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21/10/2014 | FRANCE | N°14PA00679

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 octobre 2014, 14PA00679


Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée par le préfet de police, qui demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1309756/5-3 du 11 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation de l'arrêté du 21 février 2003 rejetant la demande de regroupement familial présentée, au bénéfice de sa fille, par Mme D...E..., et de la décision du 21 mai 2013 portant rejet du recours gracieux formé par celle-ci, a ordonné au préfet de police d'autoriser le séjour en France deA..., fille de Mme E..., au titre du regroupement fa

milial, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement...

Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée par le préfet de police, qui demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1309756/5-3 du 11 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation de l'arrêté du 21 février 2003 rejetant la demande de regroupement familial présentée, au bénéfice de sa fille, par Mme D...E..., et de la décision du 21 mai 2013 portant rejet du recours gracieux formé par celle-ci, a ordonné au préfet de police d'autoriser le séjour en France deA..., fille de Mme E..., au titre du regroupement familial, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'État le versement à Me G...de la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Paris ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2014 :

- le rapport de M. Cantié, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeE..., ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 22 mars 2020, a sollicité le 10 décembre 2011 l'admission au séjour de sa filleA..., née au Maroc le 14 août 1997, au titre du regroupement familial ; que, par arrêté du 21 février 2013, le préfet de police a rejeté cette demande au motif que l'enfant, titulaire d'un document de circulation valable jusqu'au 2 juin 2013, était présente sur le territoire et que Mme E...ne faisait valoir aucun élément de nature à justifier une exception à la règle selon laquelle la présence hors de France du bénéficiaire de la procédure de regroupement familial constitue un préalable à la mise en oeuvre de cette procédure ; que le recours gracieux formé par Mme E...contre cette mesure a été rejeté par décision du 21 mai 2013 ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 11 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation de ces deux actes, lui a enjoint d'autoriser le séjour en France deA..., fille de Mme E..., au titre du regroupement familial, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'État le versement à Me G...de la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle ;

Sur la fin de non-recevoir :

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article R. 811-10-1 du code de justice administrative : " (...) le préfet présente devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat lorsque le litige est né de l'activité des services de la préfecture dans les matières suivantes : 1° Entrée et séjour des étrangers en France (...) " ; qu'il résulte de l'article 4 de l'arrêté du n° 2013-00224 du 22 février 2013 du préfet de police accordant délégation de la signature préfectorale au sein du Service des affaires juridiques et du contentieux, publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris n° 17 du 1er mars 2013, accessible tant au juge qu'aux parties, que M. Jean-Pierre Louis-Philippe, secrétaire administratif de classe exceptionnelle, chef de la section du contentieux des étrangers, est habilité, en cas d'absence ou d'empêchement de certaines autorités, à signer les mémoires et recours nécessaires à l'exercice des missions fixées par le troisième alinéa de l'article 4 de l'arrêté n° 2006-21578 du 26 décembre 2006 relatif aux missions et à l'organisation du Service des affaires juridiques et du contentieux, qui a été publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris n°1 du 2 janvier 2007, selon lequel la section du contentieux des étrangers est " chargée de traiter les dossiers relatifs au séjour et à l'éloignement des étrangers, à l'exclusion des requêtes en première instance contre les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers et des procédures de référés concernant les étrangers " ; que, par suite, dès lors qu'il n'est ni établi ni allégué que les autorités précitées n'étaient pas effectivement absentes ou empêchées à la date de l'arrêté attaqué, M. H...était habilité à signer la requête d'appel au nom et pour le compte du préfet de police ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par Mme E...doit être écartée ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. " ; qu'aux termes de l'article L. 411-6 du même code : " Peut être exclu du regroupement familial : (...) 3° Un membre de la famille résidant en France. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la jeune A...est entrée en France en 2002 à l'âge de cinq ans et réside sur le territoire auprès de sa mère et de ses deux soeurs, nées en 1979 et 1986, qui ont la nationalité française ; qu'elle a été scolarisée à compter de l'année 2003 et achevait son année de 3ème au collège Valmy de Paris à la date de l'arrêté attaqué ; qu'il n'est pas contesté que l'enfant, qui est née de père inconnu, est dépourvue d'attaches familiales au Maroc ; que le refus de regroupement familial en litige n'a pas pour effet de l'obliger à retourner vivre dans son pays d'origine et donc de la séparer de sa mère et de ses soeurs résidant en France ; qu'en outre, la jeuneA..., âgée de quinze ans à la date de l'arrêté contesté, était titulaire d'un document de circulation lui permettant de résider en France et de voyager ; que, dans ces conditions, le refus d'admission au séjour n'a pas méconnu son intérêt supérieur au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont accueilli, pour annuler les décisions attaquées, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ;

6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E...;

7. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2013-00003 du 4 janvier 2013, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 11 janvier suivant, accessible tant au juge qu'aux parties, le préfet de police a donné à M. Christophe Besse, conseiller d'administration, chef du sixième bureau de la direction de la police générale, délégation pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C...F..., sous-directeur de l'administration des étrangers, tous actes, arrêtés, décisions dans la limite de ses attributions ; que, par suite, dès lors qu'il n'est ni établi ni allégué que M. F...n'était ni absent ni empêché, M. B...était habilité à signer un arrêté statuant sur la demande d'admission au séjour présentée par un étranger dans le cadre du regroupement familial ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 21 février 2013 rejetant la demande présentée par Mme E...fait mention des motifs de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque en fait et doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

10. Considérant, qu'eu égard à la situation personnelle de la jeune A...et des effets de l'arrêté litigieux, tels qu'ils sont énoncés au point 4, et nonobstant les problèmes de santé dont fait état Mme E...qui sont sans incidence sur la situation de sa fille et, par suite sur la légalité des décisions contestées, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que ce refus porte au droit de l'enfant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts en vue desquels il a été pris ou serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation de l'arrêté du 21 février 2003 rejetant la demande de regroupement familial présentée par Mme E...et de la décision rejetant le recours gracieux formé par celle-ci, lui a ordonné d'autoriser le séjour en France deA..., fille de Mme E..., au titre du regroupement familial, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'État le versement à Me G...de la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées en appel par Mme E...sur le fondement des mêmes dispositions ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1309756/5-3 du 11 décembre 2013 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme E...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées.

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N° 14PA00679


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00679
Date de la décision : 21/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : BAISECOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-10-21;14pa00679 ?
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