La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2017 | FRANCE | N°15NT00728

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 10 janvier 2017, 15NT00728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Caen :

- d'annuler la décision du 28 août 2013 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande de mutation au centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania ou au centre pénitentiaire de Nouméa ;

- d'enjoindre à l'administration de le muter sur le poste de Faa'a Nuutania, choix n° 1 de sa demande de mutation, à défaut, de réexaminer sa demande de mutation sur ces postes ultra-marins lors de la prochaine commission administrative paritair

e du corps auquel il appartient ;

- d'annuler la nomination de Mme B... en tant que l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Caen :

- d'annuler la décision du 28 août 2013 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande de mutation au centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania ou au centre pénitentiaire de Nouméa ;

- d'enjoindre à l'administration de le muter sur le poste de Faa'a Nuutania, choix n° 1 de sa demande de mutation, à défaut, de réexaminer sa demande de mutation sur ces postes ultra-marins lors de la prochaine commission administrative paritaire du corps auquel il appartient ;

- d'annuler la nomination de Mme B... en tant que lieutenant pénitentiaire stagiaire affectée au centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania et de condamner l'Etat à lui verser la somme d'un euro symbolique en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination dont il a fait objet.

Par un jugement n° 1302023 du 31 décembre 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2015, M. A...E..., représenté par la SELAFA d'avocats cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2014 du tribunal administratif de Caen ;

2°) par l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler les décisions litigieuses avec toutes conséquences de droit ;

3°) d'enjoindre au ministre de la justice de prononcer sa mutation sur l'un des postes situés à Faa'a Nuutania ou à Nouméa à compter du 3 septembre 2013, et en toute hypothèse, de réexaminer sa demande de mutation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner à lui rembourser les dépens sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du même code.

Il soutient que :

- le tribunal a dénaturé les faits en considérant que les moyens tirés de ce que les postes n'auraient pas du être profilés et que la procédure suivie en commission administrative paritaire est irrégulière sont inopérants à l'encontre de la décision contestée qui a pour objet de répondre à une demande de mutation de l'intéressé sur des postes non vacants, adressée postérieurement à l'administration et indépendamment de la tenue de la réunion de la commission administrative paritaire (CAP) des 17, 18 et 19 juin 2013 ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré comme inopérant le moyen tiré du défaut d'examen, par la CAP, de ses demandes de mutation ; tout vice de procédure portant sur l'avis d'une CAP entache d'illégalité la décision prise sur cet avis ;

- le tribunal a méconnu la charge de la preuve en considérant que les éléments qu'il a apportés ne permettaient pas à eux seuls de démontrer que la décision de refus de mutation aurait été prise pour des motifs étrangers à la circonstance selon laquelle les postes étaient fermés, ni d'ailleurs que la décision de fermer ces postes serait fondée sur des motifs autres que ceux tenant à l'intérêt du service ; en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la décision de fermeture des postes outre-mer n'avait en réalité d'autre objet que de permettre la nomination de MmeB... ;

- la décision contestée a été prise par une autorité qui ne justifie d'aucune délégation de compétence ou de signature ;

- elle est entachée d'un vice de procédure ; au regard de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984, toute mutation intervenant sans que la CAP ne se soit prononcée est entachée d'un vice de procédure ; il en est de même du fait pour une CAP de ne pas examiner l'ensemble des dossiers qui lui sont présentés ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir, les postes ayant été fermés pour en faciliter l'accès à d'autres agents ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; le ministre de la justice se garde bien de préciser si ces postes ont été fermés avant ou après la réunion de la CAP ; or, selon des représentants syndicaux présents, l'administration aurait indiqué qu'aucune des candidatures ne remplissait les conditions nécessaires à une mutation sur un poste en outre-mer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2016, le garde des Sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Une ordonnance du 8 avril 2016 a porté clôture de l'instruction au 29 avril 2016 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouchardon ;

- et les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public.

