La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/03/2014 | FRANCE | N°12PA02158

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 20 mars 2014, 12PA02158


Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2012, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par MeD... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003899/5-2 du 15 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions implicites par lesquelles le président-directeur général de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a rejeté sa demande du 25 octobre 2009 tendant à engager la procédure d'abrogation du statut du personnel de la RATP et de l'avenant du 3 juillet 2000 au protocole d'a

ccord relatif au temps partiel des agents de la RATP du 24 février 198...

Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2012, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par MeD... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003899/5-2 du 15 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions implicites par lesquelles le président-directeur général de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a rejeté sa demande du 25 octobre 2009 tendant à engager la procédure d'abrogation du statut du personnel de la RATP et de l'avenant du 3 juillet 2000 au protocole d'accord relatif au temps partiel des agents de la RATP du 24 février 1983, modifié le 13 février 1990, et, d'autre part, de la décision du 14 octobre 2008 par laquelle le responsable des ressources humaines du département des services de la direction générale de la RATP a refusé de lui accorder un congé pour création d'entreprise à temps partiel ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de la RATP le versement de la somme de 2 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que de la somme de 35 euros en remboursement du droit de timbre ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu l'acte dit loi du 3 octobre 1940 relative au régime du travail des agents de chemin de fer de la Société nationale des chemins de fer français ;

Vu la loi n° 48-506 du 21 mars 1948 ;

Vu l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 59-157 du 7 janvier 1959 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849, modifié par le décret du 25 juillet 1960, notamment son article 34, repris à l'article R. 771-1 du code de justice administrative ;

Vu le statut du personnel de la RATP ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2014 :

- le rapport de Mme Larsonnier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., pour la Régie autonome des transports parisiens ;

1. Considérant que M.A..., agent de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), fait appel du jugement du 15 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions implicites du président-directeur général de la RATP rejetant sa demande du 25 octobre 2009, tendant à ce que soit engagée la procédure d'abrogation des dispositions du statut du personnel de la RATP interdisant le congé pour création d'entreprise à temps partiel et de l'avenant du 3 juillet 2000 au protocole d'accord relatif au temps partiel des agents de la RATP du 24 février 1983, modifié le 13 février 1990, et, d'autre part, de la décision du 14 octobre 2008 du responsable des ressources humaines du département des services de la direction générale de la RATP refusant de lui accorder un congé pour création d'entreprise à temps partiel ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de refus d'engager la procédure d'abrogation des dispositions du statut du personnel de la RATP interdisant le congé pour création d'entreprise à temps partiel :

2. Considérant que les dispositions de l'article 2 de l'acte dit loi du 3 octobre 1940, prévoyant que le régime de travail des agents du chemin de fer métropolitain de Paris et de la Société des transports en commun de la région parisienne est fixé par des arrêtés interministériels, ont été implicitement mais nécessairement abrogées, en ce qui concerne le personnel de la RATP, par la loi du 21 mars 1948 relative à la réorganisation et à la coordination des transports de voyageurs dans la région parisienne, qui prévoit que le statut du personnel de la RATP est établi par une délibération du conseil d'administration de la régie, approuvée par arrêté interministériel, et complété par des conventions collectives ; que ces dispositions de la loi du 21 mars 1948 ont, en vertu de l'article 5 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative à l'organisation des transports de voyageurs dans la région parisienne, été elles-mêmes abrogées à compter de l'entrée en vigueur du décret portant statut de la RATP, prévu par la même ordonnance ; que l'article 4 de ce décret, en date du 7 janvier 1959, dispose que le statut du personnel en vigueur à la date de sa publication, en ce qui concerne, notamment, la durée du travail, reste applicable et peut être modifié par délibération du conseil d'administration de la régie, approuvée par le ministre chargé des transports et le ministre chargé des finances ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du titre I, intitulé " Dispositions générales ", du statut du personnel de la RATP : " Sous réserve des exceptions prévues par les lois et règlements en vigueur en matière de cumul, il est interdit à tout agent, sous peine de mesures disciplinaires, d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative. Cette disposition ne s'applique pas à la production des oeuvres scientifiques, littéraires ou artistiques. (...) " ; qu'aux termes de l'article 24 du même statut : " (...) un congé de disponibilité peut être accordé : (...) d) pour la création d'entreprise, dont la durée est fixée à un an, éventuellement portée à deux ans si l'agent en formule la demande au moins trois mois avant le terme de la première année de congé (...) " ;

