parcelles agricoles situées à proximité d'une ferme. Ces motifs justifiaient la décision contestée.

20. Il résulte de ce qui précède que la fondation Abbé A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Le certificat d'urbanisme contesté ayant été pris au nom de l'Etat, les conclusions de la fondation tendant à ce que soit mise à la charge de la commune de Chamesol, qui n'est pas partie à l'instance, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, ne peuvent être accueillies.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de la fondation Abbé A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la fondation Abbé A...et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 16NC00919


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00919
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-20;16nc00919 ?
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