1. Considérant que M.E..., lieutenant pénitentiaire affecté au centre pénitentiaire de Condé-sur-Sarthe, a formé le 15 mai 2013 une demande de mutation pour motif familial au sein du centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania (Polynésie française) ou de celui de Nouméa (Nouvelle Calédonie), ouverts tous deux au mouvement de mutation ; qu'il a constaté, à l'issue de la réunion de la commission administrative paritaire (CAP) des 17, 18 et 19 juin 2013, que les postes qu'il sollicitait n'avaient pas été pourvus ; qu'il a alors demandé au ministre de la justice, garde des Sceaux, par courrier du 9 août 2013, de " réétudier ses demandes de mutation " auprès de l'un desdits centres ; que le ministre a rejeté cette demande par un courrier du 28 août 2013 dont M. E...a sollicité l'annulation auprès du tribunal administratif de Caen, ensemble celle de la décision portant nomination de Mme B... en tant que lieutenant pénitentiaire stagiaire au centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania ; que, dans son jugement du 31 décembre 2014, le tribunal a rejeté la requête de M.E... ; que ce dernier, qui relève appel de ce jugement, doit être regardé, au vu de ses écritures, comme demandant l'annulation de la seule décision du 28 août 2013 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée dans sa version applicable à la date de la décision contestée : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires (...). Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille (...) " ; qu'aux termes de l'article 61 de cette même loi : " Les autorités compétentes sont tenues de faire connaître au personnel, dès qu'elles ont lieu, les vacances de tous emplois, sans préjudice des obligations spéciales imposées en matière de publicité par la législation sur les emplois réservés. " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...D..., attachée principale d'administration, adjointe au chef du bureau de la gestion des personnels et de l'encadrement au ministère de la justice, signataire de la décision contestée, a reçu une délégation de signature de la directrice de l'administration pénitentiaire par arrêté du 23 août 2013, dûment publié au Journal officiel de la République française du 30 août suivant l'habilitant à signer, au nom du garde des Sceaux, ministre de la justice, et dans les limites des attributions de la sous-direction des ressources humaines et des relations sociales dont elle dépend, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit, dès lors, être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que M.E... soutient que le tribunal administratif de Caen a interprété de manière erronée les faits en jugeant inopérants les moyens tirés de ce que les deux postes sur lesquels il a candidaté n'auraient pas dû être " profilés " et de ce que la procédure suivie en CAP l'avait été de manière irrégulière ;

5. Considérant que si, dans son recours adressé à sa hiérarchie le 9 août 2013, M. E...conteste le fait que les deux postes ultramarins qu'il convoitait n'ont finalement pas été soumis à l'avis de la CAP des 17, 18 et 19 juin 2013, alors qu'il a respecté toute la procédure réservée aux postes dits " profilés " et demande que sa candidature soit réétudiée, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la séance de la commission, que les candidatures auxdits postes n'ont pas été étudiées par la CAP et, par conséquent, qu'aucun avis n'a été émis par cette instance sur une quelconque demande visant les deux postes en cause ; qu'ainsi, M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a regardé comme inopérant le moyen tiré du vice de procédure dont la décision contestée serait entachée du fait que la CAP ne s'est pas prononcée sur sa demande de mutation ;

6. Considérant, en troisième lieu, que s'il soutient que la décision de ne plus offrir les postes à la mutation a été prise dans le seul but de conserver leur disponibilité durant une année afin de les réserver à la sortie de la 18ème promotion d'élèves officiers pénitentiaires afin qu'une parente du chef de détention de Faa'a Nuutania puisse obtenir un poste outre-mer, M.E..., à qui il appartient d'établir la véracité de ses dires, n'apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations, en se bornant à faire valoir sans justification " que, selon des représentants syndicaux ayant siégé au cours de cette CAP, l'administration aurait indiqué qu'aucune des candidatures ne remplissait les conditions nécessaires à une mutation sur un poste outre-mer " ; qu'en tout état de cause, au regard notamment de la chronologie des faits, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration aurait procédé à une suppression fictive du poste sollicité par le requérant ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont la décision contestée serait entachée, au regard de sa capacité d'adaptation à l'environnement spécifique de l'outre-mer, que M. E...fait valoir, doit être écarté comme inopérant dès lors que l'autorité administrative ne s'est prononcée sur aucune demande de mutation pour un poste ultra-marin ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.E..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : "Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat (...) " ; que la présente instance n'ayant pas donné lieu à dépens au sens de l'article susvisé, les conclusions de M.E..., tendant à ce que le ministre de la justice, garde des Sceaux, soit condamné à lui verser les dépens ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. E...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...et au ministre de la justice, garde des Sceaux.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 janvier 2017.

Le rapporteur,

L. BOUCHARDONLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

V. DESBOUILLONS La République mande et ordonne au ministre de la justice, garde des Sceaux en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT00728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00728
Date de la décision : 10/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Laurent BOUCHARDON
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-01-10;15nt00728 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award