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02/10/2014 | FRANCE | N°13PA02560

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 02 octobre 2014, 13PA02560


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me B... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207134 du 21 août 2012 du magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun, en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 août 2012 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et en fixant son pays de destination ;

2°) d

'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du V...

Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me B... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207134 du 21 août 2012 du magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun, en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 août 2012 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Versol, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Oriol , rapporteur public ;

1. Considérant que, par arrêté du 19 août 2012, le préfet du Val-de-Marne a fait obligation à M. C..., ressortissant égyptien, de quitter le territoire français, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et en fixant le pays à destination duquel il doit être éloigné ; que, par un arrêté du même jour, le préfet du Val-de-Marne a également ordonné le placement de l'intéressé en rétention administrative ; que M. C... relève appel du jugement du 21 août 2012 du magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun, en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant son pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision contestée, qui vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 211-1 et L. 511-1, indique que M.C..., qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'est pas titulaire d'un titre de séjour et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre, qu'il a contrefait une carte d'identité belge, qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement sous l'identité alors déclarée de Smir Samir, que son épouse réside également en situation irrégulière en France et qu'il ne ressort pas de l'examen de sa situation personnelle que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, doit être regardée comme suffisamment motivée, alors même que ne sont mentionnées ni la naissance en 2010 de ses fils jumeaux, ni la pathologie de son enfant Mazen ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée manque en fait ;

3. Considérant qu'il ne ressort ni des termes de la décision contestée, ni des pièces du dossier que la situation de M. C... n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier par le préfet du Val-de-Marne ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 311-12 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée.(...) " ;

5. Considérant que M. C...fait valoir qu'entré en France en 2000, il s'y maintient depuis cette date, qu'il s'est marié en 2009 à une compatriote, que des jumeaux sont nés en 2010 de cette union, que l'un d'eux nécessite un suivi médical spécialisé dont il ne pourrait pas bénéficier en Egypte, eu égard à l'instabilité que connaît ce pays et à la circonstance qu'en cas de retour, il serait isolé et sans ressources ; que, toutefois, si M. C... produit en appel la copie de son passeport muni d'un visa Schengen délivré le 8 avril 2000 au Koweït, il ne justifie de sa présence habituelle en France qu'à partir de l'année 2007 ; qu'aucune pièce du dossier ne permet d'établir que l'épouse de M. C..., également de nationalité égyptienne, résidait en situation régulière sur le territoire français à la date de la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français ; que les différents justificatifs médicaux produits par le requérant, notamment les deux certificats médicaux des 18 mars et 29 avril 2013, établis par un pédiatre exerçant à l'hôpital Robert Debré, qui signalent que l'enfant Mazen nécessite un suivi médical régulier en consultation hospitalière spécialisée et que le défaut de prise en charge pourrait avoir de graves conséquences sur la santé de l'enfant, sont insuffisamment circonstanciés et ne permettent pas d'établir que le suivi médical de l'enfant ne pourrait pas se poursuivre en Egypte ; que le requérant qui n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales en Egypte, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans, n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et qu'elle a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme que M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne a méconnu les dispositions précitées des articles L. 313-11 et L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Val-de-Marne n'a pas entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C... ;

6. Considérant qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 2 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour que l'enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille " ; que ces stipulations, qui ne créent pas de droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir, ne peuvent utilement être invoquées par M.C... ;

7. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de ladite convention : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que l'enfant malade du requérant ne pourrait pas bénéficier d'un suivi approprié à son état de santé dans son pays d'origine, ni que ses deux enfants ne pourraient y poursuivre leur scolarité ; que si M. C... se prévaut de ce que l'exécution de la mesure d'éloignement aurait pour conséquence de le séparer de son enfant Mazen, rien ne s'oppose toutefois à un départ de la cellule familiale en Egypte, les enfants et l'épouse du requérant, étant également de nationalité égyptienne et en situation irrégulière sur le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. " ;

9. Considérant que la décision contestée, qui vise notamment le 3° du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique que M. C... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre, qu'il a dissimulé des éléments de son identité et a fait usage d'une carte d'identité et d'un permis de conduire belges falsifiés, qu'il ne manifeste aucune intention de quitter volontairement le territoire français et n'établit pas disposer de ressources en vue d'organiser lui-même son voyage ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. C...et méconnu l'étendue de ses compétences en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire alors que M. C... se trouvait entrer dans le cas prévu au f) du 3° du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code précité et que les circonstances invoquées, mais non établies, de son ancienneté de séjour, de sa bonne insertion et de la nécessité de son maintien France en raison de l'état de santé de son enfant ne permettent pas de regarder le risque de fuite comme non établi ; que M. C...n'est par conséquent pas fondé à soutenir que la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ; qu'enfin, M. C...ne peut se prévaloir directement des dispositions du 2° de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE qui ont été transposées en droit interne par la loi du 16 juin 2011 à l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français et refusant un délai de départ volontaire ayant été écartés, l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée par M. C...à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ; que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est privée de base légale pour ce motif ;

12. Considérant que si M. C...soutient que son retour en Egypte avec son fils Mazen aurait un grave impact sur la santé de ce dernier, il ne n'établit pas par les pièces produites ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

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N° 13PA02560


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02560
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : BAGHOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-10-02;13pa02560 ?
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