Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 juin 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
Par un jugement n° 1411134/3-3 du 9 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. E...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par requête enregistrée par voie dématérialisée le 12 janvier 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. E...devant le Tribunal administratif de Paris ;
Il soutient que :
-c'est à tort que les premiers juges ont regardé comme opérant à l'encontre de la décision de refus de titre le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention de New York
- l'arrêté contesté ne méconnaît ces stipulations dans aucune de ses dispositions dès lors que M. E...ne vit pas avec sa fille, d'ailleurs née seulement quatre mois après son entrée en France, que l'intéressé n'établit pas exercer le droit de visite qui lui a été reconnu par jugement rendu le 26 mars 2013 par le Tribunal de grande instance de Paris, que ce n'est qu'à compter du mois de janvier 2014 qu'il a commencé à s'acquitter de la pension alimentaire dont il est redevable ;
- cet arrêté a été pris par une autorité compétente, est suffisamment motivé, ne méconnaît ni le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
La requête a été communiquée à M.E..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Auvray a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
1. Considérant que, par l'arrêté contesté du 3 juin 2014, le préfet de police a refusé de délivrer à M.E..., ressortissant brésilien né le 7 août 1987 à Salvador-Bahia, un titre de séjour sollicité sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que, pour prononcer l'annulation, dans toutes ses dispositions, de l'arrêté contesté, les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
3. Considérant qu'ainsi que le relève le préfet de police, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant est inopérant au soutien de conclusions tendant à l'annulation d'une décision portant refus de titre de séjour qui, faute d'impliquer par elle-même le retour de l'intéressé dans son pays d'origine, n'a ni pour objet, ni pour effet, de séparer un parent ou les parents de leurs enfants ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant pour annuler, dans toutes ses dispositions, son arrêté du 3 juin 2014 ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. E...devant le tribunal ;
6. Considérant, en premier lieu, que M. Christophe Besse, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du 6ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers de la direction de la police générale de la préfecture de police et auteur de l'arrêté contesté, a reçu délégation du préfet de police par arrêté du 7 avril 2014 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 11 avril suivant, à l'effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles n'étaient pas empêchées ou absentes lors de la signature de l'arrêté contesté ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrête doit être écarté comme manquant en fait ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté mentionne les circonstances de droit et de fait qui le fondent dans toutes ses dispositions ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M.E..., cet arrêté est suffisamment motivé ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) " ;
9. Considérant que si M. E...est père d'une enfant française, A..., née le 10 février 2012, il ressort des pièces du dossier que les parents, qui avaient conclu un pacte civil de solidarité, se sont séparés dès le 8 mai 2012, que Mme B...D..., mère de l'enfant, a fait signifier la rupture de ce pacte civil par exploit d'huissier le 19 mars 2013, après avoir attrait l'intimé devant le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Nanterre ; que ce tribunal, par jugement du 26 mars 2013, constate que l'autorité parentale est exercée conjointement, reconnaît à M. E...un droit de visite et fixe à 90 euros la contribution mensuelle que ce dernier doit verser à la mère pour pourvoir à l'entretien et à l'éducation de la jeuneA... ; que si l'intimé établit verser, d'ailleurs seulement depuis le mois de janvier 2014, une pension alimentaire mensuelle de 100 euros à son ex-compagne , il ne justifie pas, par la seule attestation de son ex-compagne, qu'il s'occuperait de son enfant et pourvoirait à son entretien ainsi qu'à son éducation ; que dans ces conditions, il ne peut être regardé comme remplissant les conditions prévues au 6° de l'article L. 313-11 du code précité; que M. E...n'est dès lors pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait fait une inexacte application des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 de ce code ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.E..., entré en France selon ses déclarations seulement le 22 octobre 2011, est célibataire depuis qu'il s'est séparé de sa compagne dès le 8 mai 2012 ; qu'ainsi qu'il a déjà été dit, l'intéressé ne peut être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son jeune enfant, qui vit chez sa mère ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, contrairement à ce que soutient M.E..., cet arrêté n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 3 juin 2014 ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1411134/3-3 du Tribunal administratif de Paris du 9 décembre 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C...E....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Fuchs Taugourdeau, président,
M. Auvray, président-assesseur,
Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 juin 2015.
Le rapporteur,
B. AUVRAYLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAULe greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00121