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11/12/2015 | FRANCE | N°14PA01636

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 11 décembre 2015, 14PA01636


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française la décharge des suppléments d'impôt sur les transactions auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2005, 2006 et 2007, ainsi que la décharge des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1300374 du 10 décembre 2013, le Tribunal administratif de la Polynésie française a déchargé Mme A...de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes.

Procédure devant la Cour :

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r une requête enregistrée le 10 avril 2014 par télécopie et régularisée le 22 avril 2014, et un mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française la décharge des suppléments d'impôt sur les transactions auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2005, 2006 et 2007, ainsi que la décharge des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1300374 du 10 décembre 2013, le Tribunal administratif de la Polynésie française a déchargé Mme A...de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 avril 2014 par télécopie et régularisée le 22 avril 2014, et un mémoire enregistré le 11 août 2015, la Polynésie française, représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300374 du 10 décembre 2013 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) de remettre les impositions et pénalités ci-dessus mentionnées à la charge de

MmeA... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Mme A...a participé au financement d'un projet de construction d'hôtel qui a fait l'objet d'un seul permis de construire ; à la demande de la société SPGRD, le service d'urbanisme a autorisé, par un avenant du 25 mai 2005, la réalisation des travaux de construction en deux tranches successives ; malgré la non-réalisation de la tranche B, le promoteur a procédé à la sortie de certains des souscripteurs qui avaient décidé d'affecter leur souscription à la tranche A, en méconnaissance de l'article 374-1 du code des impôts qui conditionne explicitement le bénéfice du crédit d'impôt au financement d'un projet de construction à vocation hôtelière ; les dispositions du code des impôts ne prévoient pas de réalisation par tranches ni de défiscalisation pour un club house et un hangar ;

- l'administration fiscale ne saurait être tenue par une décision du service de l'urbanisme ;

- le délai de reprise de trois ans prévu par l'article 451-1 du code des impôts court à compter de l'expiration du délai à l'issue duquel le certificat de conformité devait être présenté ; en cas de prorogation du délai pour présenter le certificat de conformité, le point de départ de la prescription est également décalé ; la société SPGRD a bénéficié à plusieurs reprises d'une prorogation du délai de présentation du certificat de conformité définitif ;

- il ressort des termes de la lettre de 2006 du Vice-président que les deux tranches du projet sont indissociables ; suite à une demande écrite de la société SPGRD, le ministre de l'économie et des finances a confirmé en 2011 à deux reprises que les investisseurs ne devaient pas retirer leur financement avant l'achèvement du projet dans son ensemble ; les constructions du golf ont pu, dans un souci de conciliation, bénéficier du crédit d'impôt hôtelier de 60 % alors qu'il n'aurait été que

de 30 % pour un golf ;

- selon l'article 375-1 du code des impôts, le bénéficiaire du crédit d'impôt doit conserver ses parts ou apports jusqu'à l'obtention du certificat de conformité définitif ;

- le principe de sécurité juridique n'est pas applicable lorsqu'il s'agit de remettre en cause une situation indûment acquise ;

- les demandes successives de report de la société SPGRD constituent des manoeuvres dilatoires ayant pour but de retarder l'exercice d'un contrôle fiscal ; dans ces conditions, les différentes autorisations de prorogation doivent être analysées comme des actes interruptifs de prescription.

Par des mémoires en défense enregistrés le 2 septembre 2014 et le 10 novembre 2015, MmeA..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme

de 2 500 euros soit mise à la charge de la Polynésie française.

Elle soutient que :

- le délai de prescription applicable en l'espèce résulte de l'article 451-1 dans sa version antérieure à 2009, qui prévoit un délai de trois ans ; la notification de redressements est intervenue le 1er décembre 2011, après l'expiration de délai de prescription fixé au 31 décembre 2010 pour l'année la plus récente ;

- la possibilité de scinder le projet en deux tranches a été confirmée par le vice-président

en 2006 puis par le ministre de l'économie en 2011 ; celui-ci a également admis la possibilité de sortir du projet à compter de l'obtention de certificat de conformité de la tranche A.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Cheylan, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant que Mme A...a participé au financement du projet de construction d'un complexe hôtelier implanté près du parcours de golf de Témaé à Mooréa comprenant un hôtel, un club house et un hangar de maintenance, projet porté par la société South Pacific and Resort Development (SPGRD) dans le cadre d'un dispositif d'incitation fiscale à l'investissement en Polynésie française ; que ce dispositif a permis à Mme A...d'imputer un crédit d'impôt sur l'impôt sur les transactions dû au titre des exercices 2005, 2006 et 2007 ; que le service de l'urbanisme ayant délivré en 2006 un certificat de conformité pour la tranche A du projet relative aux travaux du club house et du hangar de maintenance, la société SPGRD a estimé qu'elle pouvait autoriser le

