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16/07/2015 | FRANCE | N°14PA05064

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 16 juillet 2015, 14PA05064


Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2014, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par Me B...; M. A...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1409219/12 du 25 octobre 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 20 octobre 2014 l'obligeant à quitter le territoire sans délai et mentionnant le pays de destination et de la décision prise le même jour le plaçant en rétention administrative ;

2°) d'annuler, pour

excès de pouvoir, cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre à l'autorité com...

Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2014, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par Me B...; M. A...demande à la Cour :

1º) d'annuler le jugement n° 1409219/12 du 25 octobre 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 20 octobre 2014 l'obligeant à quitter le territoire sans délai et mentionnant le pays de destination et de la décision prise le même jour le plaçant en rétention administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre à l'autorité compétente de l'éloigner à destination d'un pays de son choix ;

Il soutient que :

- les conditions de notification de l'obligation de quitter le territoire et de la décision de placement en rétention administrative sont irrégulières dès lors qu'il n'a pu bénéficier du concours effectif d'un interprète ;

- la décision portant placement en rétention est insuffisamment motivée ;

- c'est à tort que le préfet a considéré qu'il présentait un risque de se soustraire à l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il demeurait à Dreux et que son passeport était en cours de validité ;

- la mesure d'éloignement, qui est fondée sur les circonstances qu'il n'a accompli aucune démarche administrative depuis son entrée en France en 2009 et qu'il ne justifiait pas d'un domicile fixe et d'un passeport en cours de validité, est entachée d'erreur de fait ;

- il encourt un risque personnel en cas de retour en Turquie, eu égard au réquisitoire et au mandat d'arrêt dont il a fait l'objet ;

Vu le jugement et les décisions attaquées ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 février 2015, présenté par le préfet d'Eure-et-Loir, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir, en les réfutant, que les moyens invoqués par M. A...ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2015, le rapport de M. Cantié, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant turc né le 1er octobre 1985, interpellé le 20 octobre 2014 à la suite d'un contrôle routier, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai prise par arrêté en date du 20 octobre 2014 du préfet d'Eure-et-Loir qui a placé l'intéressé en rétention administrative par décision du même jour ; que M. A...relève appel du jugement du 25 octobre 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces actes ;

2. Considérant, en premier lieu, que les conditions dans lesquelles ont été notifiés à M. A... l'arrêté et la décision du préfet d'Eure-et-Loir sont sans incidence sur la légalité de ces actes ; que, par suite, M. A...ne peut utilement invoquer l'irrégularité de la notification des mesures prises à son encontre le 20 octobre 2014 ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français:/ (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a dissimulé son identité lors de son interpellation, qu'il n'a pas justifié de son entrée régulière sur le territoire et a été définitivement débouté du droit d'asile en 2010, et qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 3 octobre 2013, notifiée le 21 octobre suivant, à laquelle il n'a pas déféré ; qu'il ne justifiait pas d'un domicile effectif ; que, dès lors, il se trouvait dans un des cas où, en application du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code précité, le risque de soustraction à la mesure d'éloignement est présumé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une circonstance particulière ferait obstacle à ce qu'en l'espèce, ce risque soit regardé comme établi ; que M. A...ne fait état d'aucune circonstance relative à sa situation personnelle justifiant l'octroi d'un délai de départ de volontaire ; que, dès lors, les moyens tirés du l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient M.A..., l'arrêté attaqué n'est pas fondé sur les circonstances qu'il n'aurait accompli aucune démarche administrative depuis son entrée en France en 2009 et qu'il ne justifierait pas d'un passeport en cours de validité ; que, dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que cet acte serait entaché d'erreur de fait sur ces points ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que si M. A...soutient qu'il encourt un risque personnel en cas de retour en Turquie, la seule circonstance qu'il aurait fait l'objet d'un réquisitoire et d'un mandat d'arrêt émis par les autorités de ce pays ne suffit pas à établir la réalité d'un tel risque ; qu'en l'absence de toute précision sur la nature de la menace invoquée par l'intéressé et de tout commencement de preuve sur la réalité de cette menace, le moyen dirigé contre la décision distincte faisant mention du pays de destination ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que la décision attaquée fait mention des motifs de droit et de fait qui constituent le fondement de la mesure de placement en rétention administrative de M. A... ; que, par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée ;

8. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; que selon l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (...) " ; qu'au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 561-2 du code précité, la notion de garanties de représentation effectives, suffisantes pour prévenir un risque de fuite, doit être appréciée au regard des conditions de résidence et de logement de l'étranger, et au regard, notamment, de la possession ou non de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ou encore du respect ou non, par l'étranger, des décisions prises à son encontre et des obligations lui incombant en matière de police des étrangers ;

9. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 4, que M. A...a dissimulé son identité lors de son interpellation, n'a pas déféré à une précédente mesure d'éloignement et ne dispose pas d'un domicile effectif ; que, dans ces conditions, et alors même que l'intéressé se prévaut de ce qu'il peut justifier d'un passeport en cours de validité, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet d'Eure-et-Loir a estimé, au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce, que le placement en rétention administrative de M. A...était la seule mesure de nature à prévenir le risque que celui-ci se soustraie à l'obligation de quitter le territoire sans délai prise à son encontre ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet d'Eure-et-Loir.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- M. Cantié, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juillet 2015.

Le rapporteur,

C. CANTIÉLe président,

E. COËNT-BOCHARD

Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA05064


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Christophe CANTIE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : DEPIED

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 16/07/2015
Date de l'import : 30/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14PA05064
Numéro NOR : CETATEXT000030912338 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-16;14pa05064 ?
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