4. Considérant que M. A...soutient que les dispositions du statut de la RATP interdisant aux agents de bénéficier d'un congé à temps partiel pour création d'entreprise, alors que cette possibilité est prévue par les dispositions de l'article 17 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique, codifiées à l'article L. 3142-78 du code du travail, ainsi que, d'ailleurs, par les dispositions de l'article 37 bis de la loi du 11 janvier 1984 dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, sont entachées d'illégalité ; que, toutefois, la mise en oeuvre d'un congé à temps partiel pour création d'entreprise concerne la durée du travail ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 ci-dessus que le régime applicable à la durée du travail du personnel de la RATP est fixé par des textes particuliers, notamment par le statut de celui-ci, et non par les dispositions du code du travail relatives à cette matière ; qu'il s'ensuit que le conseil d'administration de la RATP n'était pas tenu d'intégrer, dans le statut du personnel, les disposions du code du travail ; que la circonstance que l'article 24 de ce statut prévoit la possibilité, pour les agents, de bénéficier d'un congé pour création d'entreprise sous la forme d'une mise en disponibilité, également instaurée par le code du travail, est sans incidence à cet égard ;

5. Considérant que le principe d'égalité n'implique pas que des personnes placées dans des situations différentes soient traitées de manière identique ; que, s'agissant de la durée du travail, les agents de la RATP, agents de droit privé soumis au statut du personnel de la RATP, et les salariés de droit privé, soumis au code du travail, ne sont pas placés dans la même situation ; que, par suite, il n'a pas été porté atteinte au principe d'égalité ;

6. Considérant que c'est, dès lors, à bon droit que les premiers juges, qui n'ont pas entaché leur jugement d'une contradiction de motifs, ont rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision implicite du président-directeur général de la RATP refusant d'engager la procédure d'abrogation des dispositions du statut du personnel de la RATP interdisant la mise en oeuvre d'un congé à temps partiel pour création d'entreprise ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de refus d'engager la procédure d'abrogation des stipulations de l'avenant du 3 juillet 2000 au protocole d'accord relatif au temps partiel des agents de la RATP du 24 février 1983, modifié le 13 février 1990, et de la décision du 14 octobre 2008 du responsable des ressources humaines du département des services de la direction générale de la RATP refusant d'accorder à M. A...un congé pour création d'entreprise à temps partiel :

En ce qui concerne l'avenant du 3 juillet 2000 :

7. Considérant que la RATP a, le 24 février 1983, conclu avec certaines organisations syndicales un protocole d'accord sur le travail à temps partiel des agents de la RATP, complété par deux avenants des 13 février 1990 et 3 juillet 2000 ; que M. A...a, par lettre du 25 octobre 2009, demandé au président-directeur général de la RATP d'engager la procédure d'abrogation de l'avenant du 3 juillet 2000 ; que sa demande a été implicitement rejetée ;

8. Considérant que toute contestation portant sur la légalité ou l'application et la dénonciation d'une convention collective ou d'un accord d'entreprise, conclu en application de l'article L. 134-1 du code du travail, devenu les articles L. 2233-1 et L. 2233-2 du même code, relève, sauf loi contraire, de la compétence judiciaire, hormis le cas où la contestation concerne des dispositions qui n'ont pas pour objet la détermination des conditions d'emploi, de formation professionnelle et de travail ainsi que des garanties sociales des personnels des entreprises et établissements publics visés par ces textes mais qui régissent l'organisation du service public ;

