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31/07/2015 | FRANCE | N°14PA02666

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 juillet 2015, 14PA02666


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 juin 2014 et 15 juillet 2014, présentés pour M. E... C..., demeurant..., par MeD... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304319/3 du 7 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2013 par lequel la préfète de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet a

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3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-et-Marne de lui délivrer une ca...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 juin 2014 et 15 juillet 2014, présentés pour M. E... C..., demeurant..., par MeD... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304319/3 du 7 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2013 par lequel la préfète de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- la préfète de Seine-et-Marne n'a pas apporté la preuve de la régularité de la délégation de signature ;

- l'arrêté contesté est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cet arrêté contrevient aux stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié ;

- la préfète de Seine-et-Marne a entaché son arrêté d'erreur de droit et d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en méconnaissance des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- en estimant que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales était inopérantes à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, alors que son état de santé nécessite un suivi médical indisponible au Maroc, les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreur de droit ;

- à la date où ils ont statué, la décision portant obligation de quitter le territoire français, ancienne de plus d'un an, était caduque en application des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les premiers juges ont omis à statuer sur ce point ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2015 présenté par la préfète de Seine-et-Marne qui conclut au rejet de la requête ; elle soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2015 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêté du 10 janvier 2013, la préfète de Seine-et-Marne a pris à l'encontre de M.C..., de nationalité marocaine, une décision portant obligation de quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, en fixant le pays de destination ; que M. C...relève régulièrement appel du jugement du 7 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que M. C...doit être regardé comme soutenant que les premiers juges ont omis de prononcer un non lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire laquelle serait caduque dès lors qu'elle est intervenue il y a plus d'un an ; que, toutefois la décision d'obligation de quitter le territoire n'ayant été ni retirée ni abrogée à la date du jugement attaqué, ainsi qu'au demeurant à la date du présent arrêt, la demande de M. C...n'est pas devenue sans objet et n'a pas perdu tout intérêt ; qu'il s'ensuit que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges auraient omis de prononcer un non lieu à statuer du fait de la caducité de la décision d'obligation de quitter le territoire ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...A..., signataire de la décision contestée, bénéficiait d'une délégation de signature accordée par arrêté de la préfète de Seine-et-Marne du 13 août 2012, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 36 du 4 septembre 2012 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment les articles L. 211-1 et L. 511-1 paragraphes I et II ; qu'elle indique que M. C...n'a pas été en mesure de présenter son passeport muni d'un visa d'entrée en France et a déclaré ne pas avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qu'il est célibataire, sans charge de famille sur le territoire et n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales; que, par suite, cette décision qui énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, doit être considérée comme suffisamment motivée au sens de la loi du 11 juillet 1979, alors même qu'elle ne mentionne pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle du requérant ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. C...soutient qu'entré en France en 2003, il s'y maintient depuis plus de dix ans, qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il n'a plus d'attache dans son pays d'origine son père étant décédé ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la présence en France de M. C...n'est pas établie avant juin 2007 ; qu'il ne conteste pas être célibataire sans charge de famille ; que s'il a produit des certificats médicaux à partir de 2010, et en dernier lieu, les 29 février et 25 juillet 2012, ces documents ne font état que d'un suivi médical, et sont insuffisamment étayés pour démontrer que le suivi médical ne pourrait pas se poursuivre au Maroc ; que, par suite, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que cette décision n'a ainsi pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la préfète de Seine-et-Marne ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.C... ;

7. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 et des articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié, qui ne font l'objet d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne peuvent qu'être écartés ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du

4 novembre 1950 " ;

9. Considérant que si M. C...soutient que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'il a invoqué contre de la décision portant obligation de quitter le territoire français était opérant dès lors que celle-ci constitue, en application du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement, il ressort des termes de l'article L. 513-2 du code susvisé que la reconduite de l'étranger hors du territoire national résulte de la décision fixant le pays de destination ; qu'en première instance M. C...n'a présenté aucune conclusion contre de la décision fixant le pays de destination ; que dans ces conditions, les premiers juges ont pu à bon droit relever que ledit moyen dirigé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a pas pour objet de renvoyer l'étranger dans son pays d'origine, était inopérant ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Mme Amat, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 juillet 2015.

Le rapporteur,

N. AMAT

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02666


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : MELIODON

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Date de la décision : 31/07/2015
Date de l'import : 11/08/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14PA02666
Numéro NOR : CETATEXT000030960858 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-31;14pa02666 ?
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