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10/11/2014 | FRANCE | N°14PA00504

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 10 novembre 2014, 14PA00504


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 août 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1313434/5-3 du 26 décembre 2013, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de police de délivrer un certificat de résidence à M. B... sur le fondement de l'articl

e 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et a condamné l'Etat à lui verser un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 août 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1313434/5-3 du 26 décembre 2013, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de police de délivrer un certificat de résidence à M. B... sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février 2014 et 28 février 2014, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1313434/5-3 du 26 décembre 2013 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris.

..................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Par décision du président de la formation de jugement, le rapporteur public a été dispensé, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Marino, président assesseur,

- et les observations de Me A...substituant Me De Clerck, avocat de M. B... ;

1. Considérant que M.B..., né le 11 mai 1950, de nationalité algérienne, a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence algérien sur le fondement des dispositions des 1 et 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par un arrêté du 23 août 2013, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 26 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé, après en avoir suspendu l'exécution par une ordonnance du 7 octobre 2013, l'arrêté précité ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit: / 1. au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...)";

3. Considérant que, pour annuler l'arrêté du 23 août 2013 précité, le Tribunal administratif de Paris a considéré que le caractère habituel de la résidence en France de M. B... depuis l'année 2003 était établi par les pièces versées au dossier ; que, toutefois, M. B...n'a produit, au titre de l'année 2003 qu'une attestation d'hébergement du centre d'action sociale protestant rédigée en 2008 ainsi qu'une ordonnance médicale du mois d'août, au titre de l'année 2004, que trois ordonnances médicales toutes datées des mois de novembre et décembre et une attestation d'affiliation à l'aide médicale d'Etat et, au titre de l'année 2006, qu'une attestation d'affiliation à l'assurance maladie ; que ces documents sont trop peu nombreux pour établir la présence habituelle en France de M. B...au cours des années concernées ; que cette présence n'est pas davantage démontrée par les " attestations de suivi social " rédigées par le centre d'action sociale protestant, qui font état, sans aucune précision de temps et de lieux, de ce que l'association accompagnerait M. B...sur le plan social, juridique et administratif depuis 2004 ou par l'attestation rédigée le 2 mai 2013 par le médecin de M.B..., certifiant que l'intéressé se rendrait régulièrement au centre municipal de santé de Pantin depuis 2002 ; qu'ainsi, le préfet de police est fondé à soutenir que les pièces produites par M. B...ne permettent pas de regarder comme établie sa présence en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté précité du 23 août 2013 ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...B..., devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de police de joindre à sa décision l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police ; que si M. B...fait valoir qu'il est, dès lors, impossible d'en déterminer l'auteur, il ressort des pièces du dossier de première instance que le préfet a produit une copie de cet avis et que le nom et la signature de son auteur, le docteur Dufour, y apparaissent lisiblement ;

6. Considérant, en deuxième lieu, d'une part, que l'arrêté contesté, qui vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié et l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait mention de ce que si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il mentionne, en outre, que l'intéressé n'est pas en mesure d'établir, par les documents qu'il produit, le caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans, notamment au titre des années 2003, 2004, 2006, 2008 et 2009, et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où résident son épouse et ses sept enfants ; qu'il mentionne, enfin, que M. B...n'établit pas être exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des traitements contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, d'autre part, il ne ressort pas, en tout état de cause, des pièces du dossier que M. B...aurait fait état auprès du préfet, lors de sa demande de titre de séjour, de circonstances humanitaires exceptionnelles ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles il est fondé ;

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des termes de l'arrêté du 23 août 2013 que le préfet de police se serait estimé lié par l'avis du médecin chef ou qu'il n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation de M.B..., nonobstant la circonstance qu'il ne mentionne pas l'existence de toutes les attaches familiales de l'intéressé en France ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays " ;

9. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'avis du 25 janvier 2013 du médecin, chef du service médical de la préfecture de police de Paris, si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. B...en produisant un certificat médical rédigé le 9 septembre 2013, soit postérieurement à la date de l'arrêté litigieux, qui fait état de l'indisponibilité du traitement approprié en Algérie, lequel consiste en une surveillance médicale et des bilans vasculaires dont la fréquence n'est, au demeurant, pas précisée, n'établit pas que, contrairement à ce qu'a estimé le médecin chef du service médical de la préfecture de police de Paris, il ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine d'une prise en charge adaptée à son état de santé, alors notamment qu'il ressort des listes de médicaments anti-hypertenseurs produites par le préfet que les médicaments prescrits à l'intéressé au cours des années 2012 et 2013 sont, pour la plupart d'entre eux, disponibles en Algérie ;

10. Considérant, d'autre part, que si M. B...fait état de ce que les pathologies dont il souffre nécessitent un suivi régulier en France et de ce qu'il s'est inséré socialement et professionnellement après être demeuré plusieurs années sans domicile fixe, et qu'ainsi des circonstances exceptionnelles justifieraient que lui soit délivré un titre de séjour, M. B...ne peut utilement, au regard des stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, qui régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, se prévaloir de telles circonstances, lesquelles ne présentent au demeurant pas un caractère exceptionnel ;

11. Considérant que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) La carte de résident d'un an portant la mention - vie privée et familiale - est délivrée de plein droit : (...) 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

13. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 3, que M. B...n'établit pas avoir résidé de manière habituelle en France au titre des années de 2003, 2004 et 2006 ; que le caractère continue de sa présence sur le territoire national n'est pas non plus établi au titre des années 1998 à 2002, l'intéressé se bornant à produire deux attestations qui se contredisent s'agissant des périodes durant lesquelles il aurait été hébergé par son oncle et par l'association " La Mie de Pain " ; que si une des filles du requérant, avec laquelle ce dernier n'établit pas entretenir des liens, réside régulièrement en France sous couvert d'un titre de séjour " étudiant ", ainsi qu'une de ses soeurs, de nationalité française, son épouse et cinq des six enfants survivants du couple résident en Algérie ; que, par suite, et nonobstant la circonstance que M. B...bénéficie de contrats d'insertion depuis 2011 avec les Restaurants du Coeur en qualité d'agent de plonge, la décision de refus de titre de séjour litigieuse n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée compte tenu des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6-5 5 de l'accord franco-algérien ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant que, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 août 2014 refusant de délivrer un titre de séjour à M. B...et l'obligeant à quitter le territoire français ; que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées par M. B...aux fins d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 26 décembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

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N° 14PA00504


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : DE CLERCK

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 10/11/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14PA00504
Numéro NOR : CETATEXT000029781093 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-11-10;14pa00504 ?
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