9. Considérant que le protocole d'accord conclu entre la RATP, établissement public à caractère industriel et commercial, et certaines organisations syndicales, dont l'objet est de définir le régime du travail à temps partiel et d'en préciser les modalités d'application, constitue un accord collectif complétant les dispositions statutaires applicables au personnel de la RATP, dont la dénonciation est régie par le code du travail, et ne se rapporte pas à l'organisation du service public ; que, dès lors, l'action introduite par M. A...à l'encontre de la décision implicite du président-directeur général de la RATP refusant d'engager la procédure d'abrogation de l'avenant du 3 juillet 2000, qui n'est pas détachable de l'accord collectif, relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

En ce qui concerne la décision du 14 octobre 2008 :

10. Considérant que M.A..., qui exerce les fonctions de documentaliste à l'inspection générale de la RATP, a sollicité le bénéfice d'un congé pour création d'entreprise à temps partiel de 40 % à compter du 17 novembre 2008, afin de se consacrer à un projet de création d'un commerce de restauration ; que, par une décision du 14 octobre 2008, le responsable des ressources humaines du département des services de la direction générale de la RATP lui a opposé un refus ;

11. Considérant qu'en vertu de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative à l'organisation des transports de voyageurs en Ile-de-France, la RATP constitue, ainsi qu'il a été dit, un établissement public à caractère industriel et commercial ; que, s'il appartient à la juridiction administrative d'apprécier la légalité du statut du personnel de la RATP, elle n'a pas compétence, en revanche, pour se prononcer au fond sur les litiges d'ordre individuel opposant les agents de cet établissement, qui sont soumis à un régime de droit privé, à leur employeur ; que de tels litiges relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, reproduit à l'article R. 771-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridictions primitivement saisi, doit par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal " ;

13. Considérant que la Cour d'appel de Paris, primitivement saisie du même litige, après avoir rappelé, d'une part, que le statut du personnel de la RATP prévoyait l'interdiction à tout agent d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative et, d'autre part, que l'avenant au protocole d'accord relatif au temps partiel des agents de la RATP précisait que cette interdiction était opposable aux agents travaillant à temps partiel comme à temps plein, a estimé, par un arrêt du 17 septembre 2009 passé en force de chose jugée, que la demande de M. A...impliquait que soient écartées les dispositions du statut interdisant la prise d'un congé pour création d'entreprise à temps partiel ; qu'alors qu'il lui appartenait de saisir le juge administratif d'une question préjudicielle sur la légalité des dispositions du statut du personnel en cause, la Cour d'appel a décliné la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour connaître de la légalité de ces dispositions et rejeté, sans les examiner, toutes les autres demandes des parties ; que, dans ces conditions, la Cour d'appel doit être regardée comme ayant également décliné sa compétence en ce qui concerne tant la légalité de l'avenant au protocole d'accord relatif au temps partiel que celle de la décision du 14 octobre 2008 ;

14. Considérant qu'il y a lieu, dans ces conditions et par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et de surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal ;

Sur les dépens :

15. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser la contribution pour l'aide juridique à la charge de M.A... ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. A...et de la RATP présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de M. A...tendant à l'annulation de la décision implicite de refus d'engager la procédure d'abrogation des dispositions du statut du personnel de la RATP interdisant le congé pour création d'entreprise à temps partiel sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de M. A...tendant à l'annulation de la décision implicite d'engager la procédure d'abrogation de l'avenant du 3 juillet 2000 au protocole d'accord relatif au temps partiel des agents de la RATP et de la décision du 14 octobre 2008 lui refusant un congé pour création d'entreprise à temps partiel sont renvoyées devant le Tribunal des conflits.

Article 3 : Il est sursis à statuer sur les conclusions de M. A...mentionnées à l'article précédent jusqu'à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir quel est l'ordre de juridiction compétent pour en connaître.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la RATP tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

''

''

''

''

N° 12PA02158


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02158
Date de la décision : 20/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel - Personnel - Agents de droit privé - Agents des établissements publics à caractère industriel et commercial.

Établissements publics et groupements d'intérêt public - Régime juridique des établissements publics - Personnel - Statut.

Travail et emploi - Conditions de travail.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. DEWAILLY
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-03-20;12pa02158 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award