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18/04/2014 | FRANCE | N°13NT01313

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 18 avril 2014, 13NT01313


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2013, présentée pour M. et Mme E...B..., demeurant..., par Me Airoldi-Martin, avocat au barreau de Strasbourg ; M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101490 du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours contre la décision des autorités consulaires à Nairobi refusant à M. E... B... ainsi qu'aux enfants

Hamdi Muhidin, Najma Muhidin, Abdirisag Muhidin et Muhiba Muhidin la d...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2013, présentée pour M. et Mme E...B..., demeurant..., par Me Airoldi-Martin, avocat au barreau de Strasbourg ; M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101490 du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours contre la décision des autorités consulaires à Nairobi refusant à M. E... B... ainsi qu'aux enfants Hamdi Muhidin, Najma Muhidin, Abdirisag Muhidin et Muhiba Muhidin la délivrance de visas d'entrée et de long séjour en qualité de membres de la famille d'un réfugié ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre aux autorités consulaires françaises à Nairobi de leur délivrer un visa d'entrée et de long séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à leur avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- le refus de délivrance des visas de long séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il ne peut leur être reproché de ne pouvoir fournir aucun document relatif à leur identité compte tenu des circonstances de l'espèce ; cependant ont été produits un acte de mariage établi par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et les actes de naissance de ces enfants qui n'ont pas été remis en cause ; Mme B... a fourni des photographies de sa famille en sa présence lors d'un de ses voyages au Kenya ; le tribunal administratif de Nantes a reconnu l'existence de contacts téléphoniques réguliers ;

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3, §1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2013, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- les déclarations de Mme B... devant l'office français de protection des réfugiés et apatrides n'empêchent pas les autorités consulaires de procéder à toute vérification des éléments produits à l'appui des demandes de visas en applications des articles L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 47 du code civil ; les requérants n'ont produit aucun document officiel probant sur leur identité et attestant d'un lien familial avec Mme B... ; les attestations de naissance établies en 2003 ne constituent pas des actes de naissance ; le passeport produit pour M. B... est un faux document de voyage ;

- la filiation et le lien marital ne sont pas établis par la possession d'état ; les photographies produites sont issues de photomontages ; contrairement à ce qu'elle affirme, Mme B... n'a pas saisi le tribunal de grande instance compétent d'une action tendant à l'établissement de la filiation par la réalisation de test ADN ;

- en l'absence de lien familial, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3, §1 de la convention internationale relative aux doits de l'enfant n'ont été méconnues ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 5 juin 2013, admettant M. et Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa demande, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2014 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme A... D... épouse B..., de nationalité somalienne, ayant le statut de réfugié en France par décision du 26 mai 2003, a sollicité le bénéfice du rapprochement familial en faveur de M. E... B..., de nationalité somalienne, qu'elle présente comme son époux, et de Hamdi, Najma, Abdirisage, et Muhiba E...qu'elle présente comme ses enfants ; que sa demande de regroupement familial a été refusée à deux reprises par deux décision du 29 juillet 2005 et du 12 mars 2007 du ministre des affaires étrangères, au motif que le poste consulaire était dans l'impossibilité d'établir de façon certaine l'identité et le lien familial l'unissant à ces personnes, faute pour ces dernières d'avoir fourni des actes d'état civil établis dans leur pays d'origine et des pièces d'identité ; que les demandes de visa d'entrée et de long séjour présentés par M. B... et les quatre enfants ont été rejetées le 5 novembre 2007 par les autorités consulaires françaises à Nairobi ; que, saisie à son tour, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé implicitement de délivrer les visas sollicités ; que M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision implicite ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint et aux enfants mineurs d'un réfugié statutaire les visas qu'ils sollicitent afin de mener une vie familiale normale ; qu'elles ne peuvent opposer un refus à une telle demande que pour un motif d'ordre public ; qu'au nombre des motifs d'ordre public de nature à fonder légalement le refus de délivrance du visa sollicité, figure la circonstance que les documents produits pour établir l'identité du demandeur et son lien familial avec le réfugié seraient, notamment en raison de leur caractère frauduleux, dépourvus de valeur probante ; qu'en outre, si l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile charge notamment l'office français de protection des réfugiés et apatrides de la mission d'authentification des actes et documents qui lui sont soumis par les réfugiés et apatrides, la mission ainsi confiée à cet établissement public est sans rapport avec la responsabilité qui incombe aux autorités consulaires de s'assurer de la véracité des renseignements produits devant elles à l'appui des demandes de visa d'entrée et de séjour en France ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de la demande de visas, M. B... a présenté uniquement des attestations de naissance pour les quatre enfants, établies le 25 novembre 2003 par le bureau des registres du gouvernement régional de Mogadiscio, ne mentionnant aucun numéro de registre d'état-civil, qui ne constituent pas des actes d'état civil ; que si, comme le soutiennent les requérants, la situation en Somalie rend très difficile la délivrance d'actes d'état civil, et alors que M. B... n'avait, lors du dépôt de sa demande de visa fourni aucun document relatif à son état civil ou à son identité, il a, postérieurement au refus des autorités consulaires à Nairobi, produit un passeport somalien établi le 16 juin 1980, dont le poste consulaire a remis en cause l'authenticité ; que la production de ce passeport devant les autorités consulaires est en contradiction avec les déclarations de Mme D... en 2004 qui avait expliqué que sa famille n'en possédait pas ; que si cette dernière a fait mention devant l'office français de protection des réfugiés et apatrides, puis la Cour nationale du droit d'asile, de son mariage avec " M. C... ", ainsi que lors du dépôt de sa demande d'acquisition de la nationalité française, dans laquelle elle a donné des informations sur l'identité et les dates des naissances des quatre enfants, concordantes avec les attestations de naissance, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'à cette occasion elle a déclaré qu'ils résidaient en Somalie, alors qu'à la même date ils déposaient leurs demandes de visas au Kenya et, d'autre part, qu'elle n'a jamais porté à la connaissance de l'administration fiscale la composition réelle de son foyer fiscal en se déclarant divorcée ; que Mme D... n'établit pas s'être rendue au Kenya pour y rencontrer M. B... et les quatre enfants ; qu'enfin, ni les photographies familiales, manifestement retouchées, ni les attestations de proches peu circonstanciées qui se bornent à indiquer que la famille de Mme D... réside au Kenya et qu'elle entretient avec eux des relations téléphoniques ou encore les attestations de virements de sommes bancaires en faveur de l'association Somalie solidarité, ne sont de nature à démontrer l'existence d'un lien de filiation ou de mariage entre Mme D... et les demandeurs de visa ; que, par suite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en considérant que les documents présentés à l'appui des demandes de visa ne permettaient pas d'établir un lien matrimonial et un lien de filiation entre Mme D... et les demandeurs de visas ; que, dans ces conditions, les moyens tirés de ce que les refus litigieux méconnaîtraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent qu'être écartés ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, aux autorités consulaires de délivrer des visa d'entrée et de long séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. et Mme B..., bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, demandent le versement au profit de leur avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2014, où siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 avril 2014.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAU

Le président,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

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N° 13NT01313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01313
Date de la décision : 18/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. Entrée en France. Visas.


Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : AIROLDI-MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-04-18;13nt01313 ?
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