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21/03/2014 | FRANCE | N°13NT00205

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 21 mars 2014, 13NT00205


Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant au..., par Me Vallée, avocat au barreau de Nantes ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008386 du 31 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant son recours dirigé contre la décision du 11 août 2010 par laquelle l'autorité consulaire française à Abidjan a refusé de déli

vrer un visa à l'enfant FatoumataC..., en qualité de famille rejoignante de...

Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant au..., par Me Vallée, avocat au barreau de Nantes ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008386 du 31 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant son recours dirigé contre la décision du 11 août 2010 par laquelle l'autorité consulaire française à Abidjan a refusé de délivrer un visa à l'enfant FatoumataC..., en qualité de famille rejoignante de refugié ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre à l'administration de délivrer le visa long séjour sollicité pour FatoumataC... dans un délai d'un mois ;

il soutient que :

- la décision du consul général de France à Abidjan du 11 août 2010 a été prise par une autorité incompétente ; le signataire de cette décision n'a pas reçu délégation de compétence pour prendre une décision de refus de délivrance de visa ; cette décision est insuffisamment motivée ;

- le ministre de l'intérieur a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que le lien de filiation avec sa fille Fatoumata n'est pas établi ; la différence de signature entre l'acte de naissance de sa fille aînée et ceux de ses deux autres enfants s'explique par l'évolution de sa signature en quatre ans ; cette différence n'est pas nature à faire douter de l'authenticité de l'acte de naissance produit ;

- la différence relative à l'identité de la mère entre les actes de naissance de Fatoumata et de ses deux autres enfants a été justifiée et rectifiée ; cette rectification n'est pas remise en cause par le ministère ;

- la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est caractérisée dès lors que le refus de visa l'empêche de vivre avec sa fille ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2013, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa s'est substituée à celle des autorités consulaires du 11 août 2010 ; les moyens tirés d'un défaut de motivation de la décision consulaire, et de l'incompétence du signataire de cette décision sont inopérants ;

- les autorités consulaires sont chargées de contrôler l'identité des demandeurs de visa, l'authenticité et la valeur probante des pièces d'état civil présentées ; le refus de visa est justifié par la production de pièces d'état civil de complaisance et l'absence d'établissement du lien de filiation entre le requérant et l'enfant Fatoumata C... ; la signature apposée par le père, en tant que déclarant, sur l'acte de naissance de l'enfant Fatoumata C...diffère de celle apposée sur les actes de naissance des deux autres enfants ; sur la copie du registre, et sur la copie intégrale de l'acte de naissance de l'enfant Fatoumata, les prénom, jour, mois et année de naissance de la mère ne correspondent pas à la copie de l'acte d'état civil de la mère alléguée ; la signature " Blé B. Gisèle " apposée sur le passeport de l'enfant Fatoumata semble être celle du représentant légal de celle-ci, alors même que sa mère alléguée demeurait en Côte d'Ivoire durant cette période ;

- le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en l'absence d'établissement de lien de filiation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 4 avril 2013 du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nantes accordant à M. C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2014 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant ivoirien, ayant obtenu la qualité de réfugié en France le 2 juin 2006, a épousé Mme B...en 2008, au Mali ; que le 29 février 2008, il a demandé à bénéficier de la procédure dite de famille rejoignante pour son épouse, et les trois enfants qu'ils présentent comme nés de leur union antérieurement à ce mariage, FatoumataC..., AssataC..., et Abou Bakar Sidik C... ; que le 11 août 2010, les autorités consulaires ont délivré à Mme B...et aux enfants Assata et Abou Bakar SidikC..., les visas sollicités, mais en ont refusé le bénéfice à l'enfant FatoumataC... ; que, par une décision implicite née le 18 octobre 2010, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté par M. C... ; que ce dernier relève appel du jugement du 31 octobre 2012, par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 août 2010 par laquelle les autorités consulaires à Abidjan ont rejeté sa demande de visa de long séjour au bénéfice de l'enfant FatoumataC..., ainsi que la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre cette décision consulaire ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision consulaire :

2. Considérant que la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise en vertu des dispositions des articles D. 211-5 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est substituée au refus initial opposé par les autorités consulaires ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de la décision consulaire sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission :

3. Considérant que lorsque la venue de personnes en France a été autorisée au titre de la procédure de famille rejoignante d'un réfugié statutaire, l'autorité consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour un motif d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère probant des actes d'état civil produits ; que, pour rejeter la demande de visa de long séjour présentée au bénéfice de l'enfant Fatoumata par M. C..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le caractère frauduleux et de complaisance de l'acte d'état civil de naissance produit, ne permettant pas d'établir le lien de filiation avec le requérant ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; que cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère ; qu'il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ;

5. Considérant que le rejet de la demande de visa présentée au bénéfice de l'enfant Fatoumata C... est motivé par les circonstances que la signature du père, en tant que déclarant, sur son acte de naissance diffère de celle apposée sur les actes de naissance de ses frère et soeur, et que, sur la copie de son acte intégral de naissance, les jour, mois et année de naissance de la mère alléguée ne correspondent pas à ceux portés sur la copie intégrale de l'acte de naissance de cette dernière ;

6. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, sur la copie intégrale de l'acte de naissance n° 324, produit à l'appui de la demande de visa d'entrée et de long séjour sollicité pour l'enfant FatoumataC..., la mère de l'enfant est nommée MoussokouraB..., née le 11 juin 1973 ; que ces mentions diffèrent avec la date de naissance de MmeB..., portée sur la copie intégrale de son acte de naissance ; que, postérieurement au refus de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, M. C... a entamé une procédure de réquisition de rectification d'un acte de naissance auprès du procureur de la République du tribunal de première instance de Bouaflé le 20 juin 2011, sollicitant la réparation de l'erreur matérielle commise dans l'acte de naissance de l'enfant Fatoumata ; que cette réquisition établie le 20 juin 2011 dispose que " Par erreur, il a été mentionné B...Moussokoura née le 05/06/1973, qu'en réalité sa mère B...Moussokoura est née le 21/03/1975 à Bouaflé ", et prévoit que mention de son dispositif doit apparaitre en marge de l'acte rectifié et qu'aucun extrait ne pourra désormais être délivré sans contenir cette rectification ; que toutefois, la nouvelle copie intégrale de l'acte de naissance de l'enfant Fatoumata comporte une erreur en ce qui concerne le prénom de la mère ; qu'en outre, le requérant produit un extrait du registre des actes de l'état civil pour l'année 1997, établi le 22 juin 2011, ainsi qu'une copie intégrale du registre des actes de l'état civil de la commune de Bouaflé pour l'année 1997, établi le 15 juillet 2011, mentionnant les prénom et date de naissance rectifiés de la mère, sans mention cependant de la réquisition de rectification, pourtant obligatoire selon les énonciations contenues dans l'ordonnance du 20 juin 2011 ; que, d'autre part, il est constant que la signature du déclarant sur l'acte de naissance n° 324 est différente de celle de M. C..., portée sur les actes de naissance des deux autres enfants ; que, dans ces circonstances, la commission de recours contre les décisions de refus de visa n'a pas fait une appréciation erronée en considérant que l'acte de naissance de l'enfant Fatoumata était frauduleux, et ne permettait pas d'établir de façon probante le lien de filiation avec le requérant ;

7. Considérant qu'en l'absence de lien de filiation établi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de délivrer à Fatoumata C...le visa de long séjour sollicité, dans le délai d'un mois, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au Ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 mars 2014.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

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N° 13NT00205


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00205
Date de la décision : 21/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. Entrée en France. Visas.


Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : VALLEE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-21;13nt00205 ?
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