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03/03/2015 | FRANCE | N°13PA04419

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 03 mars 2015, 13PA04419


Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2013, présentée pour la commune de

Maisons-Alfort, représentée par son maire, par Me A... ; la commune de Maisons-Alfort demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300899 du 30 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à la société Coala la somme de 13 000 euros, assortie des intérêts au taux légal majoré de deux points à compter du 22 juillet 2012, avec capitalisation à compter du 22 juillet 2013 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Coala deva

nt le Tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de la société Coala la s...

Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2013, présentée pour la commune de

Maisons-Alfort, représentée par son maire, par Me A... ; la commune de Maisons-Alfort demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300899 du 30 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à la société Coala la somme de 13 000 euros, assortie des intérêts au taux légal majoré de deux points à compter du 22 juillet 2012, avec capitalisation à compter du 22 juillet 2013 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Coala devant le Tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de la société Coala la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal a entaché d'irrégularité son jugement en répondant à l'un des moyens soulevés par la note en délibéré produite par la commune, sans communiquer cette note à la société Coala ;

- c'est à tort que le tribunal a qualifié " d'échanges informels intervenus entre le pouvoir adjudicateur et la société attributaire " l'accord conclu entre les parties en mars 2012 pour que les travaux soient achevés au plus tard le 6 mai 2012 ;

- en estimant que si la commune de Maisons-Alfort entendait définir une nouvelle date d'achèvement des travaux, elle devait conclure un avenant modifiant les stipulations relatives au délai d'exécution, alors qu'en réalité, un nouvel accord contractuel était intervenu, le tribunal administratif a entaché son jugement d'une contradiction de motifs ;

- la requête de la société Coala n'était pas recevable, le règlement du décompte et le principe de l'unicité de ce décompte mettant un terme à toute possibilité de former une réclamation après l'expiration du délai de 45 jours prévu par l'article 50.1.1 du CCAG-travaux ; en l'espèce, le décompte général a été arrêté le 5 juillet 2012 ;

- les pénalités de retard appliquées à la société Coala étaient justifiées ; l'avenant n'avait pas nécessairement à revêtir un formalisme particulier ; le principe de loyauté des relations contractuelles doit s'appliquer en l'espèce ; la nouvelle date contractuelle d'achèvement des travaux a été fixée au 6 mai 2012 ; les pénalités ont donc été appliquées au titre de la période comprise entre le 6 mai et le 1er juin 2012 ;

- le montant des pénalités n'est pas manifestement excessif ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2014, présenté pour la société Coala, par MeB..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Maisons-Alfort au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 octobre 2014, présenté pour la commune de Maisons-Alfort, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 8 septembre 2014 fixant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction au 10 octobre 2014 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 février 2015, présentée pour la commune de Maisons-Alfort, par Me A... ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2015 :

- le rapport de Mme Petit, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vrignon, rapporteur public,

- les observations de Me Coquel, avocat de la commune de Maisons-Alfort ;

1. Considérant que, par un marché de travaux notifié le 19 mars 2012, la commune de Maisons-Alfort a confié à la société Coala le réaménagement d'aire de jeux pour enfants pour un montant de 134 586, 05 euros HT, soit 160 964, 92 euros TTC ; que la commune a procédé le 19 juin 2012 à une réception des travaux sans réserves avec effet au 1er juin 2012 et a réglé le montant de la dernière facture que lui a adressée la société Coala mais en déduisant une somme de 13 000 euros à titre de pénalités de retard ;que par un jugement du 30 octobre 2013, le Tribunal administratif de Melun, saisi par la société Coala, a condamné la commune à verser à celle-ci la somme de 13 000 euros, assortie des intérêts au taux légal majoré de deux points à compter du 22 juillet 2012, avec capitalisation à compter du 22 juillet 2013 ; que la commune de Maisons-Alfort fait appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, que lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; qu'il résulte des propres termes du jugement que le tribunal administratif a examiné la note en délibéré produite devant lui par la commune de Maisons-Alfort, mais qu'il n'a pas pris en compte, pour statuer, les éléments qui y étaient contenus ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette note aurait dû être soumise au contradictoire ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

3. Considérant, d'autre part, que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune contradiction de motifs ; que, par ailleurs, le moyen tiré de ce que " le tribunal administratif aurait dénaturé les faits de l'espèce " se rattache au bien-fondé du jugement et non à la régularité de celui-ci ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Considérant que la commune de Maisons-Alfort soutient que la réclamation présentée par la société Coala était irrecevable, car présentée après l'expiration de délai de quarante-cinq jours ayant, en vertu de l'article 50.1.1 du cahier des clauses administratives-travaux, commencé à courir à compter de la notification du décompte général du marché ; que, toutefois, le courriel du directeur général des services techniques de la commune du 5 juillet 2012, qui ne comporte aucun récapitulatif des sommes dues au titulaire du marché, ne peut être regardé comme un décompte général au sens de ces stipulations ; qu'en l'absence de notification d'un décompte général, le délai de quarante-cinq jours mentionné ci-dessus n'a pas commencé à courir ; que, par ailleurs, le paiement, par la commune, de la dernière facture de la société Coala, datée du

