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07/05/2015 | FRANCE | N°14NT00737

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 mai 2015, 14NT00737


Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 28 mars 2014 et le 4 juin 2014, présentés par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301472 du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a, à la demande de l'association Manche Nature, annulé l'arrêté du préfet de la Manche du 3 août 2012 autorisant l'exploitation par l'EARL du Scy d'un élevage porcin de 6006 animaux équivalent

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Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 28 mars 2014 et le 4 juin 2014, présentés par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301472 du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a, à la demande de l'association Manche Nature, annulé l'arrêté du préfet de la Manche du 3 août 2012 autorisant l'exploitation par l'EARL du Scy d'un élevage porcin de 6006 animaux équivalents à Raids, et autorisé l'exploitation à fonctionner à titre provisoire pour une durée de trois mois, sous réserve du respect de prescriptions identiques à celles fixées dans l'arrêté du 3 août 2012, ce délai permettant au préfet de la Manche, le cas échéant, de rectifier le plan d'épandage de l'EARL en excluant l'îlot 35 cadastré ZP 89 sur la commune de Sainteny et d'édicter dans son arrêté les prescriptions nécessaires sur les moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure des eaux superficielles des bassins versants du plan d'épandage modifié ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association Manche Nature devant le tribunal administratif de Caen ;

il soutient que :

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en ajoutant une condition supplémentaire tenant à la définition, par l'autorité préfectorale, des résultats devant être obtenus en vertu de l'alinéa 6 de l'article R. 512-28 du code de l'environnement ;

- les analyses des eaux superficielles prescrites par le tribunal afin de protéger les intérêts visés à l'article L. 511-1 ne sont pas pertinentes et coûteuses, alors que les mesures correctives prescrites par l'arrêté litigieux permettent de préserver suffisamment ces intérêts ;

- le tribunal a commis, compte tenu des mesures correctives prescrites (talus périphériques, injection directe du lisier dans les labours), une erreur dans la qualification juridique des faits en estimant que l'inclusion de l'îlot 35 cadastré ZP 89 dans le plan d'épandage ne permettait pas d'assurer suffisamment la préservation des écosystèmes aquatiques et la protection des eaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la lettre du 7 novembre 2014 par laquelle le président de chambre a mis en demeure l'EARL du Scy d'avoir à présenter ses observations dans le délai d'un mois, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2014, présenté pour l'association Manche Nature, dont le siège est 83, rue Geoffroy de Montbray à Coutances (50200), représentée par MmeA..., régulièrement habilitée, par Me Busson, avocat au barreau de Paris ; l'association Manche Nature conclut au rejet du recours du ministre et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- les observations de l'appelant ne concernent pas l'insuffisance de motivation du jugement, mais son bien fondé ;

- en application du 6 de l'article R. 512-28 du code de l'environnement, un arrêté préfectoral autorisant une exploitation porcine doit bien prescrire les moyens d'analyses et de mesures nécessaires à la surveillance des effets de l'installation sur l'environnement, en particulier sur le milieu aquatique et la qualité de l'eau, menacés par les nitrates d'origine agricole ;

- le coût des mesures d'analyse n'est pas excessif pour l'exploitation au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 du code de l'environnement ;

- l'inspecteur des installations classées, dans son rapport devant la CODERST, a constaté que l'ajout de prescriptions concernant le suivi des eaux superficielles restait possible, les exploitants ayant eux-mêmes proposé des mesures de surveillance, sans faire appel du jugement ;

- le préfet de la manche a pris un arrêté le 8 avril 2014 précisant ce plan de surveillance des cours d'eau principaux parcourant le plan d'épandage ;

- c'est sans erreur de droit et sans erreur d'appréciation des faits que le tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté d'autorisation litigieux ;

- subsidiairement, elle entend reprendre ses moyens de première instance ;

Vu le courrier du président de la deuxième chambre du 4 mars 2015 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever un moyen d'office, tiré du non lieu à statuer sur le recours du ministre de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie, dès lors que l'arrêté du 8 avril 2014 s'est substitué à l'arrêté en litige ;

