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21/10/2014 | FRANCE | N°14PA00952

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 octobre 2014, 14PA00952


Vu la requête, enregistrée le 28 février 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Piquois ; M. B...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1305521 du 28 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2013 par lequel le préfet de police lui a retiré sa carte de résident ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui restituer sa carte de résident dans le délai d'un mois à compter de la date de notificat

ion de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mett...

Vu la requête, enregistrée le 28 février 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Piquois ; M. B...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1305521 du 28 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2013 par lequel le préfet de police lui a retiré sa carte de résident ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui restituer sa carte de résident dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros à Me Piquois en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité sur l'Union européenne ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2014 :

- le rapport de M. Cantié, premier conseiller,

- et les observations de Me Piquois avocat de M.B... ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant bangladais né le 2 juillet 1976, entré en France le 31 décembre 2000, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié par décision de la Commission de recours des réfugiés en date du 18 juin 2004 ; qu'il a été mis en possession, eu égard à cette qualité, d'une carte de résident valable du 23 février 2005 au 22 février 2015 ; que par un arrêté en date du 11 mars 2013, le préfet de police lui a retiré ce titre de séjour sur le fondement de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. B...relève appel du jugement en date du 28 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que si M. B...soutient que le mémoire en réplique, enregistré au greffe du Tribunal administratif de Paris le 28 octobre 2013, n'aurait pas été pris en compte par les premiers juges, il ressort des visas annexés à la minute du jugement attaqué, qui en font partie intégrante dès lors qu'ils ont été signés par le président de la formation de jugement, par le rapporteur et par le greffier d'audience conformément à l'article R. 741-7 du code de justice administrative, que ce mémoire a été visé et analysé ; qu'en outre, le mémoire invoqué ne contient aucun moyen auquel les premiers juges se seraient abstenus de répondre dans les motifs du jugement ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le jugement du 28 janvier 2014 serait irrégulier ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que, par arrêté n° 2013-00003 du 4 janvier 2013 accordant délégation de la signature préfectorale au sein de la Direction de la Police Générale, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris n° 3 le 11 janvier 2013, le préfet de police a donné délégation à Mme D...C..., agent à cette direction, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent l'examen des demandes de titre de séjour, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi ni même allégué qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées lors de la signature de l'arrêté contesté ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué, pris postérieurement à la mesure de publication, manque en fait et doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; que ces dispositions ne prévoient pas la saisine obligatoire de la commission du titre de séjour dans le cas où, comme en l'espèce, l'autorité administrative décide de retirer la carte de résident délivré à un étranger sur le fondement de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de saisine de cette commission est inopérant et ne peut donc être accueilli ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique (...) " ; que selon l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent./ A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) infligent une sanction (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le préfet de police a informé M.B..., par lettre du 8 janvier 2013, de ce qu'il envisageait de lui retirer sa carte de résident compte tenu des infractions à la législation du travail relevées lors du contrôle de son commerce " BD Informatique " situé 90 rue Saint Blaise à Paris 20ème arrondissement, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et L. 8251-1 du code du travail, et lui a demandé de lui faire connaître ses éventuelles observations à ce sujet dans un délai de quinze jours à la compter de la date de notification de ce courrier ; que, par une lettre du 22 janvier 2013 adressée au préfet de police, le conseil de M. B...a présenté ses observations ; que si cette lettre comporte la mention : " en vous priant de bien vouloir me faire tenir l'ensemble du dossier dans le respect du caractère contradictoire de cette procédure punitive ", la circonstance que l'administration se serait abstenue de donner suite à cette demande est sans incidence sur le respect des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui ne fixent aucune obligation en matière d'accès au dossier ; que, dans ces conditions, M.B..., qui a été ainsi mis à même de présenter utilement ses observations écrites et n'a pas demandé à pouvoir présenter des observations orales, n'est pas fondé à soutenir que l'administration n'aurait pas respecté les droits de la défense ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, ayant occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail. " ; que selon les dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail, reprises à l'article L. 8251-1 de ce code : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ; que la décision de retrait de la carte de résident à l'étranger entrant dans le champ d'application de ces dispositions n'a pas pour objet et ne saurait avoir pour effet de priver l'intéressé de la qualité de réfugié qu'il a préalablement obtenu, alors même que cette qualité a pu justifier la délivrance de ce titre spécifique, dont la validité est de 10 ans, en application des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du même code ; que cette décision de retrait ne constitue pas une mesure d'éloignement ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'article L. 314-6 précité serait contraire aux objectifs fixés par la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 qui concernent les conditions dans lesquelles les réfugiés peuvent être privés de cette qualité ou éloignés du pays qui leur a accordé sa protection ; que, par ailleurs, le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors que l'arrêté attaqué, qui est exclusivement fondé sur l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas assorti d'une mesure d'éloignement, ne constitue pas une décision entrant dans le champ d'application du droit de l'Union européenne ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de police et du compte-rendu d'enquête dressés le 28 novembre 2012, que M. B...a été interpellé, en qualité de gérant de la société BD Informatique, pour des faits de dissimulation d'emploi de salariés, dans le cadre d'une procédure de flagrant délit auquel ont été associés des inspecteur de l'URSSAF ; qu'il a été constaté que trois personnes étaient en situation de travail dans les locaux de l'entreprise alors que M. B...n'était pas présent ; que l'une de ces personnes était dépourvue d'un titre de séjour l'autorisant à travailler en France ; que le fait qu'il s'agirait du frère de l'intéressé est sans incidence sur la qualification des faits au regard des dispositions précitées de l'article L. 8251-1 du code du travail ; que le requérant ne produit aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles son frère n'était pas employé dans son entreprise ; que s'il fait valoir qu'il n'a pas fait l'objet de poursuites pénales, cette circonstance n'a pas d'incidence sur le bien-fondé de la sanction administrative prise sur le fondement de l'article L. 314-6 susrappelé ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué a pu être légalement fondé sur ces dispositions ; qu'eu égard à la situation de M.B..., qui se borne à faire valoir qu'il réside en France depuis douze ans en qualité de réfugié, et à la gravité des faits qui lui sont imputables, le préfet de police n'a pas, en retirant la carte de résident dont l'intéressé était titulaire, décidé d'une sanction disproportionnée ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'aucun texte ni aucun principe n'impose à l'autorité compétente, lorsqu'elle se fonde sur les dispositions de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de délivrer spontanément à l'intéressé une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an ; qu'il incombe à l'étranger dont la carte de résident a été retirée de solliciter la délivrance d'un tel titre de séjour ; qu'il suit de là que M.B..., ne peut utilement se plaindre de ce que le préfet de police n'a pas statué sur son droit à la délivrance d'une carte de séjour temporaire en prenant l'arrêté attaqué ; que, contrairement à ce qu'il fait valoir, la circonstance qu'il ne peut être légalement éloigné compte tenu de sa qualité de réfugié n'implique pas par elle-même la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; que le fait, qui n'est pas démontré, que l'intéressé aurait sollicité vainement la délivrance d'un titre postérieurement à l'arrêté contesté est sans incidence sur la légalité de cet acte ;

10.Considérant, en septième et dernier lieu, qu'il ressort de l'arrêté attaqué que le préfet de police a mentionné dans son arrêté les dispositions de l'article L. 511-4, 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au soutien du motif tiré de ce que M. B...ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que ces dispositions ne constituent pas le fondement de la mesure de retrait de la carte de résident ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de police se serait fondé à tort sur celles-ci doit être écarté comme inopérant ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.

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N° 14PA00952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00952
Date de la décision : 21/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : PIQUOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-10-21;14pa00952 ?
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