La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/04/2015 | FRANCE | N°14NT00432

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 17 avril 2015, 14NT00432


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Plateaux, avocat ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200450 du 7 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2011 par lequel le maire de la commune de l'Ile-aux-Moines a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de l'Ile-aux-Moines une somme

de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il souti...

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Plateaux, avocat ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200450 du 7 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2011 par lequel le maire de la commune de l'Ile-aux-Moines a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de l'Ile-aux-Moines une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la décision de refus de permis de construire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le terrain d'assiette du projet se situe à proximité immédiate de plusieurs parcelles bâties à Er Voten, dans le prolongement de l'espace urbanisé au nord du bourg de l'Ile-aux-Moines dont il n'est pas séparé par des espaces naturels, que l'urbanisation, qui s'est développée de façon continue depuis l'agglomération jusqu'au nord de la pointe du Trec'h et de part et d'autre de la voie, ne peut pas être qualifiée de diffuse, que la parcelle située en face de la sienne est construite, que les circonstances que la parcelle était classée en zone UB au plan d'occupation des sols et qu'un permis de construire a récemment été délivré dans le secteur confirment la conformité du projet aux dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ;

- les dispositions de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme sont contraires au premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que, si cet article répond à un motif d'intérêt général tiré de la protection de l'environnement, les circonstances de l'espèce révèlent une charge démesurée et l'absence d'un juste équilibre à son détriment, que la délivrance d'un permis de construire sur une parcelle identique à la sienne constitue une disparité de traitement irrégulière, que sa parcelle n'étant pas en bordure directe du littoral et ne s'ouvrant pas sur un espace naturel, l'impératif de protection des plages et du littoral manque en fait, et que sa parcelle est classée en zone UB, qu'elle est desservie par les réseaux d'eau potable, d'électricité et de téléphone et jouxte des parcelles construites ;

Vu le jugement attaqué et la décision contestée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2014, présenté pour la commune de l'Ile-aux-Moines (56780), représentée par son maire en exercice, par Me Lahalle, avocat, qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle fait valoir que :

- la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le terrain du requérant s'ouvre largement, sur tous ses côtés, sur de vastes espaces naturels et sur le littoral, qu'il est situé dans zone d'urbanisation diffuse, que le projet constitue une extension de l'urbanisation, que la parcelle en litige n'est pas en continuité d'une agglomération ou d'un village existant, qu'elle est éloignée de 700 à 800 mètres du centre-bourg de l'Ile-aux-Moines, que l'espace entre la parcelle et le bourg est une zone d'habitat diffus, sans organisation et de faible densité, que le classement de la parcelle au plan d'occupation des sols est sans incidence sur l'application de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, et que la circonstance que d'autres autorisations de construire auraient été délivrées est inopérante ;

- la demande de première instance était tardive et par suite irrecevable dès lors que l'arrêté contesté est confirmatif de l'arrêté du 22 juillet 2011 refusant de délivrer au requérant un permis de construire pour un projet identique, et confirmé par le rejet, le 12 octobre 2011, du recours gracieux formé par le requérant, et qu'il n'a pas pu avoir pour effet de rouvrir le délai de recours contentieux ;

- le moyen tiré de la méconnaissance du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé dès lors que le refus de permis de construire en litige, opposé sur le fondement de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, ne fait pas supporter au requérant une charge spéciale, exorbitante et disproportionnée par rapport à l'objectif d'intérêt général de protection du littoral, que le refus opposé au requérant est sans lien avec la délivrance d'un permis de construire sur un terrain voisin dix ans auparavant, que le requérant ne peut se prévaloir d'aucun droit acquis à construire et que la parcelle en litige, insérée dans un espace naturel à moins de 130 mètres du rivage et située sur une île du golfe du Morbihan bénéficiant de multiples protections environnementales, entre dans le champ d'application de la loi Littoral ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 août 2014, présenté pour M. A..., qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;

il soutient en outre que :

- seule la partie ouest du terrain s'ouvre sur un espace naturel et vers le littoral, le terrain étant bordé par la voie communale, et au nord et au sud par des habitations ;