30 décembre 2006 Mme A...à mettre fin à sa participation ; que lors d'une vérification de comptabilité de la société SPGRD en 2011, le service a constaté que la construction de l'hôtel n'était pas achevée ; que l'administration a en outre procédé à un contrôle sur pièces du dossier fiscal de MmeA... ; qu'à la suite de ce contrôle, elle a notifié à MmeA..., par une notification de redressements en date du 1er décembre 2011, des redressements en matière d'impôt sur les transactions au titre des exercices 2005, 2006 et 2007 à raison de la remise en cause de l'imputation du crédit d'impôt, au motif que la contribuable n'avait pas respecté son engagement de conservation des investissements ; que la Polynésie française relève appel du jugement du 10 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a déchargé Mme A...des impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes auxquelles elle avait été assujettie à la suite de

ces contrôles ;

Sur le moyen de décharge retenu par le tribunal :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 374-1 du code des impôts de la

Polynésie française, dans sa rédaction issue de la délibération n° 2001-211 APF du

20 décembre 2001 : " Les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés bénéficient d'un crédit d'impôt de 60 % pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs réalisé dans un projet de construction à vocation hôtelière d'un coût total ou supérieur à 200 millions de francs. / (...) Le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné à l'engagement pris par le bénéficiaire de conserver les actions, parts ou apports au moins jusqu'à la date de délivrance du certificat de conformité (...) / Ces avantages sont remis en cause, et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant le cas échéant, l'expiration des délais de prescription, dans les circonstances suivantes : /- non-respect des conditions prévues par les dispositions du présent article ; (...) - non-présentation du certificat de conformité à l'issue du quarante-deuxième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire (...) " ; que le principe de sécurité juridique s'oppose toutefois à ce que puisse être légalement édictée une disposition qui institue un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription ; qu'il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française, qui dispose dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette ou la liquidation des impôts et taxes visés au présent code ainsi que les erreurs commises dans l'établissement des impositions, dans l'application des tarifs ou dans le calcul des cotisations peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due. " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le projet ci-dessus mentionné a fait l'objet d'un permis unique délivré le 17 juillet 2003 ; que, par une lettre du

25 mai 2005, le ministre de l'urbanisme a autorisé la société SPGRD à entreprendre les travaux en deux tranches, une tranche A correspondant à la construction du club house et du hangar de maintenance et une tranche B correspondant à la construction de l'hôtel ; que la tranche A du projet a fait l'objet d'un certificat de conformité le 27 octobre 2006 ; que l'administration fiscale, pour remettre en cause l'imputation du crédit d'impôt, a estimé que Mme A...ne pouvait mettre fin à sa souscription avant la délivrance du certificat de conformité pour l'ensemble du projet ; qu'il est constant que Mme A...a retiré sa souscription au plus tard en janvier 2007 ; qu'ainsi, le délai de reprise dont disposait l'administration pour réparer les omissions et insuffisances constatées dans l'assiette ou la liquidation de l'impôt sur les transactions au titre des années 2005 à 2007 avait, en application des dispositions précitées de l'article 451-1, expiré lorsque l'administration a remis en cause l'imputation du crédit d'impôt par une notification de redressements du 1er décembre 2011 ; que par suite, la Polynésie française n'est pas fondée à soutenir que la prescription ne lui était

pas opposable ;

4. Considérant, en second lieu, que l'administration invoque un report du point de départ du délai de reprise, compte tenu des prorogations successives de délai accordées à la société SPGRD pour présenter le certificat de conformité relatif à la tranche B du projet ; qu'il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article 374-1 que les avantages résultant de l'imputation du crédit d'impôt qu'elles prévoient peuvent être remis en cause dès lors que le certificat de conformité n'a pas été présenté à l'issue du quarante-deuxième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire ; que ces dispositions ne mentionnent aucune circonstance permettant de suspendre le délai de présentation du certificat de conformité ; que le fait générateur de l'imposition résultant de la remise en cause de l'imputation du crédit d'impôt doit ainsi être rattaché à l'année au cours de laquelle le délai de 42 mois a expiré ; que la société SPGRD aurait dû produire le certificat de conformité de la tranche B au plus tard le 17 janvier 2007 en application de ces dispositions ; qu'il appartenait dès lors à l'administration d'exercer son droit de reprise jusqu'au 31 décembre 2010 ; que par suite, et alors même que le ministre de l'économie a informé en 2011 la société SPGRD que les souscriptions devaient être conservées jusqu'à l'achèvement du projet hôtelier dans son ensemble, la Polynésie française n'est pas fondée à soutenir que l'administration fiscale pouvait bénéficier d'un report du point de départ du délai de reprise pour notifier les redressements en litige ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Polynésie française n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a accordé la décharge des impositions supplémentaires en litige et des pénalités dont elles étaient assorties ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Polynésie française le versement à Mme A...de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Polynésie française est rejetée.

Article 2 : La Polynésie française versera à Mme A...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et à la Polynésie française.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Cheylan, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2015.

Le rapporteur,

F. CHEYLAN Le président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

A-L. PINTEAU

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01636


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01636
Date de la décision : 11/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Frédéric CHEYLAN
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : EFTIMIE-SPITZ

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-11;14pa01636 ?
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