4 juin 2012, déduction faite des pénalités de retard, n'a pas eu pour effet de faire courir ce délai ni de faire obstacle à la présentation, par la société Coala, d'une réclamation relative à l'application des pénalités de retard ; qu'ainsi, le mémoire en réclamation, adressé à la commune de Maisons-Alfort le 10 octobre 2012, n'était pas tardif ; que, par suite, la demande de première instance était recevable ;

Sur le bien-fondé de l'application de pénalités de retard :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 81 du code des marchés publics : " Sauf dans le cas de l'échange de lettres prévu au 1° du II de l'article 35, les marchés et accords-cadres d'un montant supérieur à 15 000 Euros HT sont notifiés avant tout commencement d'exécution. Pour les marchés et accords-cadres passés selon une procédure formalisée, la notification consiste en un envoi d'une copie du marché ou de l'accord-cadre signé au titulaire. La date de notification est la date de réception de cette copie par le titulaire. A l'exception du cas de l'échange de lettres, le marché ou l'accord-cadre prend effet à cette date " ; qu'aux termes de l'article 20-1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux issu de l'arrêté du 28 septembre 2009 applicable au marché en cause : " En cas de retard imputable au titulaire dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué une pénalité journalière de 1/3000 du montant hors taxes de l'ensemble du marché, de la tranche considérée ou du bon de commande. (...) 20.1.1. Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'acte d'engagement : " Les travaux devront être impérativement terminés avant le

20 mars 2012 " ; qu'aux termes de l'article 5 du cahier des clauses administratives particulières du marché, relatif au délai d'exécution : " Le marché court à compter de sa notification prescrivant le démarrage des travaux. Les travaux devront être impérativement terminés avant le

20 mars 2012 " ; qu'aux termes de l'article 9-1 de ce même cahier des clauses administratives particulières relatif aux pénalités : " Par dérogation à l'article 20-1 du CCAG travaux, lorsque le délai contractuel est dépassé par le fait du titulaire, celui-ci encourt par jour de retard

(et sans mise en demeure préalable) une pénalité de 500 euros H.T. par jour calendaire de retard " ;

6. Considérant que la date contractuelle initiale d'achèvement des travaux était fixée au 20 mars 2012 ; que la commune n'a toutefois notifié le marché à la société Coala que par un courrier reçu par celle-ci le 27 mars 2012 ; que l'ordre de service prescrivant le commencement des travaux lui a ensuite été adressé, par télécopie, le 2 avril 2012 ; qu'ainsi, la date de livraison contractuellement imposée par la commune de Maisons-Alfort est antérieure à la date à laquelle elle a notifié à la société Coala le marché ainsi qu'à celle du premier ordre de service prescrivant le commencement des travaux ; que, par suite, comme le reconnaît d'ailleurs elle-même la commune, la date du 20 mars 2012 ne pouvait plus être regardée comme la date contractuelle d'achèvement des travaux ; qu'il appartenait à la commune, si elle le jugeait utile, de prévoir un avenant au marché modifiant les prescriptions relatives au délai d'exécution des travaux ; que la commune se prévaut, il est vrai, d'une réunion s'étant tenue le 21 mars 2012 et d'échanges de courriels intervenus dans les jours suivants ; que, toutefois, si cette réunion et ces courriels ont concerné la date d'achèvement des travaux envisagée pour le 6 mai 2012, ils ne peuvent être regardés comme un accord contractuel qui aurait été conclu entre la société Coala et la personne responsable du marché ; que la commune de Maisons-Alfort ne peut utilement, en l'absence d'avenant, invoquer le principe de loyauté des relations contractuelles, la société Coala ayant d'ailleurs exécuté les travaux dans un délai de onze semaines, qui était celui initialement prévu ; que, par suite, comme l'on estimé à bon droit les premiers juges, c'est à tort que la commune de Maisons-Alfort a mis à la charge de la société Coala des pénalités de retard ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Maisons-Alfort n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamnée à payer la somme mentionnée ci-dessus ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Maisons-Alfort le versement à la société Coala de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Maisons-Alfort est rejetée.

Article 2 : La commune de Maisons-Alfort versera à la société Coala la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Maisons-Alfort et à la société Coala.

Délibéré après l'audience du 13 février 2015, où siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Auvray, président-assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 mars 2015.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU Le greffier,

S. LAVABRE

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA04419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA04419
Date de la décision : 03/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-03 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Pénalités de retard.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: Mme VRIGNON-VILLALBA
Avocat(s) : CABINET BDPS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-03;13pa04419 ?
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