La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2014 | FRANCE | N°14PA02924

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 décembre 2014, 14PA02924


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2014, présentée pour M. D... A...B..., demeurant..., par Me C... ; M. A... B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403487/12 du 15 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 11 avril 2014 par lesquelles le préfet du Val-d'Oise a décidé de le reconduire vers son pays d'origine et de le placer en rétention administrative pour une durée maximale de cinq jours ;

2°) d'annuler, pour excès de p

ouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer ...

Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2014, présentée pour M. D... A...B..., demeurant..., par Me C... ; M. A... B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403487/12 du 15 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 11 avril 2014 par lesquelles le préfet du Val-d'Oise a décidé de le reconduire vers son pays d'origine et de le placer en rétention administrative pour une durée maximale de cinq jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que M. D...A...B..., ressortissant congolais né

le 10 juillet 1982 et entré en France le 31 juillet 2010 selon ses déclarations, a sollicité le 25 août 2010 la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que par un arrêté du 28 juin 2012, le Préfet du Val-d'Oise a refusé de délivrer un titre de séjour à l'intéressé au titre de l'asile ; que, par ailleurs, par un arrêté du 9 août 2011, confirmé le 27 avril 2012, le préfet du Val-d'Oise a refusé de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" à M. A...B...sur le fondement de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 25 février 2013, le préfet du Val-d'Oise a enfin refusé de délivrer un titre de séjour à l'intéressé sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code ; que par un arrêté du 11 avril 2014, le préfet du Val-d'Oise a décidé de reconduire

M. A...B...dans son pays d'origine ou dans tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible, au motif qu'il travaillait sans autorisation des services compétents ; que par un second arrêté du même jour, le préfet du Val-d'Oise a placé l'intéressé en centre de rétention administrative pour une durée maximale de cinq jours ; que M. A...B...relève régulièrement appel du jugement du 15 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la décision de reconduite à la frontière :

2. Considérant, en premier lieu, que si M. A...B...soutient que la décision contestée est insuffisamment motivée, il ressort des termes de celle-ci que la mesure de reconduite à la frontière a été prise au motif que l'intéressé travaillait sans autorisation des autorités compétentes, en méconnaissance de l'article L. 5221-5 du code du travail ; que, dans conditions, la décision en litige comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que tout justiciable peut demander l'annulation des dispositions réglementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d'action ou par voie d'exception, qu'après l'expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l'homme " ; que son champ d'application est précisé par son article 2 selon lequel : " 1. La présente directive s'applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un Etat membre (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte clairement de ces dispositions que la directive n'est applicable qu'aux décisions de retour qui sont prises par les Etats membres au motif que les étrangers sont en situation de séjour irrégulier ; qu'en revanche, la directive n'a pas vocation à régir les procédures d'éloignement qui reposent sur des motifs distincts, notamment la menace à l'ordre public ou la méconnaissance d'autres normes de portée générale, telle que l'obligation de détenir une autorisation de travail pour exercer une activité professionnelle ; qu'ainsi, les décisions prises sur le fondement de l'article L. 533-1 (2°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne relèvent pas de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, alors même qu'elles peuvent légalement intervenir à l'encontre d'étrangers en situation irrégulière, dès lors que le motif qui fonde ces décisions n'est pas l'irrégularité du séjour des intéressés mais l'exercice d'une activité professionnelle sans autorisation des services compétents ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les objectifs de cette directive doit être écarté ;

6. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que si M. A...B...soutient que la décision attaquée méconnaît les stipulations précitées, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'il est célibataire et sans charges de famille en France, d'autre part, que sa mère réside toujours en République démocratique du Congo, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans et, enfin, qu'il réside en France depuis seulement juillet 2010 ; que, dans ces conditions, compte tenu notamment des conditions et de la durée de son séjour en France, c'est sans méconnaître les stipulations précitées, ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé que le préfet du Val-d'Oise a pu décider de le reconduire à la frontière ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

9. Considérant que si M. A...B...soutient encourir des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine, il ressort des pièces du dossier que par des décisions du 29 décembre 2011 et 3 mai 2012, l'Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont refusé de reconnaître à l'intéressé la qualité de réfugié ; que si M. A...B...fait valoir que son père, alors agent de sécurité du ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo, a été tué au début du mois d'août 2009, soit quelques jours après une attaque armée de la résidence du ministre, survenue selon les dires du requérant le 25 juillet 2009, l'Office a relevé dans sa décision du

29 décembre 2011 que la date de l'attaque donnée par le requérant était erronée au regard des informations publiques consultables à ce sujet ; que l'article de presse paru dans le journal " Le Palmarès " du 24 juin 2011 et faisant état de l'assassinat du père de M. A...B...par des militaires ne saurait être regardé comme suffisamment probant, dès lors qu'il comporte la même erreur de date ; que le certificat médical établi le 1er juillet 2011 par le docteur Idrissi ne permet pas d'établir les risques invoqués par M. A...B..., dès lors qu'il se borne à reprendre le récit du requérant et précise qu'il souffre d'un état anxieux et dépressif lié aux évènements relatés par l'intéressé ; qu'ainsi, M. A...B...n'établit pas les risques qu'il estime encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, c'est sans méconnaître les stipulations précitées, ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation, que le préfet du Val-d'Oise a pu fixer la République démocratique du Congo comme pays vers lequel l'intéressé serait reconduit ;

Sur la décision de placement en rétention :

10. Considérant, en premier lieu, que si M. A...B...soutient que la décision querellée est insuffisamment motivée, il ressort des termes de celle-ci que le placement en rétention de l'intéressé a été décidé au motif qu'il ne pouvait être assigné à résidence sur le fondement de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'absence d'un passeport valide et d'un justificatif de domicile ; qu'ainsi, la décision en litige comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A...B...soulève l'exception d'illégalité de la mesure de reconduite à la frontière à l'égard du placement en rétention administrative dont il a fait l'objet, il ressort des motifs adoptés précédemment que le préfet du Val-d'Oise pouvait légalement décider de reconduire l'intéressé vers son pays d'origine ;

12. Considérant, enfin, que M. A...B...reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance et tiré de ce que son placement en rétention administrative méconnaîtrait l'article L. 551-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen, repris en appel sans éléments nouveaux, par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D ÉC I D E :

Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.

..................................................................................................................

''

''

''

''

2

N°14PA02924


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02924
Date de la décision : 31/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : AUCHER-FAGBEMI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-12-31;14pa02924 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award