Vu le mémoire en réponse au moyen d'ordre public, enregistré le 9 mars 2015, présenté pour l'association Manche Nature, qui s'en remet à l'appréciation de la cour sur le principe du non lieu à statuer et persiste dans ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en réponse au moyen d'ordre public, enregistré le 10 mars 2015, présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie qui maintient ses précédentes écritures ;

elle soutient que le recours conserve son objet, dès lors que le nouvel arrêté se borne à exécuter le jugement ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 avril 2015, présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2015 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

1. Considérant que par arrêté du 29 mai 2008, le préfet de la Manche a autorisé l'EARL du Scy à porter la capacité de l'élevage porcin qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Raids de 3 289 à 6 006 animaux équivalents (600 truies et verrats, 2270 porcelets en post sevrage et 3 752 porcs charcutiers) ; que cet arrêté a été annulé par jugement du tribunal administratif de Caen du 17 décembre 2009, confirmé par la cour administrative d'appel de Nantes le 1er juillet 2011 ; que, par arrêté du 6 août 2010, le préfet de la Manche a autorisé l'exploitation provisoire de l'élevage porcin litigieux pour 6 006 animaux équivalents ; que cet arrêté a été annulé, à la demande de l'association Manche Nature, par jugement du tribunal administratif de Caen du 20 janvier 2012 ; que par un dernier arrêté du 3 août 2012 le préfet de la Manche a autorisé l'EARL du Scy à exploiter un élevage porcin de 6006 animaux équivalents ; que, par jugement du 28 janvier 2014, le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de l'association Manche Nature, ce dernier arrêté et autorisé l'exploitation à fonctionner à titre provisoire pour une durée de trois mois, sous réserve du respect de prescriptions identiques à celles fixées dans l'arrêté du 3 août 2012, ce délai permettant au préfet de la Manche, le cas échéant, de rectifier le plan d'épandage de l'EARL en excluant l'îlot 35 cadastré ZP 89 sur la commune de Sainteny et d'édicter dans son arrêté les prescriptions nécessaires sur les moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure des eaux superficielles des bassins versants du plan d'épandage modifié ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'il appartient au juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement de se prononcer sur l'étendue des droits et obligations accordés aux exploitants ou mis à leur charge par l'autorité compétente au regard des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue ; que si, lorsque l'autorité administrative prend, pour l'exécution d'une décision juridictionnelle d'annulation, une nouvelle décision d'autorisation d'exploiter ayant un caractère provisoire, le recours dirigé contre cette décision juridictionnelle conserve son objet, il en va autrement en cas d'intervention d'une nouvelle autorisation définissant entièrement les conditions d'exploitation de l'installation et dépourvue de caractère provisoire, se substituant à l'autorisation initialement contestée ; que l'intervention de cette nouvelle autorisation, qu'elle ait ou non acquis un caractère définitif, prive d'objet la contestation de la première autorisation, sur laquelle il n'y a, dès lors, plus lieu de statuer ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et ainsi que le fait valoir l'association Manche Nature dans son mémoire en défense produit devant la cour, qu'un arrêté permettant la poursuite de l'exploitation de l'EARL du Scy a été pris le 8 avril 2014 par le préfet de la Manche après une nouvelle instruction et notamment la consultation du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) ; que cette autorisation, dépourvue de caractère provisoire, qui ne se borne pas, en exécution du jugement contesté du 28 janvier 2014, à prévoir le retrait de l'îlot 35 du plan d'épandage et à prescrire un ensemble de dispositions concernant le suivi des eaux superficielles à proximité de ce dernier, mais définit entièrement les conditions d'exploitation de l'installation, se substitue à l'autorisation initialement contestée, qu'elle abroge implicitement mais nécessairement ; que l'intervention de cette nouvelle autorisation, qu'elle ait ou non acquis un caractère définitif, prive ainsi d'objet le litige relatif à la contestation de l'autorisation du 3 août 2012 ; qu'il n'y a, dès lors, plus lieu de statuer sur le recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Caen du 28 janvier 2014 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'association Manche Nature de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'association Manche Nature au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, à l'association Manche Nature et à l'EARL du Scy.

Copie en sera transmise au préfet de la Manche.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 mai 2015.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00737


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00737
Date de la décision : 07/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : BUSSON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-05-07;14nt00737 ?
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