- le terrain est proche de moins de 70 mètres de la partie agglomérée du centre-bourg, comme le montre le rapport de présentation du plan local d'urbanisme approuvé par délibération du 19 mars 2014, qui précise en outre que les espaces bâtis sont essentiellement concentrés au nord de l'île, notamment vers la pointe du Trec'h ;

- sa demande devant le tribunal administratif n'était pas tardive et l'arrêté du 21 décembre 2011 n'est pas une décision purement confirmative de la décision de refus de permis de construire du 22 juillet 2011, dès lors que, même si le parti architectural était assez semblable, les demandes étaient différentes, notamment en termes d'emprise au sol et de surface hors oeuvre nette, et que les deux arrêtés ne reposent pas sur les mêmes motifs ;

- son projet n'empêchant pas l'accès au rivage et ne bouleversant pas l'aspect environnemental des lieux, le refus de permis de construire entraine une charge spéciale et exorbitante à son détriment ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2015, présenté pour la commune de l'Ile-aux-Moines qui conclut au rejet de la requête ;

Vu l'ordonnance en date du 24 février 2015 fixant la clôture d'instruction au 11 mars 2015 à 12 h, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2015 :

- le rapport de Mme Piltant, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lefevre, avocat de M. A..., et de MeC..., substituant Me Lahalle, avocat de la commune de l'Ile-aux-Moines ;

1. Considérant que par arrêté du 21 décembre 2011, le maire de la commune de l'île-aux-Moines (Morbihan) a refusé de délivrer à M. A... un permis de construire pour une maison d'habitation sur une parcelle cadastrée A 324 située au lieu-dit Er Voten ; que M. A... relève appel du jugement du 7 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement.(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, applicables à tout terrain situé sur le territoire d'une commune littorale, que ce terrain soit ou non situé à proximité du rivage, que les constructions peuvent être autorisées en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu'aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d'autres constructions, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies et plans cadastraux, que la parcelle cadastrée A 324 appartenant à M. A..., d'une contenance de 1 001 m², classée en zone NDs au plan local d'urbanisme, est située au lieu-dit Er Voten, au nord de la commune de l'Ile-aux-Moines, à une distance d'environ 700 mètres de la partie agglomérée du bourg, dans une zone d'urbanisation diffuse, caractérisée par un habitat épars et un nombre réduit de constructions séparées par de vastes terrains non construits et qui n'est pas en continuité de la zone urbanisée du bourg de l'Ile-aux-Moines ; que, par suite, le projet de construction d'une maison d'habitation constitue une extension de l'urbanisation, laquelle, à défaut d'être réalisée en continuité d'un village ou d'une agglomération, ne peut pas être autorisée sans méconnaître le I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, sans que le requérant puisse utilement se prévaloir ni du classement antérieur de sa parcelle en zone UB du plan d'occupation des sols, ni de la délivrance d'un permis de construire le 4 août 2000 dans le même secteur ;

4. Considérant que les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales selon lesquelles " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ", qui ont pour objet d'assurer un juste équilibre entre l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit de propriété, laissent au législateur une marge d'appréciation étendue, en particulier pour mener une politique d'urbanisme, tant pour choisir les modalités de mise en oeuvre d'une telle politique que pour juger si leurs conséquences se trouvent légitimées, dans l'intérêt général, par le souci d'atteindre les objectifs poursuivis par la loi ; que la circonstance alléguée selon laquelle l'application des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ferait peser sur M. A... une charge démesurée est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de l'Ile-aux-Moines, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de l'Ile-aux-Moines, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par M. A... ; que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de l'Ile-aux-Moines au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de l'Ile-aux-Moines une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et à la commune de l'Ile-aux-Moines.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 avril 2015.

Le rapporteur,

Ch. PILTANTLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

Ch. GOY

''

''

''

''

1

N°14NT00432 2

1


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Christine PILTANT
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SELARL PUBLI-JURIS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 17/04/2015
Date de l'import : 11/09/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14NT00432
Numéro NOR : CETATEXT000030491275 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-17;14nt00432 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award