La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2017 | FRANCE | N°17NT00659

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 juin 2017, 17NT00659


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2016 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le délai de départ volontaire et a déterminé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1607493 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de la Sarthe de réexaminer la si

tuation administrative de M. B... et mis à la charge de l'Etat le versement au conseil du d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2016 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le délai de départ volontaire et a déterminé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1607493 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de la Sarthe de réexaminer la situation administrative de M. B... et mis à la charge de l'Etat le versement au conseil du demandeur de la somme de 1 000 euros, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2017, le préfet de la Sarthe demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 janvier 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il n'était pas tenu d'apprécier, au regard de l'ensemble de la situation personnelle de M.B..., l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

- l'intéressé, qui ne justifie pas avoir avec la France des liens d'une ancienneté et d'une intensité telles qu'un refus de séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2017, M.B..., représenté par Me Amara-Lebret, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder, dans le même délai et sous la même astreinte, au réexamen de sa demande de titre de séjour et du délai de départ volontaire à lui accorder ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en s'abstenant d'user de son pouvoir discrétionnaire pour régulariser sa situation alors même qu'il ne remplirait pas toutes les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- en s'abstenant d'apprécier le caractère sérieux des études suivies, le préfet a méconnu l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale et doit être annulée par voie de conséquence ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle n'est pas motivée en fait ;

- il n'a pas été procédé à un examen particulier des circonstances propres à sa situation ;

- il n'a pas eu la possibilité de demander une prolongation du délai de départ volontaire en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, une prolongation de ce délai étant justifiée par son statut d'étudiant et la poursuite de ses études, lesquelles ont jusqu'alors été menées avec succès ;

- elle est fondée sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale ;

- elle est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est fondée sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale.

La clôture de l'instruction a été fixée au 17 mai 2017 à 16 heures par une ordonnance du 3 mai 2017.

Un mémoire présenté par le préfet de la Sarthe a été enregistré le 17 mai 2017 postérieurement à la clôture de l'instruction et n'a pas été communiqué.

M. B...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 5 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bougrine a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le préfet de la Sarthe relève appel du jugement du 24 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, à la demande de M.B..., annulé son arrêté du 11 juillet 2016 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire et le pays de renvoi, lui a enjoint de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à Me Amara-Lebret, avocat de M.B..., de la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Sur l'appel principal :

2. Considérant, en premier lieu, que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les textes pris pour son application, qui précisent les cas dans lesquels les étrangers présents sur le territoire français ont droit à la délivrance d'un titre de séjour, ne font pas obligation au préfet de refuser un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de droit, sauf lorsque les textes l'interdisent expressément ; que si la régularisation à laquelle le préfet peut procéder relève de son pouvoir d'appréciation et ne constitue qu'une faculté, sous réserve de l'erreur manifeste d'appréciation, il lui appartient toujours, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est ainsi confié, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une telle mesure de régularisation ; que, dès lors, le préfet n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler sa décision portant refus de titre de séjour au motif qu'elle était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, les premiers juges ont estimé qu'il avait l'obligation d'apprécier la situation personnelle de l'intéressé, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

3. Considérant, en second lieu, que les premiers juges ne se sont pas fondés sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler la décision refusant la délivrance à M. B...d'un titre de séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ce dernier ne remplit pas les conditions pour obtenir la délivrance du titre de séjour prévu par ces dispositions est inopérant ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Sarthe n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 11 juillet 2016 rejetant la demande de titre de séjour de M.B..., portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire et le pays de renvoi ;

Sur l'appel incident :

5. Considérant que le tribunal a assorti sa décision d'annulation d'une injonction donnée au préfet de la Sarthe de procéder au réexamen de la situation administrative de M. B...; que, toutefois, eu égard au motif d'annulation retenu par les premiers juges, M. B...est fondé à demander, par la voie de l'appel incident, qu'il soit enjoint au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait ou de droit ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que M. B...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Amara-Lebret, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me Amara-Lebret de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Sarthe est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer à M. B...un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait ou de droit.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 janvier 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Amara-Lebret la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à M. A... B....

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 juin 2017.

Le rapporteur,

K. BougrineLe président,

S. Aubert

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00659


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : AMARA-LEBRET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 15/06/2017
Date de l'import : 27/06/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17NT00659
Numéro NOR : CETATEXT000034970905 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-15;17nt00659 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award