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06/05/2015 | FRANCE | N°14PA03034

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 06 mai 2015, 14PA03034


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1312731 du 13 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 28 août 2013 prononçant l'expulsion du territoire français de

M. B...A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Le préfet de police soutient :

- que la demande de M. A...en première instance était irrecevable faute de contenir l'exposé des faits et moyens

ainsi que l'énoncé des conclusions prévus à l'article R. 411-1 du code de justice administrative ...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1312731 du 13 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 28 août 2013 prononçant l'expulsion du territoire français de

M. B...A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Le préfet de police soutient :

- que la demande de M. A...en première instance était irrecevable faute de contenir l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions prévus à l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- que l'arrêté du 8 août 2013 prononçant l'expulsion de M. A...du territoire français, qui a été régulièrement notifié à l'intéressé le 3 septembre 2013, comprenait la mention des voies et délais de recours ;

- que si le mémoire complémentaire, présenté par l'intermédiaire du conseil de M.A..., comprenait des conclusions à fin d'annulation ainsi que des moyens de faits et de droit à l'appui de ces conclusions, il n'a été enregistré au greffe du tribunal que le 28 novembre 2011, soit postérieurement au délai de recours contentieux ;

- que c'est à tort que les le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 8 août 2013 au motif qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'en effet, si le tribunal a retenu la durée de séjour de M. A...en France, ainsi que son caractère régulier à compter de 1985, l'intéressé a passé une grande partie de son séjour en prison, le quantum des peines prononcées à son encontre s'élevant à plus de vingt années d'emprisonnement ;

- que si le tribunal a retenu l'intensité des liens qui unissent M. A...à sa famille résidant sur le sol français, l'intéressé ne vit plus ni avec sa compagne ni avec ses enfants et ne produit aucun élément probant de nature à démontrer qu'il entretiendrait des liens effectifs avec ces derniers ou qu'il subviendrait effectivement à leurs besoins ;

- qu'en dépit de la durée de son séjour, M. A...ne justifie d'aucune insertion sur le territoire français ;

- qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ;

- que s'agissant des autres moyens soulevés en première instance, il s'en rapporte à ses écritures devant le Tribunal administratif de Paris ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2015, présenté pour M. A...par

Me Ospital ; M. A...conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...soutient :

- que sa demande devant le tribunal était recevable dès lors que les circonstances dans lesquelles la notification de l'arrêté d'expulsion du 28 août 2013 a été effectuée ne lui permettaient pas de développer des moyens à l'encontre de cet arrêté ;

- que l'arrêté du 28 août 2013 méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'en effet, il est le père de trois enfants de nationalité française avec lesquels il est toujours resté en contact et aux besoins desquels il subvient ;

- que le directeur de l'administration pénitentiaire a estimé que son attitude courageuse lors de l'agression d'un surveillant de la prison constituait un signe en faveur de son pronostic de réadaptation sociale ;

- qu'il a très souvent travaillé lorsqu'il était en détention ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2015 :

- le rapport de Mme Mosser, président assesseur,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,

- et les observations de Me Ospital, avocat de M.A... ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né le 24 mai 1958, a fait l'objet le

28 août 2013 d'un arrêté d'expulsion du préfet de police ; que le préfet de police relève appel du jugement du 13 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ; que selon l'article R. 421-1 de ce code : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il est constant que l'arrêté d'expulsion du 28 août 2013, qui comportait l'indication des voies et délais de recours, a été notifié à l'intéressé le 3 septembre 2013 alors que ce dernier était détenu à la maison d'arrêt de la Santé ; que, si M. A...fait valoir qu'il ne lui a pas été remis copie de cet arrêté, il n'établit pas toutefois ne pas en avoir eu connaissance et a d'ailleurs saisi le tribunal administratif de Paris dès le 5 septembre 2013 ; que le refus de l'intéressé de signer cette notification est sans incidence sur le déclanchement des délais de recours contentieux qui ont commencé à courir le 4 septembre 2013 pour expirer le 4 novembre 2013 à minuit ;

4. Considérant, d'autre part, que si M. A...fait valoir que son conseil n'a été destinataire de l'arrêté en litige que le 31 octobre 2013, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que ledit arrêté a été transmis, par télécopie, par la conseillère pénitentiaire et de probation au conseil de M. A...le 11 septembre 2013, lequel a d'ailleurs saisi, par un courrier en date du

20 septembre 2013, reçu le 26 septembre 2013, le ministre de l'intérieur d'un recours hiérarchique ; que toutefois, l'introduction de ce recours administratif, qui aurait pu interrompre le délai de recours contentieux si il avait été introduit en préalable à la saisine du juge, n'a pas pu, en l'espèce, interrompre ce délai dès lors qu'un recours juridictionnel avait déjà été introduit par l'intéressé ;

5. Considérant, enfin, que la demande adressée au tribunal administratif de Paris par

M. A...le 5 septembre 2013 ne comportait l'énoncé d'aucune conclusion ni d'aucun moyen ; que sa demande n'a été complétée par l'exposé de conclusions et de moyens que par un mémoire en réplique enregistré le 25 novembre 2013, soit après l'expiration du délai de recours de deux mois qui expirait le 4 novembre 2013 ; qu'ainsi, ce mémoire n'a pu régulariser la demande initiale ; que, par suite, la demande de M. A...devant le tribunal ne répondait pas aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code précité et était, par suite, irrecevable ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a écarté la fin de non-recevoir qu'il avait opposée et tirée de ce que la demande de M. A...méconnaissait les dispositions de l'article R. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu par suite d'annuler les articles 1er et 2 du jugement attaqué et de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n°1312731 du 13 mai 2014 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2015, à laquelle siégeaient :

Mme Driencourt, président de chambre,

Mme Mosser, président assesseur,

M. Cheylan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 mai 2015.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03034


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03034
Date de la décision : 06/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : OSPITAL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-06;14pa03034 ?
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